You turn me on

Love's like a bomb, blowing my mind

Les raisons qui l'ont poussé à venir s'enfermer dans une boîte à l'ambiance étouffante restent obscures. D'un coup d'œil gêné, il contemple l'un des hommes qui l'a toujours intimidé – Dimitri Pavel Bolgarov dans sa chemise à carreaux lui paraît beaucoup trop beau. Son regard se plonge à nouveau dans la pinte de bière fraîche qu'il triture des mains. Qu'est-ce que tu fous là ?, lui répète une petite voix dans sa tête. Il serait bien chez lui, une couverture douce à la légère odeur de lavande sur les jambes, en pleine conversation avec sa meilleure amie, à se plaindre du dernier article publié dans le Times alors que celle-ci ne l'écoute qu'à moitié. Il a toujours craint ce genre d'endroit, ses habitués et ses microbes. Pire que cela, il a toujours redouté de se retrouver seul avec l'actuel directeur du département des jeux et des sports magiques. Depuis cette fameuse époque, depuis cette relation qu'ils ont honteusement entretenue et qui remonte maintenant à plusieurs années, il préfère les solutions de facilité.  Son chien l'attend, il peut toujours prétexter un travail urgent à finir.

Il est toujours là pourtant, à attendre comme un gosse à qui on aurait promis un paquet de bonbons s'il parvenait à se tenir tranquille. Sagement, attentif au moindre geste du russe. Il sait malsain ce besoin qu'il a depuis quelques jours d'attirer son attention – depuis l'instant où l'idée lui est venu d'écrire une nouvelle lettre – et il n'a même pas osé s'étendre sur le sujet en compagnie de ses amis. Porter un quelconque intérêt à un Bolgarov n'est pas l'idée du siècle et à aucun moment il ne s'attend à ce qu'on le félicite pour son initiative. Vaincre le célibat, chercher dans sa vie une certaine stabilité – tous ses buts s'opposent violemment au personnage atypique face à lui. Encore une fois, il est touché par son charme, cette force presque magique lui répète de tenter sa chance, qu'il n'a rien à perdre.
On finit toujours par perdre quelque chose. Mais il est là, à sourire.

— Ah ? Merci, enfin je crois. Je suis plutôt d'accord avec toi, un journaliste doit informer, ne pas endoctriner donc il se doit de rester neutre. Son métier finit toujours par se retrouver comme sujet de conversation prioritaire. Il ne sait pas pourquoi – peut-être parce que les gens pensent à lui en lisant son article, en lisant son prénom dans la rubrique politique. Il aurait aimé pouvoir penser qu'avec lui, ce serait différent. Tout est différent avec lui après tout, les rendez-vous, l'attente, l'espoir même d'entretenir une relation. Ses paroles le font sourire plus qu'elles ne l'étonnent. Dimitri n'est pas un ange, mais il trouve ça drôle qu'un sorcier puisse avoir des comptes à rendre avec la justice moldue. C'est vrai que  c'est pas le genre de bar que je préfère mais c'est pas grave. Tout le monde le voit qu'il est mal à l'aise ici Hippolyte, que la musique le gêne, que ses mains restent collées sur ses genoux à l'exception des moments où elles vont chercher sa bière. Mais qu'est-ce qu'il t'est arrivé d'ailleurs ? Ne me dis pas que tu es recherché quand même ?

Des brides de films lui reviennent en mémoire. Pour lui elles sont là, les confrontations avec la justice, des scènes fictives, parfois drôles, parfois prenantes. Le bobo anglais vit un quotidien millimétré, cadré, peu de place à l'extravagance ou autres choses dans le genre. La possibilité de pouvoir boire un verre avec une personne si vivante comme Dimitri le remplit d'une joie inexpliquée, du sentiment de faire quelque chose qui se rapproche plus de l'aventure que de la simple routine.

