La deuxième étoile à droite

Et tout droit jusqu'au matin

L'air marin lui a manqué. C'est une vérité qui prend tout son sens une fois qu'il retourne au bord de mer, dans un de ces lieux pleins d'histoires qu'il a parcourus il y a des années avec son oncle. Il réalise dans ces moments à quel point il aimerait que tout ça ne se soit pas terminé. La nostalgie n'est pas bonne pour lui, il le sait, s'interdit d'y sombrer plus de quelques minutes de peur de se retrouver à l'état de loque, pleurant une vie désormais dépassée. C'est entre autres l'effet que lui fait Saint-Malo. La ville française est magnifique, il y entrevoit des souvenirs qu'il pensait enterré. Mais aujourd'hui, l'heure n'est pas à la détente ou à la contemplation. Il est hors de question – hélas – de rester à contempler la mer pendant des heures, oubliant tout ce qui existe et en particulier les passants. Il aimerait pourtant, mais la personne qu'il a choisie d'amener avec lui pour ces quelques jours de vacances ne lui permettra pas. Elle est trop active, éreintante. Il craint de la perdre et d'avoir à s'expliquer à ses parents.

Andy est une enfant intéressante, serait capable de vous expliquer le libraire. Elle bouge, est beaucoup trop dissipée, mais elle est gentille. Elle écoute ses histoires, point important qui a peut-être motivé le londonien à l'amener ici. Il ne l'a dit à personne – excepté au père de la jeune fille, la mère ne semblant pas être mise dans la confidence – qu'il amenait une gamine de treize ans avec lui en France, une fille qu'il ne connaît pas plus que ça, qui est juste venue lui parler chez Fleury & Bott. Une histoire de sourire. Il n'est pas stupide Charlie, il connaît le genre de réflexions qu'il risquait de se prendre dans la figure s'il confiait à ses amis l'âge de sa partenaire d'aventures. Lui se fiche des mots sans valeur prononcés par ceux qui tentent de lui faire mal. Il n'a rien d'un pédophile, l'idée de toucher à cette enfant qui est sous sa responsabilité ne lui a jamais effleuré l'esprit. Il la voit comme une petite-cousine éloignée avec qui il tenterait de partager un bout de sa passion. Ce n'est pas Balthazar qu'il pourra amener ici dans sa vie.

— Alors Andy, qu'est-ce que tu penses de la vue ? C'est la plus belle région de France ici. Plus belle que les villes surpeuplées, plus accueillante que le sud et leur accent mal aimable. Au fond de lui, il espère vraiment que ce voyage plaira à la petite Poufsouffle Charlie, il ne cherche après tout qu'à lui faire plaisir en l'amenant à un endroit où les vieilles pierres sont témoins des récits découverts au fil des recherches. Et si pour les enfants, Charlie a tendance à tout rendre merveilleux, il sait que les histoires des corsaires qui ont foulé les pieds la ville ne nécessitent aucune fioriture pour paraître extraordinaire.

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A St Malo cité corsaire.

ou le passé est vieux et fier.

Excitée comme une puce, la petite ne pouvait tenir en place plus de cinq minutes. C’était la première fois qu’elle partait dans un autre pays avec une personne qui n’était pas de sa famille et pour dire vrai, Andy n’en revenait toujours pas que ses parents aient accepté. Le voyage en bateau jusqu’aux côtes bretonnes c’était parfaitement bien passé et elle avait adoré jouer les pirates sur les planches de ce dernier, les histoires que lui racontait le brun était toujours très inspirante pour ses jeux d’enfants. Bien que l’anglais soit largement adulte, l’écossaise s’amusait comme une enfant et se sentait un peu comme dans une grande aventure vers l’inconnu. Avec ses parents, elle était déjà allée à Paris, mais cela ne ressemblait en aucun point à cette ville en pierre grise, protégée par de mythique rempart.

D’où ils se tenaient, ils dominaient la baie et pouvait voir la mer paisible qui caressait le bas des remparts. La blonde se tenait prêt de l’anglais, presque sagement et traînait son regard sur les reflets du soleil qui faisaient scintiller l’eau. Sans difficulté, elle imaginait déjà les batailles qui avaient pu se dérouler ici et rêvait de retourner dans le temps pour partir à l’aventure à bord du Jolly Roger, à la recherche du pays imaginaire. Comme le disait si bien sa mère, Andy était une enfant bien trop dissipé. « C’est vraiment très joli, mais est-ce qu’on peut faire le tour des remparts ? On verra peut-être des squelettes de pirates ! » L’imagination de la fillette n’avait aucune limite et Charlie allait bientôt le voir.


