Marcher le long des rues passantes avait quelque chose d’amusant pour qui savait y trouver son compte. C’était l’occasion unique d’être spectateur du monde évolutif qui nous entourait. Chaque nouveau mètre franchi par Daphné lui apportait son lot d’informations plus ou moins utiles. Cette femme aux commandes d’une poussette qui la dévisageait avec scandale – sûrement parce qu’elle – l’intéressait par exemple beaucoup moins que la silhouette qu’elle venait de remarquer, fine et élancée, s’extirper d’une voiture aux proportions américaines pour foncer droit vers le fast-food qui faisait l’angle de la rue opposée.

Ses yeux se plissèrent comme ceux d’un chat qui venait de capturer la piste d’une proie rarissime. En deux temps trois mouvements, la jeune fille traversa la rue sans même jeter un coup d’œil de part et d’autre de l’avenue. Ces idiots de moldus ralentissaient de toute manière toujours avec leurs engins du diable pour éviter la mort des autres – grand bien leur fasse, songeait ironiquement la sang-pure. S’ils avaient su à qui ils laissaient la vie sauve, ils l’auraient sans doute tous profondément regretté. La jeune femme s’arrêta une fois le trottoir d’en face atteint, faisant mine de contempler la vitrine d’une petite boutique d’antiquités poussiéreuse alors que ses iris attentives fixaient dans le coin droit de son angle de vision l’asiatique dont elle voyait le dernier pan de manteau disparaître dans l’ouverture du restaurant.

Lichuan Whitelaw était bel et bien devenu un adepte de la nourriture grasse d’outre-Atlantique. Pire encore, il semblait être resté cet insolent fou furieux qui, maintenant qu’il avait retrouvé une innocence digne d’un agneau fraîchement né, profitait avec une provocation rare de sa liberté pour aller satisfaire sa soif de malbouffe. Et dire que cet homme dont les similitudes comportementales avec un enfant de sept ans étaient saisissantes avaient été Mangemort. L’anglaise tourna finalement le dos à l’enseigne pour scruter maintenant l’arrière de l’Impala, royale et exubérante dans son habit de métal.

Là où allait Aloysius, suivait son fidèle Basile. Une certaine amertume malsaine envahit sa bouche, comme un goût ferreux proche de celui du sang – la même saveur que celle de la rancune. La jeune femme avait des comptes à régler avec l’écossais et ils n’étaient pas plus ridicules que pécuniaires. Une petite visite de courtoisie s’imposait et puisque le hasard le plaçait sur son chemin … Daphné se mit donc en tête de parcourir la distance qui la séparait de la voiture d’où elle distinguait la place du chauffeur occupée – celui-ci lui tournait le dos. Elle contourna le coffre, se retenant d’y donner un coup de talon ou de rayer l’ensemble du pare-choc avec ses ongles. La rousse se contenta de se planter devant la portière, replia ses cinq doigts en un poing parfaitement compact et serré et frappa trois coups secs contre la vitre, son visage scrutant Basile d’un air propre à ceux des serial-killers qui vous prenaient par surprise derrière le rideau de douche . Elle attendit que le carreau s’abaisse de lui-même – fichue technologie de sang-de-bourbe – pour ouvrir la bouche et saluer son vieil ami comme il se devait. « Ca faisait longtemps, Flaversham. » Dire qu’elle avait rêvé de ce jour où elle lui retombait dessus et lui ferait la peau. Littéralement. L’année dernière avait été riche en péripéties et toutes les siennes étaient majoritairement dues à cet imbécile d’écossais. Elle n’en avait pas oublié une miette.

La cassette de Ledzepplin tournait comme bien souvent dans la chevrolet impala, tandis qu’elle se stationna sur un trottoir juste en face d’une grande chaîne de fast-food. L’écossais avait toujours eu un faible pour la malbouffe et depuis quelques temps, il partageait cette ancienne passion avec Lichuan. Pas mal d’eau avait coulé sous les ponts depuis, et même s’il ne le considérait toujours pas comme un ami, il devait avouer ne plus haïr sa compagnie. La SEEPOM était tombée et comme promis, il avait participé au retour de l’asiatique au ministère, l’acquittant de toutes ses accusations. Il ne restait qu’un point du marché à honorer, retrouver Sherkan Rougemont, ce qui était depuis au point zéro. Le français était comme mort et malgré tous les efforts, aucune traces de lui sur le sol anglais. Pour l’auror, il était très certainement caché en France, mais comme tous coupables, il finira par revenir sur le lieu du crime et quand ça sera le cas, ils seront là. Pour leur moment, leurs recherches consistaient à pas grand chose et leur permettaient de faire une pause pour se nourrir. Lichuan tenait sur ses genoux une bonne dizaine de magazines stupides, dont le sorcière hebdo, qu’il promenait fièrement partout étant donné qu’il était en couverture. Basile avait entendu parlé une bonne centaine de fois parler de cette interview et tout le monde lui avait dis de la lire. « Ouais, je vais lire ça, parce que tout le monde m’en parle. » Il se souvenait parfaitement du sourire de Victory alors qu’elle le lisait dans le canapé de son appartement et étrangement, il avait un peu peur de ce qui pouvait bien si trouver.