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Tu sors avec un repris de justice. La phrase se répète en boucle dans sa tête. Une partie de son cerveau – la plus logique sûrement, celle qui le raccroche encore à cet instant à sa moralité et sa bonne conduite – lui rappelle que ce n'est pas une bonne idée, que c'est des raisons qui poussent Dimitri à être une menace pour lui. Une menace pour sa stabilité, pour son confort. Lui, le paranoïaque de service, celui qui s'inquiète toujours trop tôt pour un simple courant d'air ne peut pas passer du temps avec le russe. Si ça se trouve, il risque la prison. L'adrénaline prend le dessus, sensation si grisante. Sur l'instant, il est heureux d'être ici, de pouvoir colorer un peu son quotidien fade. Regarder un énième film danois avec Automne – bien que ce soit une de ses activités préférées – lui paraît soudainement moins amusant. C'est avec un regard d'enfant découvrant ses cadeaux un matin de Noël qu'il regarde le russe lui raconter sa dernière magouille – mettre la faute sur Rougemont. Et même s'il ne le connaît pas personnellement – ce dont il est plutôt heureux – il connaît assez la réputation du concerné pour comprendre pourquoi Dimitri fait ça. Il n'est pas sûr que le russe puisse apprécier le français – tout semble toujours extrême chez ce genre de personne, ils aiment ou haïssent, sans demi-mesures.

— Je vois, ingénieux. Et complètement illégal. Son sens moral souffre à cet instant. Ce n'est pas à lui que ce genre de situation arriverait, il est beaucoup trop calme et respectueux des lois pour ça. Il finit par penser que Dimitri est fou et qu'est-ce qu'il trouve ça vivifiant.

Flaversham, un nom qu'il ne connaît que trop bien. Il a honte Hippolyte, il se sait rougir à l'entente de ce nom associé au terme mignon. Il repense à l'aîné, débarquant à sa porte un soir pour lui demander un service totalement stupide. Il le revoit au matin, en caleçon à prendre le café dans sa cuisine, son crush d'adolescence, le mec le plus mignon de Poudlard complètement obsédé par l'envie de sortir avec sa meilleure amie. Basile est mignon, il n'y a pas de doutes là-dessus. Et encore, ce n'est pas le mot qu'il utiliserait. Canon, parfait, numéro un au classement mondial des beaux gosses musclés, tous ces termes semblent plus adapter. Ayrton est à classer dans une catégorie similaire, bien que les choses soient différentes. Il n'a jamais été attiré par son compagnon de salade, et l'unique baiser qu'ils ont partagé l'a conforté dans cette idée. Et pourtant aujourd'hui, ce n'est plus ce genre de personne qui l'attire, bien qu'il ne puisse contredire le directeur du département des sports magiques. En regardant Dimitri, il comprend pourquoi il s'est mis à préférer le charme plutôt que la simple beauté. Il y a ce petit quelque chose en plus, qui attire, qui captive, qui kidnappe. Ce point qui le force à sourire bêtement depuis qu'ils sont ici, installés à cette table alors qu'il préférerait s'enfuir.

— Des amours, j'aurais pas utilisé ce mot-là, mais j'avoue qu'ils sont plutôt mignons. La pinte presque vide qui a trouvé place dans son estomac le dépend sûrement. Dans un instant de folie, il se voit même rajouter « Surtout Basile. » comme conclusion, mais il n'est pas sûr que ce soit une bonne idée de parler de son ancienne histoire d'amour à sens unique à un rendez-vous. En fait, il en est même persuadé. Le serveur rapporte un second verre, et Hippolyte finit par se rendre compte que c'est une très mauvaise idée d'être là. Ne pas boire en compagnie d'une personne comme Dimitri, voilà la règle d'or que sa conscience lui répète depuis quelques minutes. Qu'elle aille au diable. Et soudainement, il se sent mal à l'aise. Peut-être parce que Dimitri est plus proche, ou parce que celui-ci lui demande de parler de lui. Mauvaise idée, ne fais pas ça. Il ne faut pas qu'il se rende compte que ta vie est d'une monotonie macabre. Et pourtant, il ne pas dire – il a toujours été incapable de le faire face à Dimitri. De moi ? Je suis pas sûr que c'est une bonne idée tu sais. Ma vie doit te paraître tellement ennuyante. Je bosse, je passe du temps avec Automne. Souvent on regarde des films super intéressant, ou on s'occupe chacun de notre côté après le repas. Puis l'autre rentre chez lui et la journée est finie. De nouvelles rougeurs apparaissent sur ses joues blanches quand il se rend compte qu'il vient d'avouer avoir la routine de vie la plus millimétrée au monde. Et encore, il n'a parlé ni du ménage, ni de Mordred. No fun.

