Après quelques mois d’hésitation, il avait enfin décidé de déménager. Benjamin ne s’était pas éternisé en conversation et avait seulement indiqué qu’il sera parti avant la fin du mois. Bien que certains de ses amis y voyaient la encore une tentative supplémentaire pour s’écarter de tout, lui voyait plus cela comme un nouveau départ. Reparler avec Tommy l’avait légèrement motivé à faire un effort et rien de mieux pour cela de passer à autre chose. Bien sûr, ce n’était pas encore demain la veille qu’il fera le deuil de son petit frère, mais il espérait que ce soit un début. S’il avait déjà fais ses cartons, il lui restait plus qu’à trouver un appartement, ce que son job à la radio lui donnait comme avantage. En effet, beaucoup d’étudiants laissaient leurs annonces à la radio et il ne s’était pas gêné pour se servir en premier, envoyant un sms à toutes les annonces plus ou moins correctes. Après une journée d’attente, il avait enfin obtenue une réponse et se tenait actuellement derrière la porte de ce fameux appartement.

Pour une raison étrange, il avait choisi de prendre une colocation, sûrement par peur de se retrouver seul, pourtant quand la porte s’ouvrit, il se demanda ce qui avait bien pu lui prendre. « Ah, salut. Dis moi que je me suis trompé d’appartement. » Il ne le disait pas vraiment pas méchamment, mais plutôt de manière ironique, triturant le pauvre morceau de papier avec l’adresse de manière nerveuse. Depuis que son frère était tombé malade, Benjamin avait une légère tendance à jouer nerveusement avec ses doigts, surtout quand les choses ne se passaient pas comme prévues. Ce qui était plutôt le cas actuellement, étant donné que la personne qui se trouvait devant lui n’était nulle autre que Rose Rowle. Il soupira un peu, se disant que c’était mort et qu’il allait encore devoir passer quelques temps avec les gars et reporter son nouveau départ. « Bon, je suppose que voilà… Donc salut. » Il se tourna sans rien rajouter, se frottant un oeil un peu fatigué, avant de se diriger vers les escaliers.

Affalée sur son canapé, Rose tente désespérément de battre son record à Mario Kart – chose qui n'est pas prête d'arriver vu qu'elle quitte l'écran des yeux toutes les dix secondes pour fixer la porte en attendant que quelque chose se passe. Aujourd'hui est un grand jour pour elle, vu qu'elle est censée recevoir son nouvel hypothétique colocataire. Elle a donc refusé de sortir et même de lancer wow de peur d'être en plein donjon au moment où la personne arriverait. À la place, elle a fait le ménage comme elle a pu, débarrasser une partie du bordel qu'elle laisse habituellement traîner dans le salon et a quitté son habituel pyjama pour faire plus convenable. C'est beaucoup d'efforts pour pas grand-chose à ses yeux, mais elle se dit qu'une première bonne impression pourrait motiver la personne à s'installer plus rapidement. L'écossaise en a marre de vivre seule surtout que ni Léopold ni Violette ne semblent vouloir prendre la chambre vacante, pour son plus grand malheur. Elle rêverait de pouvoir vivre avec un de ses meilleurs amis, mais à la place elle va se retrouver avec un énième inconnu. En soi, ce n'est pas si dérangeant. Les choses se sont bien passés avec la précédente – celle-ci ayant juste décidé de déménager à l'étranger pour la fin de ses études. Elle se lève d'un bond en entendant la personne sonnait à la porte, prenant juste le temps de mettre sur pause afin de conserver sa première place.

