Premier jour de travail et Rose court déjà dans les couloirs d'université pour rejoindre la cafétéria à l'heure. Sa trottinette se balance à son bras, lui donnant aux passages des coups sur la hanche – elle aura sûrement un bleu de plus lui rappelant sa nécessité de devenir ponctuelle. Pourtant, aujourd'hui elle a fourni un effort monstre. Elle a réussi à se persuader que son service commençait trente minutes avant l'heure prévue histoire de ne pas se taper l'affiche le premier jour – surtout qu'elle doit voir le responsable étudiant pour qu'il lui explique un peu en quoi consiste le boulot. Rose regarde rapidement sa montre alors qu'elle s'arrête devant la porte qu'elle connaît par cœur – pile à l'heure, elle a réussi cet exploit et se promet d'envoyer un message à Léopold pour lui annoncer la grande nouvelle. Et peut-être même un à Violette, histoire d'être sûr que l'un d'eux lui offre une médaille pour ses efforts.

Une fois dans la cafét, Rose se précipite au comptoir avec un grand sourire. Cette journée commence définitivement bien. Du moins, c'est ce qu'elle se dit avant de se retrouver face à une personne qu'elle n'a quasiment plus aperçue depuis Poudlard. Benjamin Eddington en train de préparer un café pour un client – elle se retient de grimacer à l'idée que l'ancien Serpentard puisse devenir son collègue, ce serait un peu mal vu après tout. Ça aussi, elle le notifiera dans le sms pour Léo à la moindre occasion. Rose n'a jamais aimé les Serpentards populaires – et encore moins celui-ci en grande partie vu qu'il sortait avec Charlotte et que son amitié avec la jeune fille était alors terminée depuis longtemps. Pour elle, l'ancien joueur de Quidditch n'a jamais été rien d'autre qu'un petit con, et elle espère ne pas avoir à supporter son fan-club lors de ses heures de boulot.

— Euh, salut. Je suis Rose, annonce-t-elle en posant sa trottinette entre ses jambes. La nouvelle employée. Je commence aujourd'hui, mais je dois voir le responsable, ou je sais pas trop quoi. Elle jette un rapide coup d'œil à l'endroit où pourrait habituellement se trouver sa meilleure amie – personne, génial.Tu saurais pas où il se trouve ?, demande l'ancienne Gryffondor, priant un peu pour que ce ne soit pas à lui de lui expliquer le fonctionnement rapide de son nouveau travail.

Encore une commande d’encaissée avant de retourner s’adosser au mur et d’attendre un nouveau client. Benjamin travaillait déjà depuis deux à la cafétéria de l’université magique et même s’il n’était pas la personne la plus bavarde, personne ne s’était jamais plaint du service. Son t-shirt de la fac pour indiquer qu’il était bien serveur et pas un simple élève faisant mumuse avec la machine à chantilly -seul détail manquant, son badge. Il ne le portait jamais, tout simplement parce que celui-ci portait son nom et qu’ici, il préférait rester Zombie -ce qu’il devra sûrement expliquer à la nouvelle. Comme il s’occupait plus ou moins de gérer les petites annonces, il avait proposer une liste de boulot disponibles sur le campus à une jeune fille, qui d’après l’horloge ne devrait plus tarder.

Pile à l’heure, une petite brune qu’il avait déjà croisé dans les couloirs de Poudlard apparut dans son champ de vision et il comprit rapidement que la Rose du mail n’était nul autre qu’elle. Dans ses souvenirs, c’était une fille que son ex-petite-copine ne pouvait pas piffrer, mais ça ce n’était pas non plus un repaire. Après tout, Charlotte avait un bon nombre de personnes qu’elle ne pouvait pas voire en peinture -et dont il devait largement faire parti aujourd’hui. La petite s’arrêta devant lui en trottinette, le saluant rapidement. « Salut. » Naturellement, elle chercha le responsable pour faire un point, mais au plus grand malheur des deux, il s'avérait que c’était lui -en fait, le plus comique c’était de voir que c’était lui qui avait proposé un job à Rose Rowle. Il soupira légèrement avant de sortir son badge de sa poche arrière, montrant qu’il était le chef de service. « C’est moi. »