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Il est vraiment adorable quand il panique, j'en veux un comme ça. Trop heureux de voir la confusion dans le regard de l'anglais, Dimitri ne pouvait s'empêcher de sourire, d'un sourire parfaitement bienveillant. Les problèmes avec la justice avaient fait leur effet et pourtant contre toute attente, le blond se tenait toujours dans son siège. Le Russe aurait pensé qu'il prendrait rapidement ses jambes à son cou en voyant qu'il n'avait absolument pas changé, en fait, il ne voyait absolument pas pourquoi un homme aussi sage qu'Hippolyte voudrait recommencer l'aventure avec lui. Non pas qu'il doutait de ses charmes, mais plutôt qu'il doutait de l'esprit aventureux du journaliste. Cela dit, Dimitri n'était définitivement pas le genre de personne à se poser trop de questions et il finira vite par donner un sens à tout ça, si jamais il y en avait un.

Un sourire en coin et un sourcil plus haut que l'autre, un air parfaitement malicieux se dessinait sur le visage du ministre tandis que l'autre rebondissait sur le sujet Flaversham. Quelques années auparavant, quand il avait rencontré le journaliste, il ne l'imaginait absolument pas dire ce genre de phrase, encore trop gêné par son attirance et même si ça semblait encore compliqué, Dimitri devait au moins relever le détail en accordant un clin d'oeil au plus jeune qui semblait dire : “On se comprend.” Le Russe n'avait certes pas pris beaucoup de risques en choisissant ses deux garçons, mais l'idée de trouver des points communs avec quelqu'un qui semblait justement en tous points différents l'amusait. La dernière fois, on ne pouvait pas vraiment dire qu'ils avaient tenté de construire quelque chose, mais cette fois, Dimitri voulait faire les choses correctement, au moins pour pouvoir le raconter à Béatrice.

Il s'était rapproché de l'anglais, brisant cette distance de sécurité et le regardait attentivement, écoutant ses paroles. Les journées de l'anglais n'avaient strictement rien à voir avec les siennes et étrangement il ne les trouvait pas si ennuyeuse que pouvait le penser le journaliste. « Ennuyante ? Pourquoi ? Si c'est ce que tu aimes, alors ça ne l'est pas. » Le sourire aux lèvres il finit par se reculer et se replacer dans son siège, toujours accompagné de son verre. « Tu sais quoi ? Ça fait vraiment longtemps que je n'ai pas regardé un bon film. Vladimir n'a jamais le temps et Lichuan est plutôt occupé avec les Flaversham… Bien sûr, je pourrais aller chez Nikolaï, mais disons que voir sa tête de pingouin m'agace. » Une information subtilement jetée dans la conversation, juste pour voir la réaction de l'anglais, se fichant bien des répercussions, comme toujours. « Ton amie semble quelqu'un de très bien et tu as de la chance de pouvoir partager ce genre de choses. » Sa langue passa sur ses lèvres avant de reprendre. « La dernière fois, j'ai regardé To Be Or Not To Be de Lubitsch, un film sublime, la qualité allemande comme on dit. Je ne sais pas si tu l'as vu, mais si ce n'est pas le cas, tu dois absolument le voir. » Le côté normal de Dimitri était quelque chose de parfaitement inconnu pour la majorité des gens. Dimitri Bolgarov semblait terriblement humain et presque seul.

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Trop proche. Il n'est pas très à l'aise l'anglais maintenant que cette distance de sécurité qui lui permettait de respirer correctement a disparu. Ses joues le brûlent, il en a honte. Le clin d'œil était déjà de trop, là il se sent carrément ridicule. Il n'ose même pas imaginer la tête que sa meilleure amie ferait si elle le voyait. Elle se moquerait sans doute, oubliant que cette situation n'a rien de simple pour lui. Il n'est pas spécialement habitué à sortir avec quelqu'un Hippolyte, il est un fier représentant du clan des célibataires endurcies. Et ce n'est pas n'importe qui, c'est Dimitri Pavel Bolgarov, le russe le plus mignon de tout Londres, l'une des personnes qui est capable de le mettre mal à l'aise en un temps extrêmement minime. C'est ce moment qu'il choisit pour se rappeler que le directeur l'a déjà vu nu – ce qui ne pouvait légèrement pas plus mal tomber. C'est vrai, un second rendez-vous des années plus tard, c'est génial. Mais il s'y est plus ou moins préparé – il a regardé Mordred avec un air déprimé, lui parlant du russe, lui montrant même l'exemplaire de Sorcière Hebdo où le russe s'est vu décerner le prix du plus sourire de l'année.