Basile serra le frein à main et commanda à l’asiatique sa commande. Hors de question de laisser son bébé sur un parking dans ce quartier. « Un double cheese, un royal deluxe et frites coca pour moi. » Le même menu, à chaque fois, histoire de ne pas être déçu en croquant dedans. Une fois l’autre parti de la voiture, il attrapa le sorcière hebdo et survola un peu l’interview, grimaçant d’ailleurs en lisant quelques connerie qu’il avait pu dire. Finalement, il comprenait mieux pourquoi tout le monde parlait de tension sexuelle entre eux et il imaginait déjà sa psychologue dire qu’elle shippait ce duo improbable. Alors qu’il était littéralement en train d’halluciner sur le nombre de conneries que Lichuan avait pu sortir à la minute, un bruit le stoppa. Une personne se tenait à son carreaux et quand il posa les yeux sur cette fameuse présence, il ne cacha pas sa surprise. Daphné Greengrass, pour une surprise s’en était une. Il ne l’avait pas revu depuis tous les évenements qui avait bien failli lui coûter la liberté et il se doutait qu’elle était énervée -d’ailleurs, son visage le traduisait très bien. Après quelques secondes, il baissa enfin la fenêtre de la voiture, avant de lui faire un sourire innocent. « Hey ! Heureux de te croiser aussi. » La rue était blindé, il ne pourrait rien se passer, mais au cas où, il avait tout de même sa baguette pas très loin. Dans l’exercice de ses fonctions, il pourrait parfaitement la coincer, étant donné qu’il se doutait qu’elle était mangemorte jusqu’aux os. « Alors, on s’est encore échappé du jardin d’enfants ? » La seule raison pour laquelle elle n’était pas en prison, c’était son jeune âge et le fait que Basile soit quelqu’un de plutôt sympathique, cela dit, ça ne sera pas éternel et il ferait mieux qu’elle retourne dans le droit chemin.

Au moins, l’effet de surprise était réussi . Basile ne devait sans doute pas penser qu’une Mangemorte passée à ça de l’emprisonnement ose se promener librement dans les rues de la ville comme elle l’entendait. Erreur. Daphné n’avait jamais été plus prudente que trouillarde – vivre dans la maison de Rougemont pendant son absence, jouer au chat et à la souris avec les autorités du Ministère, partir en mission pour le compte des Mangemorts à Poudlard en étaient tout autant de preuves. « Pas moi. » signa t-elle quant à ce bonheur non partagé. Flaversham ne pouvait se satisfaire que d’une chose : la possibilité qu’elle puisse à nouveau être libre signifiait pour lui une nouvelle chance d’essayer de la sauver de ses propres démons.

Car elle n’en doutait pas une seule seconde ; il devait encore croire que quelque chose de bon vivait en elle. Ce qui n’était pas tout à fait faux, mais de là à croire qu’elle quitte un jour sa famille, sa véritable famille, il y avait plusieurs fossés infranchissables. « Visiblement tu n’as rien perdu de ton humour incroyable. » La rouquine ne partageait toujours pas son goût pour les blagues mièvres. « Désolée, j’avais d’autres choses de prévu plutôt que de croupir au Ministère ou à Azkaban. » Au moins Daphné avait l’honnêteté d’avouer ses ambitions : elle n’en avait pas fini avec ses objectifs personnels. Basile n’en était qu’un parmi une masse d’autres.

