Il a l'impression de nager dans le bonheur complet, ou du moins c'est ce qu'il se dit en regardant Dimitri encore allongé sur son lit. Cette matinée est sûrement l'une des plus belles de sa vie – et pas uniquement parce qu'il a pu se réveiller aux côtés de son petit ami, mais aussi parce que celui-ci lui a promis de rester pour la soirée. Hippolyte n'est pas stupide, il sait que le russe a au moins trois fois plus de travail que lui et le fait qu'il accepte de passer un peu plus de temps avec lui lui fait quand même énormément plaisir. Il lui sourit. Tout est vraiment parfait – du moins tout l'était jusqu'au moment où le vieux s'est mis en tête que ce serait une bonne idée de chanter Like a virgin. Comme ça, sans raison. L'anglais lui lance un regard étonné avant de soupirer – qu'est-ce qu'il peut détester cette chanson.

— Mais Dimitri, pourquoi ? Pourquoi tu chantes cette horreur ? Il n'est pas sûr de vouloir connaître la réponse – il a un peu peur que Dimitri lui affirme une fois de plus trouver cette chanson particulièrement bien. Ce ne serait pas la première fois qu'il douterait des goûts de son copain – déjà pour sortir avec lui, le névrosé stéréotype du bobo anglais de la Gazette il faut avoir un problème. Le russe pourrait largement avoir qui il avait envie, et Hippolyte ne comprend toujours pas les raisons qui l'ont poussé à sortir avec lui, bien qu'il soit maintenant loin de s'en plaindre. Je hais cette chanson, elle est ridicule. Le ministre n'a pas l'air décidé à arrêter, mais semble plutôt s'amuser de la réaction du journaliste qui soupire. Diiiim, s'il te plaît. Il pousse un énième soupir avant de prendre un coussin qu'il place sur la tête de son copain pour l'étouffer. Il sait très bien qu'il n'a aucune chance de parvenir à ses fins, Dimitri a bien plus de force que lui et n'aura aucun mal à le faire dégager quand il aura envie.

Bien qu'il adorait sa maison et son lit, Dimitri adorait se réveiller dans les draps de quelqu'un d'autre et encore plus ceux de son petit ami. Cela faisait déjà quelques mois que le russe sortait avec le journaliste politique et étrangement, il ne s'en lassait pas vraiment. Dans cette relation, il y trouvait une certaine stabilité et douceur dont il n'avait pas du tout l'habitude. Se réveiller de manière régulière auprès de la même personne était une chose aussi rare qu'improbable pour lui et il se demandait parfois pourquoi ce blond lui donnait goût à ce genre de choses. La lumière du jour éclairait la chambre et tombait dans un rayon aussi pur que limpide sur le visage du journaliste qui sans surprise était déjà éveillé. Dimitri lui offrit un sourire, avant de s'étirer un peu et de s'ébouriffer les cheveux. Soudainement, une envie de chanter et d'embêter son copain lui vint et en moins de temps qu'il en faut pour dire quidditch, il se mit à chanter la célèbre chanson Like a Virgin. Un symbole de la libération féminine d'après lui.

Le mécontentement d'Hippolyte était parfaitement attendu et cela ne manquait pas d'amuser le plus âgé qui ne pouvait plus du tout cacher son sourire moqueur sur son visage. Il ne comprenait pas vraiment pourquoi son petit copain n'aimait pas cette chanson et finalement, cela n'avait aucune importance, parce qu'il n'était pas vraiment du genre à juger les goûts des gens. Alors qu'il allait entamer le troisième couplet, un énorme oreiller se plaqua sur son visage dans le but de le faire taire. Cette attaque surprise l'amusa beaucoup et il ne pouvait s'empêcher de rire, avant de se mettre à crier. « A l'aaaiiiide ! Mon copain veut me tuer !!! A l'aaaaiiiide !! » Dimitri riait aux éclats et avant de manquer d'air, il attrapa l'anglais et le repoussa gentiment avant de le regarder avec ce sourire si célèbre. « Si tu veux me tuer, tu devrais t'y prendre autrement. » Un haussement de sourcil, avant de s'avancer vers lui pour l'embrasser en souriant. « Si Roosevelt était là, on n'aurait même pas besoin de sortir du lit pour avoir un café et un petit déjeuner. » Dimitri aimait rappeler le caractère irremplaçable de son elfe de maison. Au même moment, il attrapa une cigarette qui trainait et l'alluma avant de s'adosser au mur.