— Oui je- Tu as raison, mais je voulais dire, elle l'est pour les autres. Je n'ai rien d'intéressant à dire comparé à toi. Je suis pas sûr que tu aies envie d'entendre parler de ma dispute quotidienne avec ma machine à café. Il se rend compte de ce qu'il vient de dire. Ses yeux se ferment pendant une seconde alors que sa main vient frapper son front. Il est ridicule, totalement ridicule. Non. J'ai pas vraiment dit ça ? Son regard inquiet fixe Dimitri dans l'attente d'une réaction. Une demi-heure, et il passe pour le névrosé de service. Si seulement la vérité était autre, il pourrait réellement se défendre, mais à quoi bon mentir.

Comme s'il ne voulait pas suffisamment, il a fallu que le russe choisisse exactement ce moment pour paraître dix fois plus intéressant qu'il ne l'est déjà en parlant de cinéma. Il se foutrait des baffes Hippolyte, si ça n’aggraverait pas totalement la situation. Alors il se contente d'écouter calmement Dimitri parlait de l'absence de films dans sa vie. Il tique en entendant le prénom de l'asiatique – bien sûr, il sait qu'il s'agit du meilleur ami du russe – mais le savoir mis en rapport avec les frères Flaversham l'étonne. Son visage se tend pendant un instant, étonné, cherchant à comprendre. Ayrton ou Basile ne peuvent pas être impliqué dans quelque chose qui concerne l'ancien mangemort – sauf si cela a un lien avec une arrestation. Il décide finalement de se sortir ça de la tête, il posera la question demain à son ami. Il a de donc toute façon confiance en les capacités d'auror de son ami, ainsi que du grand frère de celui-ci.

— Oh mais c'est triste. Si tu veux- Il réalise ce qu'il est sur le point de dire et l'idée d'inviter officiellement le russe dans son appartement le bloque. Il a peur, envisageant toutes les possibilités possibles. Et s'il le prenait mal, comme une invitation une peu lourde. Dans tous les cas, il ne peut pas se permettre de rien dire après avoir commencé sa phrase, alors quitte à tout rater, autant le faire sans avoir de regret. Tu pourras passer chez moi à l'occasion pour qu'on regarde des films? Ça pourrait être sympa, non ? Il cherche définitivement l'approbation du plus vieux, comme pour confirmer qu'il n'a pas fait d'erreur. Si Automne serait là, elle se moquerait de lui. D'accord, je retiens. J'en parlerais à Automne, elle est plus calée que moi sur les films allemands je pense. Mais promis, je le regarderais. Il tente d'esquisser un petit sourire gêné, comme pour laisser croire qu'il est à l'aise.

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Le journaliste n'était peut-être pas l'homme le plus marrant du continent, mais c'était suffisant pour dessiner un sourire sincère sur le visage du russe. Dans son monde à lui, les embrouilles avec des machines à café étaient très rares et il trouvait presque un côté excitant à cette vie monotone qui lui paraissait si abstraite. Hippolyte semblait gêné, jugeant que tout cela ne pouvait pas intéresser quelqu'un comme Dimitri. Pourtant, ce dernier montrait ces derniers temps un certain intérêt pour les choses banales, peut-être d'ailleurs la raison qui l'avait poussé à revoir ce fameux journaliste. « Tout est intéressant, surtout quand on y croit. » Le genre de phrase que seul lui comprenait et qui lui rappelait ses quelques mois en faculté de philosophie. Un passage bref, mais intense.

La deuxième tournée arriva et le russe s'empressa de finir son premier verre. Avant de finir bourré, il avait de la marge, mais son petit doigt lui disait qu'il n'en était pas de même pour le blond et une part de lui désirait le voir se dévergonder un peu plus. Dimitri était certes amusé et flatté de faire autant d'effet au journaliste, mais il était en même navré que le journaliste le regarde comme un être surnaturel. Un léger soupir, avant de s'enfoncer dans son siège et de boire une autre gorgée à la paille de ce cocktail trop coloré. Parfois, même s'il ne l'avouera jamais, Dimitri rêvait d'une vie normale et de se prélasser dans le confort de la routine, ignorant parfaitement à quel point cette dernière pouvait être monotone.

L'invitation d'Hippolyte l'étonnait et lui faisait réellement éprouver une certaine sympathie pour ce journaliste. « Avec plaisir. » Le ton de sa phrase était bien trop sensuel et il ne put s'empêcher d'appuyer ses mots avec un ravissant sourire. La célébrité dont profitait le ministre apportait certes beaucoup de choses, mais rarement de ce genre d'invitations et l'idée de pouvoir changer un peu d'air l'excitait grandement. Cependant, il ne comprenait pas vraiment pourquoi quelqu'un comme Hippolyte Nemours souhaitait réellement le revoir revenir dans sa vie, au point de l'inviter de manière officielle chez lui. Ses yeux étaient plongés dans ceux de l'anglais comme si la réponse s'y trouvait.

