Je n'avais pas vu Raphaëlle depuis quelques temps. Nous avions beaucoup de travail l'une et l'autre. C'était un peu dommage, mais nous avions aussi nos amis, notre famille, et des hobbys. Pourtant, j'avais tenu à la voir ce soir. Pour un dîner, où on pourrait parler un peu de nos vies. J'avais envie de la serrer contre moi, et de revoir ses grands yeux que j'aimais tant. Repoussant mes cheveux humides, je souris en voyant que la pluie avait transformé mes mains en tableaux colorés. Les écailles avaient surgies, par magie. J'essuyais distraitement mes doigts sur mon tee-shirt et sonnais avant d'entrer dans l'appartement. C'était plus un réflexe qu'autre chose : nous avions les clés des deux appartements, mais l'on habitait pas ensemble. C'était plus pratique. Et la première chose qui me sauta aux yeux, c'était l'absence de ce qui aurait dû y être.
« ▬ Je suis bien chez Raphaëlle ? Ou alors elle a déménagé et elle a emporté avec elle tous ses goodies sur Dim' ? » fis-je d'une voix étonnée. Parce qu'au lieu d'un Dimitri sur papier glacé, je faisais face à des photographies de Raph avec des amis. Nemo, Joy. D'autres que je ne connaissais pas. Je m'approchais, puis haussais les épaules, un peu perdue quand même. Ce brusque changement de décoration me troublait. Allons, elle avait tout bougé pour tout mettre dans une pièce avec un autel en son nom, c'était ça ? Sûrement. J'entrais dans le salon, après avoir retiré mes chaussures, restant simplement en tee-shirt ouvert sur les flancs et un short. Ma chevelure colorée de bleues et pailletée d'étoiles ondulait sur mes épaules, sauvage et humide.
« ▬ Raph, chérie ? Je suis là. » Je la cherchais des yeux, puis m'installais dans le canapé, tranquillement. J'avais ce côté assez exubérant de moi-même, qui faisait que j'étais chez moi partout. Chez des amis, en famille ou dans les bras, c'était comme à la maison. Je repoussais une mèche bleutée et pris un livre en me mettant à le feuilleter. Rien sur Dimitri ici non plus. Mais qu'est-ce qui arrivait ? « J'ai acheté à manger pour ce soir. » Des cakes à la banane, des sushis et du soda aux agrumes. Tout ce qu'elle aimait. Bon, les sushis, c'était moyen mais ça ne me gênait pas de faire un effort. Après tout, on ne s'était pas vues depuis un bout de temps. Je déposais le sac plastique sur la table basse et m'étirais comme un chat. Je me levais et me mis à arpenter l'appartement à la recherche d'une cache secrète. Est ce qu'elle avait décidé de tout jeter ? Non. Ce n'était pas possible. Je me mis à fouiller sans gêne, puis l'idée me vint qu'elle pouvait être dans la salle de bain et un petit sourire coquin flotta jusqu'à mon visage, alors que j'approchais de la pièce visée qui ... se révéla vide. Dans un soupir déçu, je retournais dans le salon, et sortis la nourriture en attendant que Raphaëlle ne sorte de sa cachette.
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Raphaëlle M. Sullivan
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Sujet: Re: time to change Sam 12 Déc - 19:34
Je suis venu te dire que je m'en vais
Et tes larmes n'y pourront rien changer
— On se voit demain Nemo ! Et oublie pas, je viens te chercher à treize heures précises pour qu'on aille voir le dernier Star Wars, lance Raphaëlle avec son habituel sourire enjoué en quittant l'appartement de son ami. Elle lui fait un signe de la main avant de se préparer à faire le long chemin qui sépare leurs deux appartements – c'est-à-dire cinq pas, tout au plus. Elle est heureuse – c'est rare les gens qui acceptent d'aller au cinéma avec elle. La plupart sont trop occupés – un peu comme sa petite amie qu'elle avec qui elle est censée passer la soirée, chose qui se fait de plus en plus rare ces temps-ci. Elle passe la porte de chez en soupirant, elle craint les retrouvailles. Oh, chérie tu es déjà là ? Elle lance un coup d'œil à l'horloge Winnie l'Ourson accroché à son salon. Je suis en retard ?, demande-t-elle incertaine. Je suis désolé, j'étais chez Nemo.