Andy, toujours avec hâte, attrapa la main de Charlie l’obligeant ainsi à bouger et reprendre leur promenade. « Tu penses qu’il existe encore de vrais pirates ? Et je parle pas de ceux qui attaquent les touristes en Afrique comme on voit aux infos. » Le franc-parlé de la petite était sûrement ce qui faisait d’elle Andy Jules McGildroy, une pile électrique inépuisable. Heureusement pour l’anglais, elle avait pensé à prendre ses cachets contre l’hyperactivité.

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L'imagination dont est capable de faire preuve Andy depuis le début de ce voyage lui réchauffe le cœur. Il se revoit enfant – la manie de courir partout et l'air dissipé en plus – à inviter des centaines d'histoires dont les héros étaient toujours des pirates, ces hommes qu'il ne voyait alors pas aussi sanguinaires qu'aujourd'hui. Et ça le rend heureux, Charlie, de voir qu'une enfant est toujours capable de propager ses rêves sur la réalité. Des fois, dans des revues ennuyantes qu'il lit quand même, il apprend que les scientifiques sont inquiets, que toutes ces nouvelles technologies brideraient la plus importante des choses – l'imagination humaine – et ça dès l'enfance. Alors il sent rassuré en contemplant l'air excité de l'écossaise. Ce n'est pas demain que ça arrivera, il faut croire que les contes d'enfants ont encore de belles décennies devant eux.

Il se sent tiré par l'enfant qu'il décide de suivre sans se plaindre. Après tout, il l'a amené pour qu'elle découvre cette ville magnifique, elle est le maître de la balade, il n'a rien à lui refuser – quelle innocence.

— Normalement, on peut. Par contre, je sais pas si on trouvera des squelettes mais il y a une belle statue. Il écoute avec intérêt les propos de la jeune Poufsouffle sans savoir réellement quoi lui répondre. Bien sûr, il aimerait pouvoir lui dire que oui, il existe toujours des vrais pirates qui se baladent avec des perroquets et des sabres en acier pour tuer ceux qui s'approchent trop près de leurs trésors. Ils vivraient toujours à Tortuga, boiraient du rhum, passeraient des nuits entières dans les bras chauds d'une prostituée. Il aimerait pouvoir lui raconter de ce genre d'histoires parce qu'il aimerait que ce soit vrai. Et alors peut-être qu'il en serait devenu un, qu'il aurait pris le large, abandonné son appartement londonien qui lui rappelle chaque jour un peu trop son oncle, et il serait partie à la recherche d'une embarcation. [color=teal]Il paraît que non. Les vrais pirates ont disparu il y a des siècles, et c'est juste dans des villes comme celles-ci qu'on en retrouve des vestiges.[/colo] Il les connaît toutes, ces villes. Il les a toutes visitées à de nombreuses reprises en partant à la recherche d'informations insolites. Mais tu sais, je suis sûr qu'il y en a encore quelque part. Dans un monde imaginaire peut-être. Comme dans celui de Peter Pan.

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Son sac à dos rose sur les épaules, la petite accélérait déjà le pas obligeant le plus vieux à faire de même. Andy était une enfant très énergique de nature, mais le fait d'être dans un autre pays, sans sa famille et sans personne pour lui dire de se calmer n'arrangeait rien. Le pauvre Charlie allait sûrement revenir bien plus fatigué de ce voyage qu'à son départ, les enfants n'ont jamais été très conseillé pour le repos. Certains passants les regardaient d'un oeil amusé la scène, jugeant certainement que le pauvre garçon n'en avait pas fini avec son petit monstre blond.

Des remparts, on pouvait aisément voir toutes la baie et juste en face d'eux, de l'autre côté de cette eau turquoise, ils pouvaient admirer la célèbre promenade des anglais de Dinard. Sur leur gauche, il pouvait voir la bisquine voguer vers l'est, rentrant très certainement dans son petit port. Ici, le temps semblait s'écouler bien moins vite et comme le dirait son père, l'air y était très inspirant. « Une statue de qui ? » Comme la plupart des enfants, l'idée de voir une statue ne l'excitait pas vraiment, mais pour faire plaisir à son compagnon de voyage, elle acceptait volontiers de faire semblait de s'y intéresser.