Le russe rapprocha sa chaise et se penchant vers l'anglais, encore plus proche que quelques minutes auparavant, aspira une gorgée de cocktail et se mordilla la lèvre inférieure. « Hippolyte ? Ce n'était pas tous les jours que Dimitri nommait quelqu'un par son prénom et cela rendait la scène encore plus surprenante. Ne le prend pas mal et n'imagine pas que tu me déranges, mais pourquoi tenais-tu autant à me revoir ? En général, les gens comme toi restent le plus loin possible des gens comme moi.  » La question avait le mérite d'être claire et les quelques centimètres qui se trouvaient entre eux empêchaient toute fuite.

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Il ne sait plus réellement quoi faire, comment répondre aux phrases un peu trop philosophiques du russe. Il y comprend difficilement quelque chose – lui et la philo, ce n'est pas une grande histoire d'amour, peut-être quelques livres lus par besoin de se cultiver mais rien de plus – alors il se contente de faire un petit sourire gêné. Il est plus qu'étonné, il se serait attendu à ce que Dimitri soit plus Dimitri justement. Le directeur du département des sports magiques lui donne presque l'image de vouloir le mettre à l'aise – ce qui l'étonne presque et lui donne enfin l'impression que son choix de recontacter le russe n'était pas stupide. Rassuré, il se détend un peu, quelques secondes mais pas plus. Il attrape son verre pour le finir – le second arrivant. Il manque de s'étouffer avec sa fin de bière. Le ton sensuel, le sourire du plus âgé, ses yeux qui ne le scrutent. Il se sent rougir comme une gamine. Si seulement Dimitri n'avait pas mis une chemise à carreaux, peut-être serait-il légèrement moins attirant – il en doute. C'est honteux, le russe ne devrait pas être autorisé à faire ça, le mettre à l'aise pour lui faire frôler la crise cardiaque quelques dizaines de secondes plus tard. Créature du diable.

Son regard qui avait dérivé sur ses mains – une fois de plus – revient fixé l'homme en face de lui. Pourquoi ?, lui crie son cerveau. Pourquoi il se mordille la lèvre inférieure comme ça ? C'est une caméra cachée ? Il est de mèche avec sa meilleure amie pour réussir à obtenir de lui la vidéo la plus gênante de sa vie ? – et ça bien que rien ne soit comparable à ce jour où il s'est retrouvé face à Peeter au Chaudron Baveur, avouant lui avoir caché son homosexualité pendant des années. Explosion de joie. Il ne le dérange pas. Il ne le dérange pas. S'il ne se retenait pas, il sourirait comme un idiot fini, trop heureux grâce à la nouvelle inespérée. Le reste de la phrase lui fait l'effet d'un ascenseur émotionnel. Il sait que Dimitri a raison, que ses raisons qui l'ont poussé à vouloir ressortir avec le russe ne sont pas très correctes. Il s'ennuyait, il avait envie d'un peu d'action dans sa vie. À vingt-six ans, il ressent le besoin de voir quelqu'un d'autre que ses meilleurs amis, une personne avec qui il pourrait peut-être être capable de faire autre chose que manger français et regarder des films sous-titrés – et ça bien que les deux activités précédemment soient ce qu'il préfère faire dans la vie. Et il sait aussi que les raisons qui l'ont poussé à recontacter Dimitri ne sont pas les bonnes, qu'il l'a fait parce que ça lui semblait plus simple que de s'affirmer devant une nouvelle personne. Vous avez déjà couché ensemble, s'est-il dit, ça sera plus simple. Mais ça, il ne peut pas l'expliquer au russe. Ce serait méchant. Il aimerait fuir – ce serait plus simple. Si seulement le directeur n'était pas si près, il l'aurait peut-être même déjà fait.

— Je sais pas trop. Il sait qu'il ne s'en sortira pas avec cette réponse, qu'il n'y a aucune chance pour que ça marche. Le russe est trop  intelligent pour ça, beaucoup trop. Je me suis dis que ça pourrait être sympa de revoir quelqu'un. Il devait s'en douter, de ça. Mais la réponse la plus difficile refuse de sortir. Pourquoi lui ? Il n'est pas prêt à avouer qu'il a besoin d'un peu de houle dans son quotidien sans vague. Il n'est pas sûr d'être capable de faire ça. Pas aujourd'hui, et pas devant Dimitri. Et c'était cool à l'époque, alors je vois pas pourquoi je devrais me tenir plus éloigné de toi que de n'importe qui d'autre. Il tente de sourire, histoire de ne pas afficher tant que ça sa mauvaise foi. Il baisse les yeux, décide d'avaler un peu de sa bière avant de poser la question qui lui brûle les lèvres. Et toi ? Pourquoi tu as accepté de me revoir ? Je veux dire, ta logique s'applique aussi bien à toi, non ? Il s'étonne de l'assurance – bien que minime – dont il arrive à faire preuve. Il se dit que c'est l'alcool – c'est toujours l'alcool – et préfère arrêter d'y penser.