Elle vient s'asseoir dans le canapé à côté Althéa avec un grand sourire. Depuis combien de temps elle ne l'a pas vu ? Des semaines peut-être. Elle ne peut s'empêcher de trouver ça triste – sa copine lui manque souvent, mais leurs vies personnelles prennent définitivement le dessus sur leur relation. Raph lance un regard à ses murs colorés, le parfait exemple du gouffre qui commence à se former entre eux. La ministre ne les a jamais vu comme ça – ils ont toujours été couvert de photos à l'effigie de Dimitri, tout comme le reste de son appartement. Mais il faut croire que les remarques à répétition de sa meilleure amie et les regards de Nemo – montrant particulièrement bien qu'il trouvait ça assez bizarre – ont réussi à venir à bout de sa décoration à la limite de la névrose obsessionnelle. Raph s'est donc retrouvée une nuit dans l'incapacité de dormir et a préféré les détacher – avec soin, elles sont toutes rangées dans de grandes boîtes dans son armoire. Une chose qu'elle ne pensait pas possible mais qui a fini par avoir lieu. Le changement avant – après est assez impressionnant, surtout arrivant du jour au lendemain sans que personne ne comprenne pourquoi.
— Tu as pris des sushis ? Raph lui lance un grand sourire en regardant le sac posé sur le table basse. Althéa est adorable quand elle fait l'effort de manger sa tante comme elle dit, et ça juste pour elle. C'est toutes ces petits attentions qui lui rappellent pourquoi elles sont ensemble depuis des années – pourquoi elle est heureuse avec elle bien que cela n'arrive plus très souvent. Et du cake à la banane ? J'adore le cake à la banane. Raph se lève d'un bond pour aller chercher quelque chose dans la cuisine – les petits biscuits au chocolat en forme de personnages de la petite sirène qu'elle a faits pour l'occasion. Regarde ce que je t'ai fait. Il y a Polochon, il est trop adorable. Elle tente comme elle peut de la noyer – très mauvais jeu de mot – sous un flot de paroles pour éviter le sujet de conversation qui va forcément revenir sur le tapis. Après où est Charlie, où est Dimitri ?
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Sujet: Re: time to change Mer 23 Déc - 13:41
i am radioactive and
it's the end of time
Il n'y avait pas à dire : cet appartement sans son habituel fouillis sur Dimitri, c'était comme se retrouver à Disney sans Mickey. C'était comme une note dissonante dans une mélodie harmonieuse. Je ne comprenais pas ce qui c'était passé, et j'eus même peur de m'être trompé d'endroit, un instant. Pourtant, quand j'entendis la porte s'ouvrir sur ma chère et tendre, je redressais le dos et, les bras levés en signe de joie enfantine, je l'accueillis.
« ▬ Ma chériiiie. Pas de souci, je n'ai pas beaucoup attendu. » En fait, je n'en savais rien. J'avais juste ... pensé. J'avais mis mon cerveau sur pause, en regardant autour de moi. Mais je me fichais de si j'avais dû attendre ou non. La vue de la rousse réussissait à me redonner le sourire. Je me penchais vers elle et collais ma joue sur son épaule, le temps d'un instant, juste assez pour sentir sa chaleur et son parfum. « Quoi de neuf chez Némo ? » Je me demandais ce qu'elle était partie faire là-bas, mais ça ne m'étonnait plus : elle était toujours fourré chez son voisin. A croire que, bientôt, ce serait des affiches de lui ici.
« ▬ J'ai pris tout ce que tu aimes. Je suis la meilleure des petites amies, avoues-le » gloussais-je en piochant un gâteau à la banane, sans aucun souci du fait que j'aurai moins d'appétit après. J'aimais ça - la retrouver, simplement. Elle m'avait tellement manqué ... J'aimais les sourires qui naissaient sur son visage quand j'avais une petite attention pour elle. Je l'observais se lever, puis baissais les yeux sur les petits gâteaux, ma bouche formant un O parfait, sous la surprise et la joie. « Mais c'est carrément chou ! On se sentirait presque coupable de les manger ! Polochon est à moiiii » fis-je en l'attrapant et, plutôt que de le manger, je le collais contre ma joue. « J'pourrais me faire une teinture rousse, ça pourrait être rigolo, je serai le sosie d'Ariel comme ça. »
Mais j'suis pas dupe. Je sais qu'on devra parler - de beaucoup de choses. J'ai juste envie de manger avec elle, de prendre un bon repas, de m'amuser et de la tenir contre moi. C'est aussi simple que ça. Mais non - ça ne l'était pas vraiment, hein ? Nous nous étions distancées l'une de l'autre ; le temps et nos passions diverses faisaient que nous nous égarions loin l'une de l'autre. Il n'y avait aucune joie dans cela, mais c'était un fait.
« ▬ Alors, comment va le boulot, ma douce ? » demandais-je en reportant les mots durs et éprouvants pour après le repas. Je saisis un sushi entre mes doigts, sans aucune étiquette, et le gobais tout rond. J'adorais faire des remarques sur ma famille de poissons, mais ça faisait quelques temps que ça ne me posait plus aucun souci de manger des sushis ou des crustacés. « Moi c'est plutôt calme, mais j'ai beaucoup de paperasse, c'est hyyyyper chiant. J'en donne une partie aux sous-fifres. C'est plus rigolo de les regarder galérer. » Mais ce n'était pas pour ça qu'elle n'avait pas de travail. Elle soupira et caressa la main de Raph, doucement. Elle lui avait tellement manqué. C'était comme une brûlure dans sa gorge, dans sa poitrine.