Apprendre que les pirates n'existaient plus ne l'étonnait pas vraiment, mais la façon de parler de l'anglais une peu plus. « Un monde imaginaire ? Comme le monde magique ? » Le problème quand un enfant moldu découvre que la magie existe pour de vrai, c'est qu'il a tendance à espérer que tout puisse exister, ce qui avait la don de beaucoup décevoir. Les deux compagnons arrivèrent devant la fameuse statue, celle d'un homme parfaitement inconnu pour la jeune écossaise qui espérait que ce soit un véritable pirate. « Charlie, je viens d'y penser, mais ils se pourraient qu'ils aient laissé un trésor ici et que personne ne l'ai encore trouvé. Imagine tout ce qu'on pourrait faire avec cet or !! Déjà, je pourrais m'acheter un nouvel équipement de Quidditch et je pourrais te payer une gaufre. » Andy se doutait bien qu'il n'y avait aucun trésor, mais c'était un moyen comme un autre de dire qu'elle avait faim et qu'elle mangerait bien une gaufre.

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— Une statue de Robert Surcouf. Il semble presque ailleurs, perdu à une autre époque où les grandes batailles au cœur de l'océan étaient courantes, où les navires coulés se transformaient en histoire épique au tour d'une chope de bière tiède. Des siècles plus tôt, il aurait été pirate. Pas corsaire comme l'homme représenté par le monument, lui n'aurait été fidèle qu'à ses frères de galère. C'était un corsaire au service du roi de France. Tu vois, la différence avec les pirates, c'est qu'ils possédaient des lettres de marques qui leur permettaient de piler des navires – et tout ce qui va avec – à condition qu'ils ne s'en prennent pas à ceux de leur patrie. Un sourire triste apparaît sur son visage. C'est un cap, un changement dans la piraterie qui la fait courir à sa perte, le besoin d'hommes qui ne respectaient rien de trouver un allié plus puissant pour espérer vivre quelques années de plus. Et c'est une figure emblématique de la ville.

Des souvenirs – toujours trop de souvenirs – lui reviennent en mémoire. La fois où son oncle et lui sont parties sur les traces de forme de sorcellerie, de simples indices trouvés au fond d'un bouquin, dans l'un des voyages du corsaire. Aucune preuve, aucun résultat après des mois de recherche. Seuls restent les bons moments, la joie qu'il a approuvait en prenant le large pour retracer l'une des traversées de La Confiance, ce bâtiment dont les dessins le font toujours rêver aujourd'hui.

— Comme le monde magique, c'est ça. Il aimerait que ça soit aussi simple, il se sentirait peut-être mieux confiné au Chemin de Traverse. Mais ce n'est pas le cas. Je pense pas. Elle est bien loin l'époque où il espérait trouver un trésor, il se sent soudainement vieux. Mais ce serait un mensonge de dire qu'il a voyagé aux quatre coins du monde pour rien. Tous les trésors ne sont pas d'argent et d'or, a-t-il réalisé encore enfin. C'est le bonheur d'être ailleurs, de quitter Londres, de découvrir de nouvelles choses, de nouveaux paysages magnifiques. Tu veux une gaufre ? On peut aller t'en chercher une si tu veux. Elle est son invitée, une enfant bien trop active. Il a conscience qu'elle doit se nourrir plus souvent que lui, qu'elle doit aimer les sucreries. Et si lui ne mange que très peu, il compte bien laisser Andy profiter de toutes les choses qui lui feront envie.

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Elle écoutait le récit de Charlie, comme à chaque fois qu'il lui racontait une histoire. Il arrivait, à l'instar de certains de ses professeurs à capter son intention et même si elle ne retenait pas toujours tout, elle était heureuse de pouvoir ressortir ce genre d'anecdote devant les autres élèves. La statue n'était certainement pas la chose la plus intéressante qu'elle avait vu de sa vie, mais elle se sentait un peu obligé de prendre une photo à l'aide d'un des appareils photos jetables que lui avait glissé son père dans sa valise. Pour le moment, la majorité de ses photos étaient des choses parfaitement inutiles comme la devanture de la boutique de souvenir du bateau, une mouette qui vole la glace d'un touriste sur la plage et tant de choses qui ne fascinaient que les enfants. Étrangement, elle était persuadée que cette dernière photo plairait beaucoup à son père et au final, elle était sûre que Charlie s'entendrait très bien avec le libraire. « Mon père, a écrit un livre sur les corsaires je crois, si tu veux tu pourras le lire, même si je crois que c'est pour les enfants. » Andy n'avait jamais pris la peine de lire un seul des romans que son père avait rédigé, mais elle était sûre qu'ils étaient très bien.