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Parfaitement impassible, le russe ne quittait plus des yeux le blond, soutenant son regard et abordant un sourire sympathique. Il se doutait bien de l'état de panique dans lequel sa question avait mis le plus jeune et d'un certain côté ça l'amusait. Non pas qu'il adorait mettre mal à l'aise les gens, il aimait simplement voir l'effet dont il était encore capable. C'était la première fois de sa vie qu'un ou une ancienne conquête revenait et la nouveauté avait toujours le don de lui donner envie. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il trouvait Hippolyte plutôt attirant. Les raisons qui poussaient Dimitri à trouver une personne charmante ou pas était toujours parfaitement abstraites et propres à lui-même. Dès lors, voir rougir l'anglais à chacun de ses mots, lui donnait envie de sourire comme un enfant tandis qu'il écoutait l'anglais se justifier.

Le russe n'était pas stupide et savait bien que le blond était en train de lui mentir ou du moins pas vraiment en train de lui dire la vérité. Il n'y avait pas besoin d'être un génie pour comprendre les raisons qui pourraient pousser le journaliste à vouloir revoir le russe, mais ce dernier ne lui en voulait pas vraiment de ne pas répondre honnêtement à sa question. Pour dire vrai, il ne l'aurait sûrement pas fait lui-même. « Ça me rassure, je pensais que j'étais juste-là pour te divertir un peu. » Un sourire en coin, montrant qu'il n'était pas encore dupe. Pourtant, il ne se vexa pas, se confortant dans l'idée que même si les raisons étaient mauvaises, le résultat était le même. Hippolyte Nemours avait voulu le revoir, comme un enfant rêvant de retourner à Disney-land pour les vacances.

Certaines personnes dans le Deus les observaient d'un air interrogateur. Se demandant ce que deux hommes comme eux pouvaient faire ensemble. Bien loin de se douter qu'ils avaient déjà était bien plus proches l'un de l'autre. Certains secrets étaient fais pour rester secret et leur ancienne liaison en faisait parfaitement partie, enfin du moins pour le grand public. Lorsque qu'on se nomme Dimitri Pavel Bolgarov, il faut savoir gérer son image et pour ce faire il fallait être très prudent et surtout bien calculer les choses. Ce dont le journaliste devait se douter et pourtant, il avait accepter de venir au Deus, prenant le risque d'être vu en sa compagnie dans un lieu qui n'avait rien de conventionnel. Puis finalement, le plus âgé se contenta d'admettre que le petit anglais timide qu'il avait connu avait peut-être fini par assumer pleinement sa sexualité.

Le retournement de situation qu'effectua l'anglais amusa très fortement le russe qui lâcha un petit rire. Au fond, il aimait bien quand les gens rentraient dans son petit jeu et encore plus quand il le mettait dans une situation légèrement délicate. Il passa sa main sur sa bouche, réfléchissant à la meilleure réponse qu'il pourrait donner. Puis, après quelques secondes de silence, il s'approcha un peu plus, posant ses bras sur la table et plongeant son regard dans celui du blond. « Tu as parfaitement raison, cette question s'applique parfaitement à moi, mais je n'ai pas vraiment de réponse. Peut-être que je voulais te revoir. Peut-être que je m'ennuyais. Peut-être que je voulais juste boire un verre. Va savoir... » Un sourire avant d'apporter sa paille à sa bouche et d'aspirer quelques gorgées de son cocktail rose fluo, tandis qu'il scrutait une fois de plus la réaction de son rendez-vous.