Hippolyte ne peut pas s'empêcher de soupirer en entendant les conneries de son copain – il ne s'imagine pas un instant envisager de le tuer, déjà parce qu'il est peut-être une des personnes les plus non violentes qui existent, mais également parce qu'il a de plus en plus de mal à imaginer une seule seconde sa vie sans le russe. Bien sûr, il n'est pas stupide et il sait que ce détail est assez problématique – il a tendance à passer ses heures au bureau dans la peur du moment où Dimitri en aura marre de lui, se lassera et trouvera un copain plus digne de lui. C'est quelque chose qu'il n'a jamais avoué à personne – même pas à sa meilleure même si celle-ci se doute sûrement du stress qu'il peut ressentir face à cette relation inhabituelle. Il finit par rougir un peu face au sourire de Dimitri – il faudrait ne pas être humain pour résister à une beauté pareille, il en est persuadé.

— T'es bête Dim, j'ai aucune envie de te tuer, dit-il avec un sourire aux lèvres à cause du baiser du russe. Il se sent un peu stupide – un peu comme un adolescent qui aurait son premier petit copain. D'un côté, ce n'est pas totalement faux, il n'a jamais été officiellement avec quelqu'un comme Dimitri depuis qu'il est revenu des États-Unis – et il ne préfère pas penser à l'unique relation qu'il y a eu. Roosevelt est pas là, mais si tu veux je peux aller te chercher le petit déjeuner. Il n'a jamais été du genre à traîner au lit pendant des heures. Dimitri est en réalité la seule personne qui a réussi à lui y faire passer plus de quelques minutes après le réveil – en même temps, il ferait tout à condition que ça puisse faire plaisir au ministre. Genre, un peu de café ? Il lui sourit avant de se lever rapidement, attrapant au passage la chemise de Dimitri pour l'enfiler – il adore piquer les affaires du russe, même si elles sont trop grandes pour lui. Le simple fait de sentir l'odeur de son copain autour de lui affiche sur son visage un petit sourire heureux.

Des matins comme celui-ci, n'était pas vraiment une chose dont Dimitri avait l'habitude, pour dire vrai il ne se souvenait pas d'un moment ressemblant à celui-là de toute sa vie. D'une certaine manière, cela était doux et reposant, comme si le reste n'existait pas, au-delà des murs de cet appartement. « J'espère bien que tu ne veux pas me tuer, surtout après la nuit qu'on vient de passer. » Un petit clin d'oeil plein de sous-entendus en direction de l'anglais, tandis qu'il recracha la fumée de la bouffée qu'il venait de prendre. La cigarette du matin était un moment sacré pour le russe, tout comme le café, que l'anglais se proposa justement d'aller chercher. « Un café ? Très bonne idée, tu sais me faire plaisir mon chou. » Hippolyte enfilait déjà la chemise à carreaux du russe, ce qui le fit sourire. La chemise était clairement trop grande, mais il ne pouvait s'empêcher vraiment adorable dedans.

Le blond quitta la chambre et Dimitri en profita pour terminer tranquillement sa cigarette, se laissant ensuite retomber dans le lit. De sa main droite, il attrapa sa baguette magique et lança le tourne-disque -un vieil album d'Oasis. Il connaissait déjà l'amour de l'anglais pour ce groupe et décida de laisser la musique. Allonger sur le ventre, il attendait son copain et lorsqu'il entendit ses pas dans son dos, il ne put retenir un sourire. La vie de couple avait réellement quelque chose de novateur pour lui, quelque chose qu'il trouvait plus qu'agréable. « Mon chou ? Tu as passé une bonne nuit ? Et je ne parle pas du moment où on dormait. » Sans même devoir le regarder, il connaissait déjà la couleur qu'allaient prendre ses joues et cela le fit vaguement rire.