L'espoir de trouver un trésor dans cette ville semblait effectivement très maigre, mais Andy de nature plutôt optimiste se plaisait à penser que tout était possible. « Charlie ? Tu ferais quoi avec l'argent d'un trésor ? » Si la blonde trouvait un trésor, elle s'achèterait certainement une nouvelle planche de surf et une tonne de choses dont elle rêvait, comme tout enfant de son âge, mais elle ne pouvait s'empêcher de se demander ce qu'un adulte comme Charlie pouvait réellement désirer dans la vie. Doutant très certainement que ce dernier puisse vouloir d'une planche de surf.

Ce dernier avait parfaitement compris la demande de la petite et lui proposa de partir à la recherche d'une gaufre dans les ruelles étroites de la ville. Une petite foule s'était entassée entre les murs, flânant dans les boutiques à la recherche de souvenirs à ramener ce qu'elle devrait d'ailleurs faire elle aussi. Ils arrivèrent devant un marchant de gaufre dont l'odeur lui mettait déjà l'eau à la bouche. « Une gaufre au Nutella avec du sucre glace pour moi. » La dame derrière son comptoir ne semblait pas avoir compris la demande de la jeune fille et regardait Charlie avec un regard curieux. Il fallait avouer que l'accent de la petite était très marqué et n'aidait pas vraiment ces pauvres français qui ramaient déjà assez avec de l'anglais simple.

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— C'est vrai ? Je lirais ça alors, dit-il calmement. Il est plutôt heureux Charlie, que la petite fille montre un brin d'intérêt à ce qu'il raconte. Il a conscience que ça peut paraître ennuyant, surtout pour une enfant. On est bien loin des récits épiques du Seigneur des Anneaux, ou d'autres romans du genre. L'histoire est bien plus réelle, et c'est pour ça qu'il s'interdit de la noyer de détail. Tu sais, la littérature pour enfants est bien plus importante qu'on accepte de le dire. C'est ça qui qui permet aux jeunes de faire grandir leur imagination.

La question de la petite écossaise l'étonne. Ça fait bien des années qu'il ne pense plus à des trésors – il était encore à Poudlard quand il a arrêté. Il sourit, heureux de voir de que des enfants peuvent toujours penser à ce genre de choses, qu'ils ont encore assez d'imagination pour ça. Il n'est pas sûr que sa réponse lui convienne, elle est celle d'un adulte qui fuit ses obligations, qui haut cette vie posée qu'on le force à adopter.

— Je pense que j'achèterais un bateau, sûrement un trois-mats. Tu sais, un vieux gréement que je restaurerais. Puis je partirais pour naviguer aux quatre coins du monde avec des gens que je rencontrerais dans des ports et qui accepteraient de faire un bout de chemin avec moi. Il réalise à quel point ce rêve est irréalisable, encore plus aujourd'hui. Avec les années qui suivront, tout deviendra sûrement plus compliqué. Et pourtant, il est beau, magnifique.

Ils arrivent devant le marchand de gaufres et il se doit de faire face à une situation qui n'a jamais été la sienne. Commander une sucrerie pour une enfant hyperactive – il regrette, il aurait tellement aimé pouvoir amener sa sœur ici quand elle avait l'âge d'Andy. Il sourit à la vendeuse.

— Bonjour. Une gaufre, dit-il en lui montrant la pancarte. Nutella et sucre glace, le blanc. S'il vous plaît. Il ne connaît que peu de mots Charlie, apprécie au fil de ses voyages, et la plupart ne concernent pas la nourriture. Il tend le billet à la vendeuse qui semble avoir compris sa commande et sourit à Andy. C'est pas toujours facile, de voyager avec la langue. Mais en vrai, on se fait toujours comprendre, tu crois pas ? C'est sur les côtes asiatiques qu'il la plus galéré Charlie, là où les gens parlent le moins bien anglais.

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« Charlie, si tu voyais mon père, je pense que tu déconseillerais directement la littérature jeunesse. » Le père d'Andy, à l'image de sa fille avait le mérite de sortir de l'ordinaire, si bien que même sa fille de treize ans le trouvait complètement à l'ouest. La petite aimait ses parents, mais elle était parfaitement consciente qu'ils vivaient totalement sur une autre planète, à mille lieux de celle-ci. Une fois, son père avait décidé pour une raison absolument inconnue de mettre tous les meubles dehors pour vivre à la belle étoile et même si cela avait été très marrant, elle savait que ce n'était le genre de choses que monsieur et madame tout le monde faisait dans leur jardin. Tous les habitants de Coldingham connaissaient les McGildroy et tous se demandaient qui était le plus barge de la famille, mais pour le moment la différence était impossible à faire.