— J'arriiiiive, crie-t-elle à l'attention de la personne derrière la porte avant de se précipiter en direction de celle-ci. Elle se félicite mentalement d'avoir enlevé les chaussures traînant habituellement par là, et qui la font toujours s'écraser par terre comme une idiote. Ce n'est pas le moment d'avoir l'air d'une gamine – ce qui avec sa taille, est toujours une difficulté sans précédent. Oh non, pas toi. Si le garçon en face d'elle avait le moindre doute, le ton qu'emploie la brune ne laisse aucune place à celui-ci. Rose est tout sauf heureuse de voir Benjamin Eddington sur le pas de sa porte, surtout que le papier qu'il triture entre ses mains lui permet facilement de deviner qu'il est la personne venant pour l'appartement. En passant son annonce via la radio du campus, elle n'a pas pensé une seule seconde qu'elle pourrait tomber sur lui, déjà qu'elle doit le supporter tous les jours à la cafétéria de l'université. Le garçon semble partager son manque d'enthousiasme, vu qu'il fait déjà demi-tour sans prendre la peine d'entrer dans l'appartement – un comportement qui énerve d'ailleurs particulièrement la brune. Ah, tu veux plus visiter ?, demande-t-elle en s'appuyant sur le cadre de la porte. Elle n'a pas la moindre envie de vivre avec l'ancien Serpentard, mais contrairement à lui, elle se dit qu'elle peut au moins rester polie – surtout qu'après tout, elle a passé une bonne partie de sa journée à l'attendre. C'est con, j'avais fait le ménage juste pour toi. Cette simple idée l'agace particulièrement – faire le ménage, elle peut l'accepter, mais pour Eddington c'est clairement une horreur. En fait, faut dormir la nuit. Ça te ferait pas de mal. La jeune fille se permet d'être particulièrement désagréable, en grande partie parce que s'il ne visite pas, elle aura perdu son après-midi pour rien.

Alors qu’il avait déjà posé son pied sur la première marche des escaliers, la brune décida de l’arrêter ce qui l’étonnait légèrement. Benjamin ne comprenait pas vraiment pourquoi elle l’arrêtait alors qu’une conversation serait parfaitement inutile. Elle ne l’acceptera pas en colocataire, parce qu’elle lui avait bien fais comprendre qu’il n’était pas du même monde. « Bah écoute, je suis pas sûr que tu souhaites vivres avec moi. » En vérité, lui aussi aurait préféré ne pas vivre avec elle, mais finalement il aurait sûrement fais un effort, vraiment pressé de partir de chez lui. Alors qu’il regardait Rose en se demandant ce qu’elle pouvait bien vouloir lui dire, il soupira en écoutant la réflexion stupide et insignifiante. Ses cernes, c’était son problème et elle n’avait pas à s’en mêler, sans parler que ce genre de remarque était digne d’un enfant. « Oh merci, j’étais pas au courant. Je vais le noter dans ma liste de chose à faire, après trouver un appartement. » Son ton était un peu nonchalant contrastant avec la remarque stupide de la jeune fille.

Il soupira un peu, avant de reprendre calmement. « Je diffuserais quand même ton annonce. » Après tout, il n’avait aucun droit de bloquer son annonce, surtout qu’il l’avait déjà plus ou moins bloqué pour son usage personnel. Rapidement, il rangea son morceau de papier dans sa poche arrière. « A demain au travail. » Un rapide regard avant de descendre les marches un peu blasé par cette mauvaise journée. Il n’avait plu qu’à rentrer chez lui et chercher un nouvelle appartement.

Comme toujours, Benjamin Eddington se montrait clairement odieux. Elle ne peut pas nier qu'il ait changé – elle n'a bien remarqué en le côtoyant dans le cadre de leur boulot – mais ça ne l'empêche d'être un parfait connard quand il le veut. Elle l'a attendu tout l'après-midi et bien qu'elle n'ait pas la moindre envie qu'il emménage avec lui, il pourrait quand même faire l'effort de visiter l'appartement. En soi, ça ne la dérangerait pas tant que ça de vivre avec lui – au moins, elle sait à quoi s'attendre, à un idiot de première qui n'a aucun respect pour les gens, mais c'est déjà mieux qu'un inconnu. Elle grimace en écoutant sa réflexion stupide. S'il n'a pas envie qu'on lui fasse des remarques au sujet de ses cernes, il n'a qu'à dormir un peu. Pour l'écossaise, si l'ancien serpentard se retrouve dans un état pareil c'est parce qu'il passe trop de temps à faire la fête avec ses amis et à profiter de sa côte auprès des étudiantes ratées qui rêvent toutes de coucher avec lui. Elle soupire avant de le suivre dans les escaliers pour lui attraper la manche, un peu agacée par son comportement.

— Bon, tu arrêtes de faire l'idiot et tu viens visiter ? J'ai pas toute la journée. Elle a promis à sa guilde de les rejoindre le plus tôt possible pour se lancer dans un nouveau donjon et elle ne compte pas les faire patienter éternellement. J'ai rien contre le fait de vivre avec toi, alors presse-toi. Elle remonte rapidement jusqu'à son appartement avec Benjamin, et ferme la porte derrière eux. Bon, je te fais visiter ?, demande-t-elle en se dirigeant vers la cuisine avant qu'il n'ait vraiment le temps de répondre – ce n'est pas vraiment une question après tout, elle ne va pas le laisser rester devant la porte d'entrée comme un idiot. Alors là, c'est la cuisine, tout ça. Et je sais pas trop quoi dire d'autres. J'ai fait la vaisselle, pour que ça paraisse cool. Elle se gratte l'arrière de la nuque en le regardant un peu. Enfin bref.