Cette tendance à la confiance en lui finirait par le perdre s’il continuait sur cette pente, songea d’ailleurs l’ex-Serpentarde en l’entendant parler. D’ailleurs, un coup d’œil au Sorcière-Hebdo qui traînait sur la plage avant de la voiture lui rappela qu’en prime, l’exposition médiatique que Flaversham se payait gracieusement depuis quelques temps avait commencé à attirer quelques autres Mangemorts. Mais si l’un d’entre eux devait un jour se charger d’éliminer l’écossais, ce serait elle ; et personne d’autre. « Donc c’est officiel, Whitelaw et toi ? Vous vous êtes mis ensemble depuis combien de temps au juste ; avant ou après que tu as su qu’il était Mangemort ? » Elle ne souriait même pas. Elle n’en avait pas besoin pour faire sentir à Basile tout le mépris et l’ironie qu’elle pouvait éprouver devant un tel paradoxe. Le preux défenseur des malheureux traîtres à leur sang, allié avec la pire espèce en matière de mensonges et de retournages de veste. Daphné avait encore beaucoup de difficulté à encaisser cette amitié qui n’en avait que le nom. Un jour ou l’autre Lichuan redeviendrait celui qu’il avait toujours été : un homme lâche, incapable de se fixer à un point d’ancrage autrement qu’au gré de ses intérêts. Se fier à lui revenait à se fier à un bambin.

La rousse n’était pas heureuse de le voir et pour dire vrai, le contraire l’aurait plus qu’étonné. En effet, elle avait bien toutes les raisons du monde de lui en vouloir et s’il n’avait pas sa baguette à proximité, il aurait sûrement déjà démarrer la voiture. Même si elle était jeune, on ne savait pas jusqu’où elle pouvait aller par vengeance, après tout c’était une mangemorte. Néanmoins, comme Basile restait le même, il se contenta de faire de l’humour, comme toujours. « Oh arrête, je sais que je t’ai manqué. » Aucune chance que cela n’arrive, surtout que ce n’était pas non plus son cas. Pour dire vrai, il avait été tellement occupé de son côté, qu’il en avait presque oublié l'existence de la jeune fille -une erreur qu’il allait d’ailleurs rattraper. Le nombre de gamins chez les mangemorts avait fortement augmenté et il était temps de réagir avant que cela devienne trop problématique. Pour le moment, l’heure n’était pas au solution, mais plutôt aux retrouvailles que Basile abordait avec humour, ce qui ne plaisait pas du tout à l’ancienne serpentarde. « Exactement. » Un petit sourire, montrant qu’il comptait bien continuer sur la voix de l’humour, surtout si cela l’agaçait -peut-être Lichuan déteignait un peu sur lui.

Alors qu’il pesait son pesant d’or en humour, Basile se mangea une remarque assez agaçante dans la gueule. Il n’était pas vraiment quelqu’un de succeptible, mais n’aimait pas trop se faire remettre en place par une gamine. Il reposa son bras sur la portière avant de la regarder dans les yeux. « Très drôle, je pense que tu es mal placé pour critiquer, parce que la seule raison pour laquelle tu profites encore d’une vie confortable, c’est moi. » Si la rousse n’était pas derrière les barreaux, c’était avant tout parce qu’il s’était occupé personnellement de son dossier, en effet Nikolaï se serait sûrement montrer moins clément. Basile adorait son patron, mais ne l’imaginait absolument pas faire de charité, même pour les beaux yeux d’une adolescente en pleine crise existentielle. Parce que oui, pour l’écossais, elle n’était rien d’autre qu’une gamine qui se cherchait, flirtant avec le danger. Le problème, c’était qu’elle était peut-être déjà trop lancé dans cette voie et qu’un retour en arrière était désormais impossible. Après tout, elle vivait encore chez un des hommes les plus recherchés du moment. « D’ailleurs, si tu croises ton ami, tu sais Rougemont, dis lui qu’on arrive peu importe où il se cache. » L’équipe qu’il formait avec l’asiatique tenait toujours la route et leurs recherches aboutiront sûrement un jour.

L’arrogance qui permettait à Basile de s’auto-proclamer bienfaiteur de sa personne était incroyable. En plus de s’attribuer le mérite de son existence sur cette Terre, il n’avait même pas peur des mots. Confort, voilà un terme qui se rapprochait de tout sauf des conditions dans lesquelles elle avait passé les mois de sa cavale. Aussi, la vivacité de ces réminiscences douloureuses acheva de donner un ton bien plus aigre à Daphné, qui plissa les yeux, se rapprochant encore un peu de Basile. « Tu crois que je vais te remercier pour les derniers mois que tu viens de me faire vivre, Flaversham ? » Si c’était ce que le presque trentenaire espérait, il pouvait toujours attendre. L’évidente rancune qui émanait de la rouquine en était une preuve pluôt évocatrice. « Je vois des centaines de façon de te montrer ma reconnaissance. Mais crois-moi, je pense que tu préfèrerais toutes les éviter. » Un sourire de prédateur se dessina sur son visage : contrairement à ce que tenait à souhaiter Flaversham du plus profond de son être, les jeunes filles en fleur n’étaient pas toujours celles qu’elles paraissaient être. Ni des fragiles poupées, ni des âmes en perdition, mais tout simplement des Mangemortes impossibles à sauver.