Si la surprise devait être présente, il ne lui laissa que le temps de ranger son badge pour digérer la nouvelle avant de reprendre sans aucun enthousiasme. « Ton badge et ton t-shirt se trouve dans l’arrière cuisine avec Anton. » Anton était un cuisinier polonais et parfaitement muet qui s’occupait de la cuisine de la cafétéria pour satisfaire l’appétit des élèves de manière saine. Autrement dit, pas le mec le plus bavard, même s’il était plutôt sympathique. « Va mettre ton badge et tout, puis je t’explique comment faire un café. » Benjamin se contentait de faire son boulot, mais n’avait pas l’impression d’y mettre beaucoup du sien.

Pour son plus grand malheur, il a fallu que ce soit lui – Benjamin Eddington – le responsable la cafétéria de l'université, chose qu'elle ignorait totalement même si elle y passe au minimum une fois par jour pour prendre un chocolat chaud extrêmement sucré avant de partir en cours. Elle retient un soupir, essayant de faire bonne impression pour son premier jour de travail même si paraître polie devant l'un des serpentards les plus populaires de son année est carrément le dernier de ses soucis. Elle ne se souvient pas lui avoir réellement parler mais le peu de choses qu'elle sait sur lui a toujours suffit à le classer dans la catégorie des personnes inintéressantes. Le fait qu'il soit sorti avec cette mangemorte de Charlotte Travers n'a rien arrangé à son cas, et même si elle ne peut pas le haïr pour si peu, il faisait clairement partie de ceux qu'elle était heureuse de ne plus croiser chaque jour de sa vie. Mais il faut croire que chaque bonne chose a une fin vu qu'elle se retrouve désormais obligée de travailler avec lui. Maudissant mentalement ce Zombie qui lui a proposé un boulot aux côtés du garçon, elle hoche la tête et se dirige dans l'arrière-cuisine pour poser ses affaires et prendre le nécessaire pour commencer son nouveau job.

— C'est bon, je suis là, dit-elle en arrivant derrière le bar après avoir pris le temps d'envoyer un message rapide à Léopold pour lui annoncer l'identité de son nouveau collègue. Du coup, comment on fait un café ? Laisse-moi deviner, avec de l'eau et du café, non ? Son ton est clairement insolent tout comme le petit sourire qu'elle a collé aux lèvres. En même temps, ce n'est pas la première fois qu'elle travaille dans un café, et elle sait très bien comment faire fonctionner une machine. Mais bon, elle suppose que c'est la procédure d'expliquer ça aux nouveaux, et qu'il ne fait pas ça parce qu'il la prend pour une gogole – chose qui lui déplairait particulièrement. C'est bon, je blague. Tu sais l'humour, tout ça mais vous deviez pas connaître ça à Serpentard. Rose met les mains dans les poches de son short en le regardant avec un sourire gentil – elle ne tient pas à se faire virer dès le premier jour, parce qu'elle devrait dans ce cas-là ranger les livres de la bibliothèque où elle ne met jamais les pieds. Alors du coup, comment on fait un café ?

L’humour de la brune laissait clairement à désirer, surtout qu’elle s’amusait déjà à lui lancer des piques sur la personne qu’il avait pu être quelques années auparavant. Il regrettait tellement de ne pas avoir ouvert le dossier élève, juste pour voir qui c’était. Un numéro étudiant dans une base de données, lui aurait évité cette situation et sûrement toutes les autres qui allaient suivre -de quoi le faire pousser un long soupire. « Bravo, tu veux une médaille pour l’humour ? » La gentillesse et la douceur n’était pas une chose qui apparaissait en premier chez l’anglais et il fallait souvent apprendre à le connaître, enfin surtout depuis qu’il était devenu Zombie. Après avoir ignoré les commentaires de Rose, il se lança dans la fastidieuse explication de la machine à café, que tout nouveau devait subir, comme un rite obligatoire pour entrer dans le cercle très fermé du monde du café de l’université. « Bon y a plusieurs sortes de café, elles sont écrites en dessous, donc si tu sais lire, ça passe. Après, tu fais comme ça. » Il lui montra une suite d’actions, ni trop rapidement, ni trop lentement, histoire de ne pas avoir à le refaire. En moins d’une minute, un café se lança, tandis qu’il lui montra la manivelle. « Si ça se bloque, tu demandes à Anton, moi ou Laurène ? Okay ? » Hors de question qu’elle s’amuse à forcer sur une machine qui a coûté un bras à l’université, sans quoi il se ferait taper sur les doigts par le trésorier.