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Dimitri n'est pas stupide, c'est une chose que le journaliste a remarquée depuis longtemps – à cette époque où leur relation s'était arrêté à quelques soirées dans le même lit sans jamais chercher à aller plus loin. Malgré ses airs de russe un peu dérangé – et le fait qu'il se baladerait en trottinette dans les couloirs du ministère, chose qu'Hippolyte refuse évidemment de croire – il fait preuve d'une grande intelligence, d'une culture impressionnante et surtout d'une perspicacité limite dérangeante à ce moment précis. Il le sait Hippolyte, que son rendez-vous ne croit pas un seul instant à sa version des faits. Celle-ci, loin d'être fausse reste incomplète. Alors bien sûr, il trouve ça vulgaire l'expression qu'utilise Dimitri. Divertir paraît péjoratif, méchant. Ça laisserait sous-entendre qu'il n'est là que lui faire passer son temps. Mais la nuance avec ce qui a poussé l'anglais à venir ici est bien trop fine. Il baisse la tête, gêné en voyant son sourire.

— Mais non, bien sûr que tu n'es pas un divertissement. Tu es Dimitri Bolgarov, a-t-il envie d'ajouter, c'est nous qui te divertissons, pas l'inverse. Lui non plus n'est pas totalement bête. Il sait que les raisons qui ont poussé le russe à accepter sont sûrement tout autant mauvaises que les siennes. Ils vivent dans des univers différents, des mondes parallèles qui ne devraient jamais se croiser. Mais ils sont là, ensembles, à boire un verre dans un lieu à l'atmosphère étouffante. Il écoute attentivement la réponse de Dimitri, qui a l'art de le dérouter encore plus qu'il ne l'était. C'est pas une réponse ça, répond-il un air étonné sur le visage. C'est pas du jeu, si j'avais su j'aurais pas répondu. Il parle bas, plus pour soi, faisant preuve d'une mauvaise foi assez rare. Bien sûr qu'il aurait répondu, il répond toujours. Et puis, une question posée par Dimitri Bolgarov, ça ne s'ignore pas.

Il regarde le russe en avalant une gorgée de son verre. Que cette situation est délicate, il ne se sent pas à l'aise. Il aimerait bien avoir des gens qu'il connaît pas loin pour le sortir de ce calvaire. Mais le lieu ne lui permettra sûrement pas une fuite camouflée, ce n'est pas Automne qu'il risque de croiser au bar ou sur la piste de danse. Il regarde le directeur qui lui paraît de plus en plus mignon au fur et à mesure que son second verre descend. Il en aura des choses à raconter le lendemain à Automne – beaucoup de choses. En réalité, il ne sait pas quoi dire, pas quoi faire. Habituellement, il ne se retrouve jamais dans ce genre de lieu et ignore donc tout de ce qu'y font les personnes de son âge. Il jette un coup d'œil gêné vers la piste de danse. Elle lui fait peur, elle la dégoûte. Comme tout bon anglais un peu dandy, Hippolyte ne sait pas danser. Sa meilleure amie peut confirmer – des souvenirs de soirs où il a abusé sur l'alcool uniquement – mais elle fait partie des seuls pour la simple raison qu'il ne danse jamais.

— En fait, je sais pas trop ce qu'on fait dans ce genre d'endroit. Non il ne sait pas, il pense juste que la musique n'est pas la chose la plus propice à avoir des conversations posées et donc que ce n'est pas le primordial de ces soirées. Tu veux danser peut-être ?, ajoute-t-il avec un air mi-apeuré, mi-enthousiaste – il fait des efforts quand même, que Dimitri ne finisse pas par penser qu'il est le rencard le plus barbant qu'il ait eu de sa vie.

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Le russe passait contre toutes attentes une excellente soirée en compagnie de l'anglais et ne s'en cachait aucunement en affichant un sourire radieux. Il ne manquait définitivement pas de prétendants, mais bien plus rares étaient ceux qui revenaient, surtout dans le genre de l'anglais. D'une certaine manière, il se sentait extrêmement flatté de voir que le journaliste retentait sa chance et il se trouvait que c'était pile au bon moment pour le Russe qui commençait définitivement à se lasser de toutes ces relations éphémères qui s'épuisent au bout de quelques nuits. La stabilité rimait comme une terre inconnue et Dimitri était d'humeur aventurière et il comptait bien ne pas le faire fuir. « Oh, mais boude pas. » Il souriait comme un gosse en voyant l'air boudeur du journaliste face à sa réponse.