Et Basile pouvait remercier tout ce beau monde moldu de les entourer. Si ça n’avait tenu qu’à la sang-pure, celle-ci aurait d’ores et déjà dégainé sa baguette avant même de saluer son aîné. Mais le secret magique prenait le pas sur ses irrépressibles envies de se défouler. Elle ne pouvait rien faire, malheureusement pour elle et fort heureusement pour lui.

Il en revenait à évoquer Sherkan, dont le pouvoir de menace était tel que même son patronyme suffisait à évoquer une épée de Damoclès immatérielle au dessus d’eux. « Rouge-qui ? » Incroyablement talentueuse quand il fallait jouer les demeurées de premier ordre, Daphné feignit de découvrir ce nom avec un étonnement tout particulier, avant de finalement faire mine de se souvenir. Comme si tout cela était si lointain pour elle. « Oh. L’ex de Whitelaw. Aucune idée d’où il se cache. » Après tout, ils parlaient tout de même du petit-ami de son nouveau camarade de patrouille, ce qui franchement relevait du comique de situation. Et puis prendre Flaversham pour un idiot était un des passe-temps favoris de la Mangemorte. Au-delà du jeu d’ingénue que cela lui demandait, c’était toujours le même régal qu’elle éprouvait face à son air agacé quand elle certifiait n’avoir « pas vu, pas pris ». Il n’était absolument pas dupe et pourtant il n’avait aucune preuve tangible pour la coffrer et l’accuser. Cette chasse à la Greengrass était décidément trop amusante pour qu’elle ne cherche pas à l’alimenter. « Tu devrais laisser les couples régler leurs histoires, suggéra t-elle avec la sagesse d’une psychologue bienveillante. Tu en as déjà bien assez avec les tiennes. » La presse à scandales n’épargnait personne, et encore moins le meilleur Auror du mois – voire de la décennie à en croire les gourgandines qui publiaient dans ce torchon. Sa petite amie, la Willard, paraissait être faite dans le même moule que ce crétin de Flaversham, les Gallions en plus. La rouquine était déjà persuadée de mettre Basile sur les dents en évoquant sa bien-aimée : il assimilerait forcément cette évocation à une menace envers celle qui partageait sa vie depuis quelques temps récents. Daphné s’amusait de voir qu’en dépit de ses airs de gros dur que rien n’atteignait, Basile commettait comme chaque membre du commun des mortels l’erreur inévitable de s’attacher à quelqu’un, se créant ainsi une faiblesse.

Cette fille était sûrement la personne la plus austère et déprimante qu’il connaissait sur terre, si bien qu’il se demandait sérieusement qui d’entre eux allait réellement aborder la trentaine. A son âge, il avait mieux à faire que de flirter avec les forces du mal et s’en sortait très bien sans. Bien sûr, il se doutait bien que pour une jeune de son âge se retrouve dans les rangs des mages noirs, les parents ne devaient pas être innocents. C’était d’ailleurs le plus gros fléau anglais du moment, l'endoctrinement des jeunes sorciers par leurs familles. C’était d’ailleurs la seule raison qui lui donnait l’envie d’être patient à l’égard de la jeune rousse. « Je me serais contenté d’un sourire. » Avec un sourire, elle ressemblerait sûrement moins à une vieille sorcière frigide pensait-il. Pour une raison qui lui était inconnue, Daphné se montrait toujours aussi très agressive avec lui, bien avant leurs petits conflits et d’une certaine manière cela devenait une habitude. « Je suis coriace tu sais ? » La rousse jouait les durs, mais malgré tout, elle restait à ses yeux une enfant et il n’en avait pas peur.