Il se tourna ensuite vers l’étagère et attrapa un large mug, avant de revenir vers la machine pour poursuivre son explication. « Après pour servir tu prends des tasses si c’est sur place et des gobelets pour emporter. Et le chocolat c’est avec le chocolat qui est derrière, avec du lait, un chocolat quoi. Pour le reste, bah tu verras bien j’ai envie de dire. » Le bavardage inutile n’était pas son fort, surtout avec des gens qu’il n’appréciait pas spécialement. Maintenant que le café arrivait dans la tasse, il avala quelques gorgées, survivant de ces excitants que sont la théine et la caféine. Puis il la posa sur le comptoir, avant de lui montrer à quoi servait la carte qu’ils avaient autour du cou. Il la glissa dans une fente et le tiroir caisse s’ouvrit alors. « Tu dois pas oublié ta carte, parce qu’elle permet d’ouvrir la caisse. » Maintenant qu’il pensait avoir presque tout expliqué, il s’appuya contre le mur et attendit tranquillement le prochain client, pour laisser faire la petite brune.

Rose ne peut s'empêcher de grimacer en entendant sa remarque. La brune a conscience de ne pas être la personne la plus drôle de la terre, mais elle trouve qu'il abuse clairement en se moquant d'elle. Ce garçon ne semble pas avoir changé depuis Poudlard – il est toujours le pire des abrutis, et si elle n'avait pas vraiment besoin de ce boulot, elle partirait sûrement immédiatement. Travailler avec un ancien Serpentard, ce n'est pas pour elle, surtout si celui-ci a été l'une des personnes les plus populaires de leur année. Elle se contente donc de lever les yeux en ciel en soupirant bruyamment, histoire qu'il comprenne bien son mécontentement suite à cette blague des plus inutiles. Ce qui est sûr, c'est que ce garçon est loin de se prendre pour de la merde – ce qui est vraiment une chose qu'elle déteste. Elle a hâte de pouvoir rentrer pour raconter toute cette aventure à Léopold qui compatira sûrement – après tout, lui non plus n'a jamais porté les joueurs de Quidditch de Serpentard dans son cœur. Au final, les deux seules personnes qu'elle apprécie de cette maison son Eve et Maximilien, ce qui est déjà un exploit – sans bien sûr parler de son frère à qui elle voue un amour sans failles.

— Ouais, j'ai compris, t'inquiète pas. Elle soupire à nouveau – elle ne supporte pas cette manie qu'il a de la prendre pour une conne, et elle espère qu'il s'arrêtera bien vite. Après tout, ils doivent avoir plus ou moins le même âge, et le fait qu'il travaillait là avant n'est pas une raison suffisante pour qu'il la prenne de haut. Tu sais, j'ai déjà travaillé dans un café, alors pas besoin de me prendre pour une gogole. Rose n'est pas la personne ayant le plus de tact au monde, et elle le démontre encore une fois ici. En même temps, elle ne supporte pas les préjugés des gens à son sujet – comme le fait que, vu que son père possède le Deus, elle n'a forcément jamais travaillé de sa vie. La vérité est tout autre – elle aurait pu se contenter d'accepter les décisions parentales, et recevoir chaque mois un versement sur son compte, mais l'ancienne Gryffondor préfère pouvoir se vanter d'avoir des valeurs. Okay. Pas oublier la carte, je note. Elle sait parfaitement que cette partie du job sera sûrement la plus difficile pour elle, mais elle se promet mentalement de faire attention pour ne pas satisfaire son nouveau collègue qui serait à coup sûr trop heureux d'avoir vu juste. Un client arrive et c'est avec un grand sourire que Rose le sert. La petite a toujours été sociable, et ce n'est pas prêt de s'arrêter maintenant. Une fois terminé, elle se tourne vers Benjamin avec un sourire satisfait. C'est bon ? Rassuré ? Elle doute qu'ils deviennent un jour ami, mais vu qu'il est responsable de la cafétéria, elle n'a définitivement pas le choix de lui prouver qu'elle est capable d'assumer ce boulot.