Sans vraiment qu’il sache pourquoi, elle lui attrapa le poignet lui indiquant qu’il avait plutôt intérêt à visiter l’appartement. Alors qu’elle avait été la première a râler en le voyant, elle assurait ne pas avoir de problèmes a vivre avec lui, ce qu’il lui fit haussé un sourcil légèrement amusé. Il n’y voyait aucun inconvénient, surtout qu’elle ne le connaissait pas et ne le regarderait pas avec ce regard de pitié qu’avait tous les autres. Alors qu’il hésitait à remonter, elle le tira jusqu’à l’appartement ne lui laissait finalement plus le choix de visiter. « Bah écoute oui. » En même temps, c’était un peu compliqué de dire non maintenant qu’il se tenait au milieu du salon, puis après tout ce n’était pas la mer à boire, surtout qu’il avait vraiment besoin d’un appartement. Naturellement, il lui emboîta le pas en direction de la cuisine qui était bien rangée et assez claire. La brune expliquait avoir rangé et nettoyé la vaisselle pour la visite, ce qui en soi n’avait rien d’étonnant. Pour lui, tout avait l’air plus que correct, surtout quand on avait vécu avec cinq garçons une année entière. « Bah c’est bien. » Benjamin n’était pas quelqu’un de très compliqué et à moins de vivre dans une porcherie, il n’allait pas grimacer.

Ne sachant pas trop quoi faire, il décida de prendre la parole, histoire de briser un peu la glace. « Tu cuisines beaucoup ? » Ses mains dans les poches, il balaya légèrement la salle du regard un peu gênée. Benjamin ne se faisait pas vraiment d’illusions, il savait très bien que la brune n’accepterait pas, tout simplement parce que les gryffondors était une bande de débiles, trop fier de leur maison.

Rose se demande un peu ce qu'elle est en train de faire. Elle n'a pas la moindre envie de se retrouver coincé en colocation avec cet idiot d'Eddington et pourtant elle n'a pas pu se résoudre à le mettre à la porte. La jeune fille a toujours détesté les Serpentards et leur côté élitiste alors elle tente comme toujours de prouver que les Gryffondors ont bien plus de qualités. Son seul réconfort, c'est se dire que Benjamin n'acceptera jamais de vivre avec elle – elle passera naturellement pour la gentille ayant fait l'effort et lui pour le méchant ayant refusé en bloc sans réelle raison. Elle bouge un peu sur elle-même, esquissant un petit sourire rassuré quand il lui annonce que l'état de la cuisine n'est pas trop mal. Même si elle se fiche de son avis, l'important est de donner envie aux prochains visiteurs de s'installer avec elle. Alors qu'elle s'apprête à lui demander s'il veut voir une autre pièce, il la coupe pour lui poser une question qui l'étonne un peu – peut-être parce qu'elle est simplement personnel, et qu'elle ne s'attendait pas à ce qu'il s'intéresse à son quotidien, même si elle se doute que c'est juste pour paraître poli.

— Pas vraiment, dit-il en se balançant sur elle-même. Elle sort une des mains de son pull – ou plutôt, du pull qu'elle a volé à son frère – pour lui indiquer de la main les paquets posés sur le plan de travail. Brioche, bonbons, pop-corn au micro-ondes. Ça fait trois repas. L'écossaise a conscience d'être un véritable échec sur le point de vue gastronomique – ce que trouve la quantité de numéro de pizzeria ou plat à importer accroché sur le frigidaire. Heureusement pour elle, elle trouve toujours le moyen de se faire inviter chez sa meilleure amie quand elle a envie d'un vrai repas cuisiner, ou de se faire inviter au restaurant par son frère. T'aimes cuisiner toi ? Cette conversation ne mène sûrement à rien, et elle trouve ça assez gênant en grande partie parce qu'ils travaillent ensemble sans jamais vraiment s'adresser la parole.