Dimitri se recula dans son fauteuil et aspira le liquide à l'aide de sa paille fluorescente, comme un roi sur son trône, il semblait parfaitement à l'aise. Ce lieu, il le connaissait par coeur et pouvait aisément citer les différents cocktails qui composaient la carte. Un peu comme une deuxième maison. Pourtant, en compagnie d'Hippolyte, le Deus semblait bien peu intéressant et superficiel. L'anglais se justifia de ne pas savoir comment se comporter dans un tel lieu et cela amusa beaucoup Dimitri, qui trouvait même un certain charme à cet aveux. Objectivement, le blond n'avait pas vraiment besoin de le dire, cela se voyait parfaitement et encore plus pour quelqu'un d'aussi perspicace que le russe. « Non, vraiment ? Je n'aurai jamais deviné si tu me l'avais pas dit. » Il s'approcha du blond. « J'ai entendu dire que les gens aimaient danser et consommer dans ce genre d'endroits. » Un clin d'oeil avant de finir son verre.

L'invitation qui suivie le fit tout bonnement explosé de rire. Un rire sincère qui n'était absolument pas là pour se danser. « Tu veux danser ? » Se leva et pris place juste à coté de l'anglais. « Tu es trop mignon et j'ai presque envie de dire oui pour te voir danser. » Il termina son verre juste en une seule gorgée à côté du journaliste. « Je suis sûr que tu as le rythme dans la peau. » Délicatement et avec un air franchement hilare, il déposa sa main sur la cuisse de l'anglais. « Sauf si tu tiens vraiment à enflammer la piste, on peut éventuellement aller chez moi. » Un sourire en coin, tandis qu'il se tenait à quelques centimètres du visage du russe. « Sauf si tu veux fuir. » Si la tentation et le vice avaient un visage, cela serait très certainement le visage de Dimitri.

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Love's like a bomb, blowing my mind

Tu es ridicule Hippolyte, se répète-t-il en contemplant la brèche immense qui semble existé entre le russe et lui, tu n'as rien à faire en compagnie de cet homme, tu devrais te trouver quelqu'un comme toi, quelqu'un capable de stresser pour un rien et qui serait tout autant mal à l'aise face une personne possédant autant de charisme que Dimitri Bolgarov. Mais il ne fuit pas le courageux Gryffondor, il fait face jusqu'au bout. Il aimerait pourtant, ne plus jamais ressentir ce genre de gêne, avoir l'impression d'être un étranger face à un monde qu'il ne connaît pas. Il baisse les yeux face au clin d'œil de Dimitri, les joues roses. Automne ne doit jamais connaître le déroulement de cette soirée, se dit-il, il en entendrait parler pendant des années, du russe sexy et de sa chemise à carreaux.

Le rire de Dimitri n'est pas la chose la plus rassurante au monde. Il relève les yeux vers son rendez-vous pour chercher une réponse – il se moque de toi, lui crie sa conscience, pars. Mais il ne sait plus quoi penser. Mignon. Le brun le trouve mignon. Il serait capable de mourir face à aveu, il se le répète en boucle, il se demande si tout ça est réel, s'il est en train de rêver ou s'il se moque de lui. La dernière solution lui paraît la plus réaliste, il la craint. Que tout le monde le traite de fou, l'idée d'envisager une vraie relation avec le russe lui plaît – même si celle-ci est vouée à l'échec au bout de quelques mois. Il n'en peut vraiment plus d'être seul – Automne a beau être la compagnie parfaite, c'est différent. Le russe a des qualités après tout, la première étant pour l'anglais sa capacité à  briser le quotidien. Il l'a réussi en une soirée après tout, l'amenant dans un lieu qu'il fuit habituellement, un endroit où il n'a dû mettre les pieds qu'une ou deux fois dans sa vie à la nuit tombée.

— Non, j'ai pas spécialement envie de danser, sauf si ça te fait plaisir, dit-il en terminant son verre pour se donner un peu de courage. Il manque de s'étouffer – peut-être à cause de la main de Dimitri sur sa cuise, ou encore à cause de l'invitation totalement explicite prononcée par le brun. Il le regarde gêné, contemplant son sourire en coin qui ferait craquer le plus convaincu des hétéros. Il se recule un peu, histoire de mettre de l'espace entre lui et ce démon ayant pris forme humaine. Le russe se rapproche à ce moment précis plus d'un appel au vice qu'autre chose. Je- Oui, d'accord. Il évite son regard. Avec plaisir, murmure-t-il finalement, persuadé que le russe peut l'entendre. Il parvient à esquisser un petit sourire incertain avant de suivre le russe hors du Deus. En réalité, il est heureux de quitter cet endroit étouffant, encore plus pour ne pas rentrer directement chez lui. Malgré sa gêne évidente, il apprécie de pouvoir passer un moment le russe, et ça même si beaucoup pourraient en douter.

electric bird.