In my bedroom after the war

… or maybe not.

Rentrer à la maison. Après avoir passé plusieurs semaines confiné à l'intérieur d'un minuscule appartement en compagnie de cinq autres personnes, Justin ne rêvait plus que d'un instant de tranquillité. Si l'habitation de ses parents étaient constamment envahis par la poussière et le bruit, elle avait au moins le mérite de lui offrir un minimum de solitude. Traînant derrière lui sa lourde valise dépourvue de roulettes — il pouvait difficilement se permettre de la faire léviter ici — il laissa échapper un soupir songeur en pensant à l'accueil qui l'attendait. L'avantage d'être fils unique ! Ses parents lui avaient manqué. Il désirait un bon bain chaud plus que tout, là où personne ne pourrait lui reprocher de prendre trop de temps dans la salle de bain, mais ses parents ne possédaient pas de baignoire.

Il frappa à la porte car il avait oublié comment se sentir à l'aise dans l'appartement de ses parents mais au lieu de la silhouette barbue de son père ou du regard doux de sa mère, ce fut un grand mec baraqué qui lui ouvrit la porte. « Salut. Justin je présume, tes parents sont pas encore là ? Némo. » Justin sentit sa mâchoire se décrocher. Némo. Némo Desario se trouvait chez ses parents et semblait même les connaître. Helga, qu'est-ce qui se passe ici ? Il serra distraitement la main qu'on lui tendait, incapable de formuler un son. Presque aussitôt, Némo lui tourna le dos. Il le suivit d'un pas automatique et découvrit alors dans le salon un jeune homme de son âge qui jouait à la console, un luxe dont Justin n'avait jamais pu profiter.

« Qu'est-ce que vous foutez chez moi ? parvint-il à articuler, trop saisi pour penser à demander un autographe à Némo Desario. »

electric bird.

La cucaracha, ya no puede caminar

Porque no tiene, porque le falta, marijuana que fumar

— C'est lui notre cousin Nemo ?, lance-t-il à son frère alors que celui-ci revient accompagné d'une personne de son âge beaucoup plus typée mexicain que lui. Il lève momentanément les yeux de sa gameboy pour les poser sur les deux garçons debout dans le salon. Il a l'air un peu con tu trouves pas ? Tu penses que tata a oublié de nous dire qu'il est un peu spécial ? C'est l'avantage principal de parler espagnol, être sûr de ne pas se faire comprendre par la majorité des anglophones, le nouvel arrivant compris.

Il regarde le plus jeune avec peu d'enthousiasme – comme tout ce qu'il voit depuis qu'il est arrivé dans ce pays de malheur, dans cet endroit où le monde lui paraît particulièrement gris comparé à la beauté du Canada. Il finit tout de même par se lever pour venir lui serrer la main beaucoup trop rapidement. Après tout, cette arrivée inattendue semble être le seul élément qui semble pouvoir occuper sa journée – se moquer d'un Nemo incapable de remplir correctement des papiers passe un temps, mais il finit par s'en lasser. Il le détaille sans complexe. Son cousin lui apparaît immédiatement comme un concentré de chose qu'il déteste – une personne simple d'esprit qui n'apprécie pas les surprises. Il se demande comment il va prendre la nouvelle décoration de sa chambre – un Elias qui s'ennuie finit toujours par bricoler, c'est bien connu.

— Tes parents nous ont ramassés dans la rue, on leur faisait pitié à manger de la pâtée pour chiens. Il se tourne vers son frère, un sourire stupide pendu aux lèvres. Surtout que toi, tu t'y connais en matière de pâté pour chiens. Il sait d'avance que personne ne rigolera à sa blague. Son frère se fait beaucoup moins drôle depuis qu'ils ont quitté le continent outre-Atlantique, et son abruti de cousin ne parle pas espagnol. Quel désespoir. Au moins, leur abuela aurait aimé cet échange. Ils auraient dû l'amener avec eux. Sinon, moi c'est Elias. Et au cas où tu l'aurais pas encore compris – je sais pas, tu es peut-être intellectuellement déficient, on nous a pas encore tout dit – on est tes cousins. Il observe du coin de l'œil la réaction de l'anglais qui promet d'être hilarante. Rencontrer ses cousins canadiens – mexicains, c'est une autre. Que l'un soit une star mondiale du Quidditch, et le deuxième l'une des personnes les plus chiantes de la terre, c'est assez différent au final.