Il s'allume une cigarette en regardant le café qui coule lentement. Il a toujours aux lèvres ce sourire béat qui ferait mourir de rire sa meilleure amie si elle le voyait. Mais il se doute qu'Automne ne viendra pas aujourd'hui – elle sait très bien qu'il avait une soirée de prévu avec le russe qu'elle ne semble pas porter autant que lui dans son cœur. Hippolyte s'en fiche – contrairement à la majorité des personnes qu'il connaît, il trouve Dimitri gentil et adorable, et ça bien qu'il soit le seul à l'affirmer. Il attrape son téléphone pour consulter ses messages. Le problème avec le travail de journaliste c'est qu'on peut être sollicité même un jour de congé, et bien que cela ne le gêne pas du tout habituellement, il n'a aucune envie de travailler aujourd'hui – pas alors qu'il pourrait passer sa journée avec son copain.

Il attrape finalement les deux tasses de café avant de revenir dans sa chambre d'où il peut entendre son groupe préféré. Il sourit – Oasis et lui, c'est une grande histoire d'amour, il s'agit du seul groupe qui a été capable de remplacer les Beatles dans son cœur. Il chantonne tranquillement Hello en arrivant avec le plateau où se trouve également du pain d'épice et de la tarte à l'abricot. Il le pose sur la table de chevet à côté de Dimitri avant de lâcher un soupir.

— Je- Euh- Oui ? Une très bonne nuit, parvient-il à articuler les joues rouges. Il se doute que Dimitri le fait exprès en accumulant les sous-entendus depuis le réveil. Ce n'est pas la première fois – et sûrement pas la dernière – qu'il le fait, sachant parfaitement que ce genre de remarque le gêne. Il soupire en s'asseyant sur son lit à côté de son copain – des mois après, il a toujours du mal à y croire. Ton café est prêt. Tasse bleu, touche pas au mien, y'a de la vanille. Il sourit en passant sa main dans les cheveux du russe. On fait quoi aujourd'hui du coup ? Il n'est pas partisan des journées au lit mais il sait très bien qu'il sera incapable de refuser quoi que ce soit si Dimitri lui demande.

La gêne de son copain avait quelque chose de réellement amusant, quelque chose de charmeur et attirant à la fois -du mois aux yeux du russe. Ce dernier venait de se poser sur le lit, après avoir tenté une réponse à sa question totalement ambiguë. Naturellement, il le tira vers lui et l'embrassa rapidement, histoire de lui faire comprendre que lui aussi avait passé une très bonne nuit en sa compagnie. Dimitri se fichait bien des gens qui voyaient Hippolyte comme un bobo ennuyeux de la gazette du sorcier, il se sentait bien avec lui et ne voyait aucune raison de faire autrement. En fait, la seule chose qui le gênait, c'était qu'il était réellement en train de s'attacher à ce mode de vie et surtout à l'anglais. Un attachement qui pourrait vite se transformer en problèmes, surtout dans ses domaines d'activités.

Le russe lança un regard aux deux tasses qui se tenaient sur le chevet en souriant, tandis que la main du blond passa dans ses cheveux. « Okay, bleu pour moi. Pourquoi bleu d'ailleurs ? Tu sais que le bleu est la couleur de la monarchie ? Le sang des nobles ? » Dimitri ne pouvait jamais faire les choses simplement, il était toujours en train de relever des détails parfaitement insignifiant pour le commun des mortels. « Roi Dimitri ? Ça sonne pas si mal. » Il lui sourit gentiment en lui caressant le bas du dos. Puis se redressa pour boire son fameux café.

« J'imaginais une journée calme qui nous emmènerait pas plus loin que ce lit, mais qui me montrerait quand même la vie de Monsieur Nemours.. » Il porta la tasse à ses lèvres en observant le blond en assurant de ne pas se brûler. « Tu fais quoi quand tu es seul chez toi ? » Soudainement, la chose qui servait de chien à l'anglais débarqua sur le lit et Dimitri se contenta de l'ignorer parfaitement, préférant de loin son café.

— Roi Dimitri, ça sonne terriblement mal, dit-il en rigolant, sa tasse de café à la main. Hippolyte s'est calé contre le brun en souriant – profitant un peu de la présence du russe de bon matin pour l'embrasser timidement. S'il y a une chose dont il ne se lassera jamais, c'est d'écouter Dimitri parler. Pour la plupart des gens, ça pourrait paraître complètement lassant, voire parfois ennuyant, mais il trouve que tous ces moments où le russe se perd dans des explications qui n'ont rien à voir avec la situation font son charme – du moins en partie. Par contre, j'avais jamais entendu ça. Chez nous, la couleur de la monarchie c'est plus le rouge, et crois-moi je suis calé en ce qui concerne la famille royale. Sa grand-mère est la bonne anglaise de base, et personne ne s'étonnera de voir des photos de la Reine dans sa cuisine et son salon.