L’ambiance dans cette cuisine n’était définitivement pas au beau fixe et même si Benjamin avait plus que l’habitude des conversations gênantes, il devait avouer avoir hâte d’y mettre un terme. Se trouver en plein milieu de la cuisine de sa collègue qui ne peut pas l’encadrer depuis toute évidence Poudlard est assez étrange, bien qu’il trouvait tout même cela préférable à la pitié des gens ayant appris la mort de Emile. Si bien qu’il se contenta d’être là, dans la cuisine en regardant les denrées qu’elle pointa comme une enfant. Un semblant de sourire en admirant l’alimentation plutôt minime de la jeune fille. « Je valide pour la brioche. » Pour ceux qui le connaissait, Benjamin pouvait parfaitement se nourrir de brioche et de thé glacé pour le restant de ses jours, même s’il savait parfaitement cuisiner des plats plus élaborés, ce qui ne semblait pas être le cas de la petite. « Bah ça va, je sais faire à manger quoi. » Ce n’était pas un reproche, plus un constat et si elle le prenait mal, c’était qu’elle avait définitivement un problème avec sa simple existence sur terre -ce qui de la part d’un gryffondor n’était pas surprenant.

D’un geste assez lent, il se recoiffa avant de poser ses yeux cernés sur la jeune fille avec un air totalement neutre. « Tu sais, je vais pas te virer de la cafétéria si tu refuses la colocation. » Mettre les choses aux claires semblait être un bon début, sachant qu’ils allaient sûrement devoir se supporter encore un moment rien qu’au travail. D’ailleurs, même si elle avait été sa pire ennemie, il n’aurait jamais demandé le revoit de quelqu’un, simplement parce qu’il n’estime pas avoir son mot à dire -après tout, tout le monde à le droit de gagner de l’argent. Si bien qu’il n’avait pas hésité un instant avant de valider sa période d’essai auprès des supérieurs.

Rose grimace en entendant sa remarque. En quoi ça lui pose un problème, à cet idiot de Eddington qu'elle se sache pas cuisiner ? Aucun. C'est son problème, pas le sien et c'est bien là le problème avec les gens de son espèce – les Serpentards – ils ne peuvent s'empêcher de juger les autres et de se moquer. Le jeune fille n'a jamais compris pourquoi ils se montraient aussi blessants et cassants, et les seules exceptions qu'elle connaît sont Charles qui est clairement à ses yeux un nounours d'amour et Maximilien, même si cela reste parfois un peu limite. Elle lève les yeux au ciel, s'adossant au plan de travail qui – comme ses amis lui font assez souvent remarqué – vu qu'elle est naine, est finalement assez haut pour qu'elle puisse se le permettre.

— Ouais bon, ça va hein. J'y peux rien si je suis nulle pour ça, on m'a jamais appris, lâche-t-elle un peu sèchement. C'est vrai qu'entre passer sa vie dans le manoir Rowle avec des elfes de maison qui s'occupe de toutes les tâches ménagères et sept ans à Poudlard où elle n'avait pas à se préoccuper de la nourriture, elle n'a pas trop eu le temps. La remarque du garçon au sujet de leur travail à la colocation lui fait lâcher un soupir. Après tout, peut-être que là-dessus, Benjamin n'était pas si stupide et méchant que ça – un bon point pour lui en sorte. Non, mais j'ai pas dit que je refusais, mais je comprends pas. Tu vivais pas avec la bande de singes qui te sert de potes ? Elle ne sous-entend aucunement qu'il est mieux qu'eux, un vrai primate uniquement bon à faire du Quidditch pour se taper toutes les filles trop connes qui passent. Mais ce qu'elle n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi il serait prêt à quitter tout ça pour aller vivre avec un parfait inconnu. Après tout, l'écossaise donnerait tout pour vivre avec ses meilleurs amis – dommage pour elle, Violette n'a pas les moyens d'avoir son appartement et continue à vivre chez sa cousine, et Léopold ne va pas quitter le manoir Worsley pour vivre avec elle, surtout qu'il passe déjà tout son temps chez Eve. Ils sont plus assez bien pour Monsieur Eddington ? Ou alors, on t'a greffé un cerveau et tu t'es rendu compte qu'ils étaient clairement en dessous de la moyenne et t'as eu honte de vivre avec eux ? Elle rigole à sa blague, ayant parfaitement conscience d'être un peu blessante – même si c'est de bonne guerre, elle est persuadée que le garçon pense exactement la même chose d'elle après tout.