La brune se braquait face aux explications de l’anglais, ce qui le fit lever les yeux au ciel. Il aurait certes pu se montrer plus sympathique face à la nouvelle recrue, mais il n’avait pas non plus l’impression d’être méchant. Il présentait simplement le travail, comme il était obligé de le faire pour n’importe qui. « J’explique juste, excuse d’heurter ton égo. » Il relâcha la manivelle un peu blasé, avant de se poser contre le mur, observant le premier service de la brune. Benjamin n’était pas spécialement inquiet, après tout ce n’était pas le job le plus compliqué du monde, surtout qu’il n’y avait pas foule à cette heure. Une fois qu’elle eut encaissé le café, elle retourna vers lui, presque fière. Sur un ton toujours aussi platonique, il se contenta de répondre en haussant les épaules. « J’étais pas spécialement inquiet. » Après tout, c’était son job à elle qui était en cause, pas le sien.

Toujours adossé à son mur, l’anglais regardait un peu les étudiants assis dans la salle, tout en écoutant la radio et plus précisément l’émission de Ernie. Au bout de quelques minutes, ses yeux se posèrent à nouveau sur Rose, qui semblait attendre quelque chose. Il se frotta le visage, avant de reprendre. « Tu as une période d’essai de une semaine, après c’est moi qui valide auprès de la direction si tu restes ou pas. » Il ne le disait absolument pas sur le ton de la menace. Benjamin ne la portait pas forcément dans son coeur, mais si tout ce passait bien, il n’avait aucune raison de la refuser dans le service. Alors qu’aucun client ne se pointait, il se servit un thé glacé, en attendant silencieusement.

Les journées de boulot risquaient d'être longues avec un collègue pareil et Rose regretterait presque son petit boulot au centre de Londres. Mais elle avait fini par devoir le quitter et elle devait avouer que c'était beaucoup plus de travailler à l'université même – peut-être que comme ça, elle finira par se pointer en cours de temps en temps, une chose quasiment impossible mais bon. Elle regarde Benjamin du coin de l'œil, un peu blasée. Elle ne l'a jamais vraiment aimé à Poudlard – il sortait avec Charlotte, raison suffisante – et elle doute que cette proximité naissante dans le cadre de la cafétéria puisse améliorer la situation. En fait, tout risque de s'empirer et elle compte bien rester loin de lui durant cette première semaine pour ne pas qu'il refuse pas de la garder. Ce serait un peu problématique, et Léopold aurait à supporter de longues soirées de plainte – son meilleur ami mérite mille fois que mieux que tout ça, c'est sûr.

— D'accord, je vois, dit-elle sans vraiment le regarder. Il a beau ne pas le dire sur le ton de la menace, elle est quand même agacée par ce garçon qu'elle ne peut s'empêcher de voir comme un populaire stupide se considérant mieux que tout le monde. C'est stupide, après tout, il a peut-être changé, mais l'image du joueur de Quidditch ne s'effacera pas si facilement. Bah on verra dans une semaine du coup. Elle reste tranquillement au comptoir à attendre en regardant la porte de la cafétéria. Elle hésite à envoyer un message à Violette pour lui demander de venir lui tenir un peu compagnie – chose que sa meilleure amie fera sûrement avec plaisir si elle n'est pas en train de bosser – mais elle se dit que ça ferait peut-être mal le premier jour. Autant attendre un peu avant de faire débarquer quotidiennement sa meilleure amie pour agresser les oreilles de l'ancien Serpentard – après tout, quand elles sont toutes les deux, le volume sonore devient un peu trop élevé pour le bien de tous. Elle regarde l'heure, lâchant un petit soupir. Le temps ne passe pas, et elle préférerait être tranquillement en train de jouer à WoW mais elle est bloquée avec Benjamin Eddington, quelle chance.