Ses yeux se posent à nouveau sur Dimitri quand il entend sa réponse à la question posée. Ce qu'il fait quand il est seul chez lui ? Hippolyte se doute que son copain n'a pas la moindre envie de faire du ménage – ou pire, de faire prendre un bain à Mordred. Il réfléchit rapidement avant de poser sa tasse de café et de faire descendre son chien du lit rapidement – une chose qu'il n'accepte de faire que pour deux personnes sur cette planète, sa meilleure amie et le russe. Il regarde Dimitri avec un petit sourire, les joues un peu roses à l'idée de lui montrer ce qui occupe réellement son temps libre.

— Je veux bien te montrer mais il faut que tu me promettes de pas te moquer. L'anglais se lève pour aller récupérer la guitare acoustique qui se trouve au-dessus de son armoire. Rares sont les personnes devant qui il a accepté de jouer – ses amis proches, sa famille et encore. Alors quand il revient s'asseoir contre Dimitri, l'instrument entre les mains, il hésite grandement. Il a conscience de ne pas trop mal jouer et chanter mais il doute que ça soit suffisant pour plaire au russe. Bon, je connais pas Like a virgin, alors tu auras le droit aux Beatles, dit-il en commençant à jouer I want to hold your hand. Peu de gens le savent – peut-être même personne – mais il s'agit aux yeux du journaliste de la plus belle chanson d'amour qui existe. Il s'agit d'un geste simple – tenir une main, avoir le courage de le faire pour ne plus vraiment la lâcher. Il sourit en commençant à chanter, observant au passage la réaction de son copain du coin de l'œil. Voilà, ajoute-t-il en rougissant une fois la chanson terminée.

Un sourire sincère sur son visage en entendant son petit copain détruire un hypothétique avenir royal, tandis qu'il le serrait contre lui. Une chaleur corporelle terriblement agréable de si bon matin. la mais sur son ventre, il effectuait à l'aide de son pouce des mouvements répétitifs. Le genre de petite attention qu'il se découvrait presque naturellement avec le blond. Il posa sa tête sur l'épaule du blond qui se tenait assis contre lui, buvant son café à la vanille. « Tu comprends, le sang des nobles est bleu. » Mécaniquement, il remonta sur le bras de Hippolyte sa veine du bout de ses doigts. Dimitri n'était un fan de la monarchie, raison pour laquelle il méprisait profondément la famille royale, pour dire vrai, Dimitri méprisait tous les systèmes politiques du monde. C'était peut-être justement parce qu'il était un politicien qu'il méprisait la politique, qui était pour lui le plus grand tour de magie du monde. « Ca ne m'étonne pas de la part d'un anglais comme toi. » Un bisous rapide dans le cou, avant de se détacher un peu pour attraper sa tasse de café et en boire quelques gorgées.

Sa suggestion semblait troubler un peu l'anglais qui au bout de quelques minutes se leva enfin. Le russe se demandait bien l'idée que le blond avait eu et surtout pourquoi il pourrait en rire. « Je ne fais pas de promesses que je ne peux pas tenir. » Un sourire amusé, tandis que le blond attrapa une guitare qui se trouvait sur l'armoire de la chambre, avant de revenir se poser contre lui. Dimitri le laissa s'installer confortablement, lui caressant rapidement le dos. « Les Beatles ? » Un petit rire, avant de finir son café. « Tu n'es pas à moitié anglais toi. » Un sourire avant d'écouter tranquillement son copain jouer un morceau célèbre. A ce moment précis, en regardant et en écoutant Hippolyte, il le trouvait terriblement mignon et charmant. Hippolyte représentait un tout ce que sa vie ne pourra jamais être et il était littéralement en train de tomber sous le charme. La chanson toucha à son terme, et l'anglais le regarda les joues rouges. Dimitri lui sourit sincèrement. « Admirable. » A l'aide de sa main, il se recoiffa légèrement avant de s'avancer un peu plus contre lui et de lui murmurer à l'oreille. « Tu m'apprendrais ? » Après tout, il n'avait jamais pris le temps de s'essayer à la musique, c'était le moment où jamais.