Pour une raison qui lui échappait très clairement, la brune semblait lui en vouloir viscéralement d’être un serpentard, comme si on lui avait donné le choix. Il n’était pas né avec une cuillère en argent dans la bouche, ne profitait pas du statut de sang pur et avait vécu à ses yeux comme n’importe quel autre étudiant. Seulement, il semblait que les gryffondors ne se mélangeaient pas et que la brune n’aimait pas les joueurs de quiddichs -ce qu’il comprenait parfaitement étant donné qu’il n’y jouait plus et ne s’y intéressait plus vraiment. Malheureusement, à moins que ce ne soit finalement pas une si mauvaise nouvelle, il semblait aux yeux de la brune être rester le Benjamin Eddington d’avant. Si elle lui parlait comme ça, c’était qu’elle ignorait tout de lui et d’une certaine manière ça l’arrangeait beaucoup. Après tout, cela évitait les questions ou la pitié des gens. Cela dit, même si cela apparaissait comme une bonne raison de vivre ici, il n’était pas sûr que cela soit vraiment possible étant donné l’agressivité de la petite à son égard. « T’énerve pas, j’ai pas critiqué. » Benjamin avait vécu avec six garçons et en avait vu des plats ratés, sans pour autant mourir, si bien qu’il ne s’inquiétait pas spécialement.

La question de la brune l’étonna légèrement, même si elle tombait sous le sens. Pourquoi un garçon comme lui, vivant avec ses grands amis cherchait un appartement. Bien sûr, pour lui c’était une évidence, même s’il comptait bien rester très évasif à ce sujet. « Bah si, mais je déménage... » La réponse ne semblait pas plaire et Benjamin ne savait pas trop quoi répondre. Il n’avait pas honte de vivre avec eux, et il n’irait jamais dire qu’ils n’étaient pas assez bien pour lui, mais plutôt qu’il n’était plus sur la même longueur d’onde ou plus simplement, qu’il avait laissé le bateau partir sans lui. Même s’il vivait encore là bas, il était devenu un presque fantôme -lui qui était autrefois un des leader du groupe. « J’ai plus envie de vivre là bas, ça fait un an que je parle à personne chez moi, alors j’ai envie de partir. Je pense que c’est une raison suffisante ? » Il parlait très calmement, se frottant le dessous d’un oeil qu’il savait extrêmement cerné. « Et je peux faire à manger si c’est que ça. » Ca valait ce que ça valait, mais au moins il tentait quelque chose pour améliorer la situation.

La petite écossaise lève les yeux au ciel – mais bien sûr, Benjamin ne l'a pas critiqué. Ce n'est pas à elle qu'on fera croire une chose pareille. Elle les connaît les Serpentards – elle a grandi avec, elle les a supporté lors des longs repas de famille où se côtoient tous les sang-purs, elle est même sorti avec certains d'entre eux. Alors quand le brun se défend, elle ne peut s'empêcher de se dire qu'il est vraiment d'une mauvaise foi exemplaire – si elle réfléchissait un instant, elle se rendrait peut-être compte que c'est plutôt elle qui abuse, mais elle est trop obnubilée par la présence du garçon dans sa cuisine. Se balançant un peu sur elle-même, elle écoute les explications de l'ancien joueur de Quidditch. Elle ignore totalement ce qui s'est passé – grand bien lui fasse – mais la situation dans laquelle semble vivre le brun n'a définitivement pas l'air très joyeuse. Dans un sens, elle pourrait avoir un peu pitié pour lui – ne plus s'entendre avec ses potes et être obligé de les supporter, ce n'est pas simple, elle l'a largement expérimenté les dernières années où elle voyait encore Charlotte pendant les vacances.