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In my bedroom after the war

… or maybe not.

Sa stupéfaction, parfaitement légitime soit-dit en passant, finit par laisser la place à un début de colère, tout aussi légitime. « Est-ce que vous pourriez s'il vous plaît arrêtez de parler en putain de chinois ?! s'exclama-t-il le plus calmement qu'il le pouvait, c'est-à-dire pas vraiment. » Il était évident que leurs intonations étaient loin d'être asiatiques, mais nul n'avait jamais réellement appris les subtilités des différents langages. T'es en Angleterre, tu parles anglais, était l'un des arguments les plus avancés de son père, ce qui en disait à la fois beaucoup et peu sur ses talents d'orateur. Il balança sans la moindre douceur ses affaires en direction du canapé et les observa avec une profonde satisfaction atterrir sur l'espèce de hipster raté qui était actuellement occupé à le squatter. Elias, c'était bien ça ? Peu importe. Ils n'allaient pas rester. Même Némo, le grand, le célèbre Némo, commençait à l'agacer avec sa façon subtile de l'ignorer et, pire que ça même, de se déplacer dans son appartement comme si c'était le sien.

Ce type devait être aussi riche pour se payer une maison avec une salle de bains de la taille de l'appart entier, et cela acheva de l'énerver.

« J'appelle la police, il déclara solennellement. Vous ressemblez à aucun de mes cousins paternels (une vraie armée d'aryens. Justin, avec sa peau mate et ses cheveux sombres, faisaient tâche à côté d'eux. Il les détestait cordialement) et ma mère est fille unique, ajouta-t-il, comme s'il avait besoin de s'excuser, avant de se diriger d'un pas déterminé vers le téléphone. »

Il composa le numéro mais n'entendit rien à l'autre bout du combiné. Agacé, il réalisa que ses parents n'avaient sans doute pas pu payer les factures ce mois-ci mais sa fierté l'empêcha de l'avouer. Il demeura planté au milieu du salon, le téléphone collé à l'oreille, contemplait ses faux cousins d'un air menaçant comme si sa posture seule allait suffire à les faire décamper.
Cela ne lui coûtait rien d'espérer, sûrement. Les mexicains étaient tous des vrais trouillards, de toute façon.

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La cucaracha, ya no puede caminar

Porque no tiene, porque le falta, marijuana que fumar

— Chinois ? Elias lève à nouveau les yeux de sa console pour les poser sur son cousin. C'est définitif, celui-ci est complètement débile. Comment on peut confondre cet horrible charabia asiatique avec quelque chose d'aussi beau et chantant que sa langue maternelle. Il se fiche de nous là ? Je l'aime pas Nemo. Il a vraiment une gueule de con, un peu comme toi à son âge mais en pire. En plus, il te connaît et ça, ça veut dire qu'il aime le Quidditch. On pouvait pas avoir un cousin potable pour une fois, non ? Mais il a beau dire ce qu'il veut, mais les réactions du Finch-Fletchley l'amusent suffisamment pour qu'il fasse l'effort d'appuyer sur le bouton pose sa gameboy qu'il range dans la poche de son hoodie. Et c'est normal que tu lui fasses peur, t'as vu ta gueule ?, répond-il à son frère avec un petit rire. Il lui ferait bien une énième blague sur sa condition de loup-garou mais il ne faut pas abandonner des bonnes choses. Tes cousins c'est les blonds dégueulasses ? J'ai trouvé une photo dans ta chambre. Tu nous ressembles quand même plus. Sérieusement, vu ta gueule tu t'étonnes encore de voir débarquer des mexicains dans ton salon ?