Hippolyte a l'impression d'être sur un petit nuage – il n'aurait jamais pensé pouvoir être aussi heureux qu'à ce moment précis. Dimitri apparaît comme le copain parfait et l'anglais n'a plus qu'une seule envie – passer le plus de temps possible en sa compagnie jusqu'à ce que l'autre se lasse et le laisse. Son côté pessimiste a beau lui rappeler qu'il finira par souffrir, une part de lui refuse de céder à la méfiance et préfère se complaire dans ce niveau de bonheur inhabituel. Chaque geste de Dimitri lui donne envie de sourire comme un bienheureux pendant des heures, chaque petite attention du russe lui rappelle pourquoi il a fini par tomber amoureux de lui au bout de ces cinq mois passés ensemble. Une chose qu'il n'a encore avouée à personne – ni à son copain qui ne partagera sûrement jamais ses sentiments, ni à sa meilleure amie qui finira sûrement par se moquer de lui. Il préfère profiter sans rien dire – ce n'est pas tous les jours qu'il peut passer une matinée aussi agréable avec le ministre, et le simple fait d'être calé contre lui à l'écouter lui suffit. Malgré ses quelques conflits avec sa machine à café, Hippolyte reste quelqu'un de peu compliqué en matière de relation – peut-être parce que toutes les précédentes se sont soldés par des échecs et qu'il n'a pas envie de faire fuir le brun comme il a fait fuir les autres. Parce qu'il a plongé, il a bien conscience d'avoir certainement dépassé le point de non-retour dans cette relation, et ça pour son plus grand malheur.

— Arrête, je fais pas si anglais que ça, dit-il avec la même mauvaise foi que lorsqu'il annonce à sa meilleure amie qu'il n'est pas réellement grognon. Il a bien conscience que c'est un mensonge – il fait bien plus anglais que beaucoup de personnes qu'il connaît – mais il ne peut s'empêcher de nier pour une raison assez simple. Il est incapable de comprendre comment quelqu'un d'aussi beau que le ministre peut s'intéresser à quelqu'un comme lui – quelqu'un de si anglais et ennuyeux. Il lui fait un rapide bisou sur la joue une fois le morceau terminé – une chose qu'il se serait difficilement permis il y a quelques mois mais qu'il fait désormais beaucoup plus régulièrement. Ce n'est pas grand-chose – une simple marque d'affection – mais pour lui c'est déjà beaucoup. Admirable ? Tu crois pas que tu exagères ? Je trouve ça plutôt moyen. Pour ne pas dire médiocre. Hippolyte est très dur avec lui-même, et ça même si tous ses proches lui répètent qu'il chante et joue particulièrement bien. Ses yeux se posent sur Dimitri se recoiffant – un spectacle magnifique dont il ne se lassera sûrement jamais. T'apprendre à jouer ?, dit-il tout bas. Il a beau être plus à l'aise qu'avant, certaines choses continuent à le gêner légèrement – comme cette proximité particulièrement agréable. Il l'embrasse rapidement avant lui mettre la guitare dans les mains. Tu veux apprendre quoi ?, demande l'anglais avant de s'installer contre le mur pour s'allumer une cigarette.

« Tu fais aussi anglais, que moi je ne le fais pas. » Dimitri avait toujours trouvé les anglais attirants, dans leur morphologie, mais aussi dans leur attitude et dans cette catégorie, le blond était plutôt bien placé. Le journaliste pouvait difficilement faire plus anglais et il pourrait très bien être le genre d’acteur que l’on pourrait voir dans une série britannique du genre, Doctor Who. Hippolyte, contrairement à ce qu’il pouvait penser, était exactement ce que le russe aimait chez un homme et n’avait définitivement rien à changer. Ce dernier lui colla un bisous sur la joue, ce qui lui dessina un joli sourire. Ce n’était pas tout le jours qu’il avait le droit à ce genre de marque d’affection de la part de son copain.