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Raphaëlle M. Sullivan
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Sujet: Re: time to change Mar 1 Mar - 8:48
Je suis venu te dire que je m'en vais
Et tes larmes n'y pourront rien changer
— Chez Nemo ?, demande-t-elle sans comprendre avant de se rappeler que sa petite amie a théoriquement le droit de lui demander des nouvelles de son voisin. Mais cela lui paraît bizarre – l'arrivée du mexicain dans sa vie coïncide parfaitement avec la disparition de la ministre. Tout ça devrait la gêner – elle devrait préférer passer du temps avec la jeune fille, et non avec l'ancien joueur de Quidditch. Ce serait ce qu'il y a de plus logique – après tout, c'est avec elle qu'elle sort depuis des années, avec elle qu'elle couche, avec elle qu'elle passe toujours de très bons moments. Mais les choses sont plus compliquées, la distance les a fait rentrer dans un cercle vicieux que rien ne semble pouvoir arranger. Pas grand-chose. On a fêté son anniversaire ce week-end. J'ai aidé Elias à l'organiser, c'était cool. Il y avait plein de mexicains géniaux qui sont venus juste pour lui. Raph a toujours mis un point d'honneur à rester proche de ceux qu'elle aime – elle fait également partie de ces personnes qui iraient à l'autre bout du monde pour ses amis si elle en avait les moyens. Ne plus trouver du temps pour voir Althéa est donc une preuve supplémentaire que quelque chose cloche. Et demain, on va voir Star Wars. J'ai vraiment trop hâte, surtout qu'on s'est fait un marathon film pour se préparer.
Une fois assise sur le canapé à ses côtés, Raph ressent avec une certaine tristesse les conséquences de ces mois d'absence. À une époque, la simple joie d'Althéa suffisait à faire disparaître tous ses doutes, ses peines et ses moments d'incertitudes. Sa copine est un rayon de soleil – elle n'ira jamais le nier – mais il n'est plus le sien. Elle a toujours une place très importante dans son cœur, mais ce n'est plus suffisant. La galloise sourit, acquiesce à sa remarque – la meilleure des petites amies, elle l'est sûrement, mais ce n'est pas ça qui changera la donne pour la rousse. Le manque qu'elle ressentait au début s'est muté en un sentiment de résignation. Elle n'a parlé de sa décision à personne – elle ne veut pas embêter Joy avec des futilités pareilles, et même si elle passe son temps avec Nemo, elle ne se sent pas de l'épuiser avec ses histoires de couples. Elle pourrait – elle est persuadée que le mexicain l'écouterait avec la gentillesse dont il fait toujours preuve et tenterait au mieux de la conseiller – et pourtant elle ne le fait pas.
— Le boulot ? Comme d'habitude. C'est ça, se dit-elle, toute sa vie continue à son rythme habituel. Sa relation avec le ministre est l'unique exception. Elle la regarde avec un petit sourire tendre alors qu'elle attrape à son tour un sushi pour le manger. J'ai vraiment des clients, c'est des cas, insupportable. Je les déteste mais bon, on a pas toujours le choix, n'est-ce pas ?, demande-t-elle comme pour se donner du courage. Une conversation s'impose – une vraie conversation, pas comme toutes celles qu'elles ont eues en se promettant de trouver du temps pour se voir plus souvent. Quelques minutes plus tard, Raphaëlle rassemble son courage. À moitié calée contre sa petite amie, elle lui lance un petit regard gêné. Althéa, il faut qu'on parle. L'idée de pouvoir blesser la plus jeune la dérange énormément mais la constatation que celle-ci a l'air beaucoup plus emballée par cette soirée qu'elle est l'élément décisif dans son choix. Elle n'est pas stupide, elle se doute que la ministre n'est pas stupide au croire que tout va bien – elle semble juste, contrairement à elle, avoir la capacité d'oublier les problèmes le temps d'une soirée. J'ai bien réfléchi, dit-il en lui caressant lentement la main. On se voit plus, on s'est éloigné sur tous les plans et je pense pas que ça soit anodin. Forcément, Raphaëlle analyse ça de son point de de vue psychologue – une approche pragmatique qui l'oblige à taire ses sentiments. Tu sais très bien que je tiens à toi – je tiendrais toujours à toi – mais faut se rendre à l'évidence, ça marche plus. La rousse baisse les yeux, une boule dans la gorge. Je pense qu'il faut qu'on se sépare. La décision est lancée, celle qu'elle est parvenue à prendre au fil des semaines. Ses yeux se posent sur Althéa – elle espère qu'elle comprendra, qu'elle n'y verra pas une trahison.
Sujet: time to change 
Mer 25 Nov - 14:35