Elias se lève du canapé au moment où Justin attrape le téléphone pour appeler la police. Il s'imagine une centaine de blague à jouer à son cousin – et qui sait, peut-être que Nemo acceptera de l'aider à faire flipper le plus jeune. Il en doute, la blague de son frère est la preuve que l'aîné des Desario ne partage pas son amour pour ce genre de situation. Quel dommage, il se serait bien fait passer pour un bandit sud-américain qui vient en Europe à la recherche des jeunes garçons à prostituer – la bonne blague, il serait bien incapable de tenir plus de deux minutes. Il rigole quand même à la remarque de Nemo sur les papiers, se demandant au passage si son cousin a pu comprendre ce qu'il avait dit vu sa réaction.

— Je veux pas te vexer Justin mais on est au courant que le téléphone fonctionne pas, dit Elias d'un ton compatissant en posant sa main sur l'épaule de son cousin, comme pour lui montrer qu'il n'a aucunement peur de lui – ça n'arrivera de toute façon jamais. L'anglais lui paraît bien trop stupide pour que quelqu'un le craigne réellement. Tu es donc coincé avec nous. Tu peux avouer que tu en rêvais.

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… or maybe not.

L'aveu tardif d'Elias eut le don de l'achever. Justin raccrocha d'un geste brusque le téléphone et, farouchement campé sur ses positions, fit face à ses deux prétendus cousins. La remarque du plus jeune sur sa gueule tourne en boucle sous son crâne mais il ne parvient pas à l'intégrer. Une chose était sûre : comme le disait Elias, mieux valait ressembler à un mexicain qu'avoir une tête de blond dégueulasse — coucou Malefoy ! Némo avait raison : ses parents rentreraient sans doute bientôt pour confirmer leur histoire. « Ouais, grogna-t-il. Ravi... »

En attendant, la perspective d'avoir Némo Desario comme cousin commençait à lui faire tourner la tête. Les possibilités...

Son enchantement cessa dés que Némo tenta de lui faire la charité. Caniche royal, non, mais pour qui il se prenait, l'autre abruti ?! Cousin ou pas, ce n'était pas encore son appart.

« Vous comptez rester combien de temps ? voulut-il savoir. Y'a encore des trucs que je pige pas — genre, ma mère est pas une sorcière alors pourquoi vous l'êtes ? — mais le premier qui squatte ma chambre, je le fous dehors, okay ? »

Sur ce, il agrippa sa valise et se dirigea vers sa chambre. L'instant d'après, il poussait un cri de pure horreur en découvrant la nouvelle décoration.
Leur nouvelle cohabitation commençait bien.

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Spoiler:

La cucaracha, ya no puede caminar

Porque no tiene, porque le falta, marijuana que fumar

— Parce que quelqu'un a dû maudire toute notre génération, lâche Elias avec un soupir. Nous sommes, hélas, aussi des né-moldus. Comme toi. Que des points communs, n'est-ce pas ? Il s'en serait bien passé ; Si ce n'est pas un secret pour l'ancien joueur de Quidditch, leur tout nouveau cousin va rapidement se rendre compte que le canadien est tout sauf attaché à ses pouvoirs magiques – à une exception près, bien sûr. Sinon, désolé de te te décevoir mais on squatte déjà ta chambre.

Il hésite l'espace d'un instant à le suivre dans sa chambre pour continuer à l'embêter – quel jeu passionnant – mais finit par se dire que jouer à Tetris sur le canapé est une activité beaucoup plus constructive. Il s'assoit donc en tailleur, regardant avec un sourire la façon dont Justin quitte les lieux suite à la proposition de Nemo. S'il se met aussi à se vexer aux remarques de l'aîné, les semaines de cohabitation risquent d'être réellement longues.

— Je crois qu'il vient de voir la nouvelle couleur sa chambre. Elias rigole en lançant un ultime regard à son frère. Je comprends, c'est plutôt pas mal le vert pistache. Le mexicain ressort de sa poche sa gameboy, satisfait de la réaction du plus jeune. Il avait réussi à obtenir le non-refus – très différent de l'accord – de sa tante de repeindre la chambre de Justin qui semblait un peu sale. De toute façon, elle préférait sûrement ça plutôt qu'il se plaigne à longueur de journée de ne rien faire.

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