Sans surprise, Hippolyte désapprouvait son compliment et en profita pour se dévaloriser comme il le faisait souvent sans raisons valables aux yeux du russe. « Arrête mon chou, c’est très bien. » Au même moment, il lui embrassa rapidement le cou. Son murmure à l’oreille semblait intimider le plus jeune ce qui lui décocha un sourire dans le coin des lèvres. « Oui, m’apprendre. » Le blond se tourna et l’embrassa rapidement, avant de lui coller la guitare dans les bras et de s’allumer une cigarette. Le russe plaqua la guitare contre lui et observa son petit ami qui venait de s’adosser au mur. « Je ne sais pas, on peut faire la même, comme tu l’aimes bien. »

La chose qui servait de chien à Hippolyte sauta sur le lit et fonça en direction de son maître pour lui faire des léchouilles matinales. « Super, je suis heureux de savoir que j’ai pu mettre ma bouche, là où il a déposé ses microbes de sac à puces. » Un sourire moqueur en direction de l’anglais, avant de se concentrer sur la guitare, en grattant quelques cordes. « Bon, je t’écoute mon chou. »

— Fais attention, à force tu vas finir par vraiment aimer les Beatles. Hippolyte le regarde avec un petit sourire moqueur. Il a conscience que sa passion pour les groupes britanniques est assez risible – surtout pour quelqu'un qui passe sa vie à répéter qu'il n'est pas si anglais que ça. Alors les rares fois où il a l'occasion de se moquer des gens, que ce soit sa meilleure amie française, son copain russe ou sa collègue asiatique, avec un de ses groupes préférés, il n'hésite pas. Il lâche un petit soupir quand Mordred arrive telle une tornade sur le lit – il adore son chien mais il sait que ce n'est pas le cas de tout le monde, à commencer par son petit ami. Arrête un peu de te plaindre, il est adorable. L'anglais rigole en faisant descendre l'animal du lit pour se rapprocher de son copain. Alors c'est simple, je vais te montrer. Le cours improvisé commence, au grand bonheur d'Hippolyte qui en profite pour se coller au russe. Entendre celui-ci jouer une de ses chanson préférées, c'est le summum du bonheur.

L'anglais finit par s'allonger sur son lit pour écouter le russe qui recommence pour la énième fois les mêmes accords. Dimitri apprend vite ce qui n'est pas étonnant en soi. Il lui sourit tendrement – cette matinée est vraiment l'une des plus agréables qu'il lui a été donné de passer, et il est heureux que le ministre soit encore là et n'est pas décidé de partir en prétextant avoir du travail comme il le fait souvent. Dans ce genre de moment, Hippolyte lui pardonnerait tout – les fois où il débarque sans prévenir à quatre heures du matin, complètement bourré, tous ces moments où il le met mal à l'aise en public en affichant trop ouvertement leur relation – vraiment tout. Quelques minutes plus tard, Dimitri pose finalement la guitare et il finit par se lever.

— Je vais me chercher un autre café, et voir ce que je peux faire à manger, dit-il en attrapant les deux tasses vides. Tu as une préférence ? Une fois dans la cuisine, il ouvre le frigo pour voir ce qu'il y a – autres des fruits qui ne sont définitivement pas la base alimentaire du russe, contrairement à lui. Il se tourne vers la porte pour voir Dimitri qui a presque fini de se rhabiller et un petit air triste s'affiche immédiatement sur son visage. Tu pars ?, demande-t-il timidement. Il ne l'avouera jamais mais il déteste ces moments – quand le ministre part les lendemains des soirées qu'ils passent ensemble. Tu avais dit que tu resterais aujourd'hui. Il a honte de lui, ayant l'impression d'être une petite chose fragile quémandant un peu d'attention. Il ose à peine se rapprocher de lui – persuadé que ça ne changera rien au choix du russe. S'il te plaît. Je voulais vraiment qu'on passe la journée ensemble, pour une fois. Il marque une petite pause, ayant bien trop à son goût l'impression de faire un caprice. Enfin, si tu peux pas, c'est pas grave. Je sais que tu as du boulot et- Il le regarde un peu attristé. Et c'est normal, je comprends que tu as mieux à faire. À cet instant, Hippolyte se sent définitivement trop stupide pour son propre bien.