— Ah c'est con ça. Pourquoi tu leur parles plus ? On t'a greffé un petit pois à la place du vide intersidéral qu'il y avait dans ta tête, et tu t'es rendu compte que c'était qu'une bande de babouins ?, demande-t-elle un grand sourire aux lèvres. S'il y a une chose qui est sûre, c'est que Rose est fière de sa connerie – c'est ça d'être Gryffondor, c'est d'avoir le courage de soutenir à fond les choses stupides qu'on peut dire, chose qui n'est définitivement pas donné à tout le monde. Bon, plus sérieusement, je hais les visites et j'ai mieux à faire que chercher un coloc, alors tu peux t'installer si tu veux. À condition que tu me foutes la paix et que tu touches pas à mon ordi. Sinon, tu fais comme chez toi parce que bon, ça sera chez toi et je m'en fiche. Elle croise les bras en le regardant rapidement dans les yeux. Et je dis pas ça pour la bouffe, je m'en fous. Bien sûr, ça lui plairait bien d'avoir un bon repas de temps en temps, mais elle ne l'avouera jamais devant lui, elle a bien trop de fierté. Ah oui, tu peux t'installer quand tu veux en fait. Et perso, je reste là cet été. Comme toujours depuis qu'elle a quitté Poudlard, elle ne compte pas rentrer dans sa famille qu'elle fuit comme la peste, bien que ça elle ne va pas le préciser. Se souvenant d'un détail de la plus grande importance comme par magie, elle saute à moitié sur place avant d'attraper le bras du garçon pour le tirer dans le petit couloir donnant sur les chambres. Eh mais attend, t'as même pas vu ta chambre, dit-elle en ouvrant la porte juste à côté de la sienne – facilement reconnaissable grâce au poster géant de Wow que lui a offert Violette.

La jeune fille semblait tellement lui en vouloir, qu’il se demanda un instant si dans une vie antérieur il n’avait pas été son bourreau. Elle montrait les dents pour un rien, si bien qu’il n’osait plus trop parler, se disant que ça ne serait de répondre à ce genre de comportement. Si bien, que Benjamin se contenta d’hausser les épaules blasés par la situation. La prochaine fois, il se renseignera un peu plus sur l’identité de la personne postant une annonce. Pourtant, alors qu’il pensait déjà faire demi tour chez lui, histoire de mettre fin à la morale qu’il se prenait depuis qu’il avait passé le seuil de la porte, la brune lui proposa d’aménager. Le brun resta un peu bloqué, avant de se recoiffer et de la regarder dans les yeux. « Euh, ok. » Au fond ça l'arrangeait un bien de pouvoir bouger rapidement de son appartement, mais il avait de légers doutes sur le fait de pouvoir vivre avec une fille qui le déteste autant.

La possibilité d’aménager rapidement était seulement le meilleure argument qu’il avait entendu aujourd’hui et décida d’accepter. Au pire, il pourra toujours chercher un autre appartement pour finir l’année. Alors qu’il allait accepter, la brune lui montra la chambre qui restait, ce qui pour lui n’avait qu’une importance infime. Il retira doucement son bras avant de jeter un rapide regard. « Bah écoute, d’accord. Je vais prendre mes affaires chez moi alors. » Son cousin l’aidera à déménagé et normalement, ce soir il pourra profiter d’un moment de calme dans sa nouvelle maison.

Rose sait parfaitement que sa décision n'est pas possible. Accepter de vivre avec Benjamin Eddington est sûrement la chose la plus belle folle qu'elle ait fait cette année et elle est presque sûr que Léopold ne la croira pas quand il lui annoncera la nouvelle. Mais pour elle, vivre avec l'ancien Serpentard a un avantage qu'elle ne peut pas laisser passer. Ça lui permet enfin de terminer toute cette histoire de recherches de colocataires, de visites à faire, ou autre chose. L'écossaise en a assez de se poser des questions la nuit, et maintenant elle peut être sûr qu'elle aura quelqu'un pour l'aider à payer le loyer à la fin du mois. Personne d'autres que son collègue de boulot l'a contactée pour une visite, ce qui lui fait un peu perdre espoir surtout qu'elle a définitivement mieux à faire de sa vie qu'attendre chez elle que quelqu'un finisse par se pointer.

— Okay, si tu veux, dit-elle sans relever le fait que c'est assez bizarre comme situation. Personne n'emménage le jour-même dans une nouvelle colocation, ça fait pressé et c'est pas très rassurant. Sauf que Rose a mieux à faire que de penser à ce genre de détails sans la moindre importance. L'appartement est propre, Benjamin vient vivre ici alors le garçon fait bien ce qu'il a envie à condition qu'il la laisse tranquille. Je vais te chercher le double, mais de toute façon je serais ici. On m'attend pour un donjon en fait. Jetant un coup d'œil rapide à sa montre, elle sort d'un tiroir le trousseau auquel est accroché un petit porte-clef Kirby. Voilà, tes clefs. Sans prendre le temps de le raccompagner à la porte, elle se laisse tomber sur son siège d'ordinateur pour enfin lancer Wow. À ce soir Eddington.