Un sourire à moitié blasé se décida sur le visage de Basile qui se demandait si elle avait réellement conscience de parler à un auror. S’il le voulait, il pourrait l’arrêter sur le champ, même avec autant de passants dans la rue, d’ailleurs c’était sûrement ce qu’il devrait faire pour la sécurité du pays. Seulement, il préférait coincer les parents et avec une gamine aussi inconsciente ça finira bien par arriver. « Rouge qui ? La personne chez qui tu vis. » Si la jeune femme pensait avoir trompé les forces de l’ordre, elle pouvait se mettre le doigt dans l’oeil. Tout le monde savait très bien que cette maison était occupée, sûrement en attendant le retour de son propriétaire. « Bien sûr. » Basile était presque certain que la rousse était restée en contacte avec le français et c’était pour cette raison qu’il gardait un oeil sur elle de temps en temps -bien qu’il aurait préféré qu’elle ne le coince pas en compagnie de l’asiatique.


Discrètement, il redémarra la voiture, histoire d'écourter la conversation. Lichuan pourra toujours rentrer à pieds et lui commander dans un drive ailleurs. Alors qu’il comptait la saluer, Daphné s’aventura sur une pente glissante qui ne semblait pas du tout au goût de l’écossais que ressera le frein à main. S’embrouiller avec lui était une chose, menacer l’amour de sa vie une autre et il ne laissera rien arriver à Victory. Son regard devient rapidement sombré, le même regard qui avait habité Basile pendant des moins durant avant d’attraper l’avant bras de la jeune fille pour l’approcher. « Tu devrais arrêter de me prendre pour un con tu sais ? Je pourrais t’étonner. Et n’oublie pas que c’est grâce à moi que tu n’es pas à Azkaban. » Sa voix était soudainement froide et son visage incroyablement fermé alors qu’il relâcha la jeune femme avant de reprendre son sourire habituel comme si de rien était.

Evidemment qu’il était têtu. C’était la moindre des choses quand on voulait s’en prendre à Daphné Greengrass. La détermination et l’entêtement étaient des qualités qu’elle pouvait reconnaître sans honte, même chez ses pires ennemis. Basile en était parfaitement pourvu. « Heureusement. J’ai toujours préféré les gens résistants. » Un sourire ironique plus tard, la rouquine jouait à énerver Basile, et elle avait apparemment trouvé le bon moyen d’y parvenir.

Il lui enserra le bras d’une main brusque, et Daphné lui accorda un sourire de crocodile avant d’ôter son bras tout aussi violemment qu’il l’avait empoigné. Si elle acceptait volontiers ce duel qui perdurait avec Flaversham, qu’il la menaçât de cette manière si physique n’était pas pour la réjouir. Avec tous les sangs-de-bourbe qu’ils côtoyaient, son contact devenait désagréable, quasiment irrespectueux. « Détends-toi, Flaversham. » Il avait toutes les raisons du monde de ne pas suivre son conseil : la Mangemorte était douée pour instiller la tension chez les autres. « Tu te fais des telles idées … » En d’autres circonstances, son petit air aurait pu en effet aller dans ce sens mais l’auror n’était pas dupe, la jeune Greengrass se moquait de ses avertissements avec une défiance proche de l’inconscience. Un jour peut-être elle regretterait cela. Ou peut-être pas, à vrai dire la rousse n’était pas connue pour changer d’avis politique comme de chemise comparé à un certain asiatique. Aborder le sujet Victory Willard était en tout cas une corde sensible qui fonctionnait si bien qu’elle ne put réprimer une dernière remarque pour la forme, clôturant le débat pour le moment. « Je suis vraiment déçue de ne pas avoir été prévenue plus tôt pour vous deux. J’espère que je serai invitée au mariage. Je les adore. » Oh oui, surtout quand ce n’était pas le sien …

Lui rappeler qu’il aurait pu la placer en prison pour le restant de ses jours était loin de la calmer. La jeune fille n’y croyait pas : par pur orgueil ou par mépris de l’autorité qu’il représentait, elle n’imaginait même pas Basile faire une chose pareille. Il n’y arriverait jamais, c’était une évidence pour elle. « Heureux sont les simples d’esprit. » fut sa seule réponse, un sourire toujours insolent pendu à ses lèvres avant que finalement elle ne s’écarte d’un pas de la voiture, revenant sur le trottoir. « Passe le bonjour de ma part à Lichuan. Il n’a pas l’air de vouloir répondre à ses hiboux, mais qu’il ne s’inquiète pas, on ne l’oublie pas. » Le clin d’œil qu’elle lui adressa en disait long et n’avait rien d’amical : Whitelaw avait tout intérêt à être plus prudent s’il ne voulait pas qu’il lui arrive des bricoles, lirait-on entre les lignes. Adressant une courbette moqueuse à l’adresse de l’écossais, la jeune femme choisit de tourner les talons pour reprendre son chemin sans plus s’attarder. Chaque chose en son temps.