Faire de la guitare était finalement assez simple, surtout quand on avait une facilité d’apprentissage comme celle du russe. Cela dit, il y avait une différence entre mémoriser des accords et avoir la fibre musicale, ce qui n’était pas vraiment son cas. Néanmoins, gratter des cordes en compagnie de son petit copain qui en profitait pour se coller à lui était vraiment sympathique et il ne se souvenait pas d’un matin aussi doux dans sa vie. Dimitri adorait ses petits moment que lui offrait l’anglais, même si cela devait le rendre fan des Beatles. Le russe ne regardait plus du tout l’heure, tandis que les notes s'enchaînaient, se concentrant seulement sur l’instant présent. Ce fut seulement quand l’anglais se leva pour chercher un café qu’il posa son regard sur le réveil matin qui se tenait sur la table de nuit. Il réalisa alors qu’il était déjà presque midi, ce qui était une première pour lui. En général, Dimitri ne tardait jamais trop longtemps, comme pour fuir ce cocon auquel il ne pouvait s’attacher.

Le russe paniqua un peu et n’écouta pas l’autre dans la cuisine, trop occupé à s’habiller dans le but de prendre la fuite. Il entendait déjà la voix de son grand frère en train de se moquer de lui et lui disant qu’il devenait faible. Alors qu’il gagna le salon, cherchant un t-shirt, le blond arriva dans son dos lui demandant une question un peu gênante. Il se figea et se tourna vers lui, un sourire de circonstances sur le visage. Bien sûr, ça lui faisait un peu de la peine de voir son petit ami comme ça, il avait l’impression de lui faire du mal et ce n’était pas vraiment le but. En fait, il se mettait simplement des barrières, pour ne pas prendre goût à tout cela, parce qu’il savait que cela ne durerait pas. Dimitri n’avait pas le droit d’aimer, c’était la vie qu’il avait choisi et il était sans le vouloir en train de s’attacher à cet anglais. « Oh, mon chou le prend pas mal, mais je dois faire des trucs très importants et en plus tu pourras en profiter pour faire tes trucs, tu sais genre … Je sais pas, tes trucs quoi. » Le russe avait rarement eu une excuse si nulle et il embrassa rapidement l’anglais avant de se diriger vers la sortie.

En vérité, il n’avait rien à faire et se trouvait simplement des excuses pour ne pas affronter la vérité. Plus il s’attachait, plus cela sera compliqué et il ne pouvait pas se le permettre. Pourtant lorsque sa main se posa sur la poignée, il n’avait aucune envie de partir. Dans un effort surhumain, il ouvrit la porte et regarda la cage d’escalier. Face à lui se tenait sa vie habituelle, le choix de la facilité et derrière lui quelque chose de nouveau qu’il aimerait bien découvrir un peu. Dimitri était une personne spontanée et après quelques secondes immobile, il referma la porte -envoyant valsé les commentaires que lui ferait Nikolaï. Au diable tout ça, s’il voulait passer la journée ici personne ne pouvait l’en empêcher. « J’ai changé d’avis, j’ai pas envie de partir. » Il se tourna vers l’anglais comme si de rien était et retourna dans la cuisine. « On mange quoi ? » Un sourire, avant de s’adosser au comptoir.

Hippolyte arrive à esquisser un petit sourire quand Dimitri lui annonce ne vraiment pas pouvoir rester – pour plus la forme que parce qu'il en a réellement envie. Il réalise qu'il n'aurait pas dû insister pour que le russe reste – c'est un ministre, c'est normal qu'il ait du boulot. Lui aussi en a théoriquement – des articles à faire, un nouveau morceau à apprendre, un peu de ménage à faire – mais l'annonce du départ de son petit ami lui donne juste envie de se remettre sous la couette en attendant que le temps passe. Il se faisait une joie à l'idée de rester plus longtemps avec lui. Quand Dimitri ouvre la porte, Hippolyte le regarde tristement – adieu le sourire obligé pour ne pas avoir l'air un peu trop accro, l'anglais est juste stupidement triste, stupidement déjà en manque de cette chaleur rassurante que lui procure les bras du russe.

— Quoi ? Hippolyte regarde Dimitri étonné, pas sûr de comprendre pourquoi le russe change d'avis au bout de quelques minutes. Mais il n'ira pas s'en plaindre, trop heureux de passer le reste de sa journée avec lui. T'es sûr que ça va pas déranger ? Il sourit en sortant des œufs de son frigo et d'autres choses à mettre dans le plat du jour. Une omelette, ça te va ? Il lui sourit en s'approchant de lui pour l'embrasser rapidement. Je suis vraiment content que tu puisses rester. Il lui fait un petit câlin avant de retourner à la préparation du repas du midi – c'est définitivement l'une des meilleures matinées de sa vie.