La petite écoutait attentivement la réponse de Charlie à sa question. Étrangement elle s'attendait un peu à ce genre de réponse de la part du plus âgé, il n'était pas si différent de son père finalement, un poil trop ailleurs. « Tu emmènerais pas tes amis ? Ta famille ? Ou même ta copine - ou copain ? » Objectivement, la question était plutôt incorrecte, mais Andy n'était pas vraiment du genre à faire la différence et disait sans difficulté tout ce qui lui passait par la tête. « Si je trouvais un trésor … Je crois que je continuerais à faire la même chose qu'avant. » Andy n'avait aucune idée de ce qu'elle pourrait faire avec de l'argent, elle n'en avait jamais manqué et les seules choses qui lui manquaient ne pouvaient être achetés, même avec tout l'or du monde - des amis.

Ils arrivèrent devant une le petit commerce et Andy lança un regard rêveur aux centaines de pots de Nutella qui se trouvait à l'étage. « Bonjour. » Un des seuls mots qu'elle connaissait à l'adresse de la vendeuse avant de laisser Charlie commander. Le brun ne semblait pas vraiment parler la langue et cela amusa beaucoup Andy qui se marrait dans son dos. « Merci, Charlie ! » Elle attrapa la gaufre et offrit un sourire au libraire en guise de remerciement, avant de hocher la tête en l'écoutant. « Les anglais n'arrivent déjà pas à me comprendre, alors tu sais. » L'accent de la petite était plus que prononcer et même sa mère lui demandait de faire des efforts, mais c'était peine perdue.

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Tous les enfants ont du mal avec la figure d'autorité, se dit Charlie tout simplement en entendant la remarque de la jeune fille. Les adultes paraissent toujours bizarres parce qu'ils ne pensent plus comme les enfants – c'est ce qu'on apprend en lisant Peter Pan. Bien sûr, il y a toujours des exceptions dont il espère faire partie, au même titre que son défunt oncle. Il ne sait pas si le père d'Andy est un homme de ce genre – c'est un écrivain après tout – mais il se doute que juste que ce n'est pas simple tous les jours pour la petite fille de treize ans forcée de vivre avec. Dans sa famille, la figure maternelle fait preuve d'autorité, et même si c'est différent et change selon les foyers, il ne peut s'empêcher de se demander comment se déroule les choses chez les McGildroy. Pour ce qu'il en a vu l'année dernière au moment des courses pour les nouvelles fournitures, et pour ce qu'il en a lu dans la lettre, le père de la jeune fille semble être l'élément bizarre du couple. Mais il n'a pas vu la mère – heureusement pour lui.

— Je vois pas pourquoi, dit-il simplement. C'est important de pouvoir écrire ce qu'on a envie. C'est ce qu'il pense Charlie, il hait la censure qui corrompt depuis des années ce gouvernement. Et même si comparé à certaines personnes qu'il connaît, ce n'est pas par intérêt journalistique, il ne peut pas s'empêcher de se sentir profondément énervé par ce genre de comportement – comme tout membre de l'Ordre qui se respecte, pense-t-il.

La question de la petite lui fait plus mal qu'il ne l'aurait pensé. Elle lui rappelle qu'il n'a personne, que malgré ces gens avec qui il passe désormais sa vie au quartier général, il reste seul. Les choses ont beau aller mieux avec sa sœur, il sait qu'elle n'acceptera jamais de l'accompagner à l'autre bout du monde. Elle a sa vie, ses amis, un parasite à ses côtés. Clément est mort, et il se sent seul comme jamais. Les autres ne voient en lui qu'un coordinateur, rarement un ami. Tous sont trop amoureux de leurs quotidiens pour le comprendre – même Automne qui semble vouloir se faire pardonner ces années de remarques déplacées par des visites de plus en plus fréquentes à la librairie.

— Je pense pas. Il baisse les yeux gênés par ce qu'il va dire. Je n'ai personne à amener avec moi. Ça peut te paraître bizarre Andy, mais j'ai pas beaucoup d'amis. C'est peut-être la raison de sa présence ici. Il est si seul qu'il ressent le besoin d'amener une enfant avec lui au lieu d'une personne de son âge. La tristesse de son quotidien la fatigue et son chien lui manque. Je trouve que c'est une bonne idée, pour le trésor. Il faut savoir rester simple, c'est important. Toute sa vie est basée là-dessus, sur la simplicité. Une fois la gaufre dans les mains de la jeune écossaise, ils s'éloignent du magasin alors que Charlie sourit, amusé par la remarque de la petite blonde. C'est vrai que tu as un accent très marqué. Et encore, il est gentil. Mais je trouve pas ça gênant.

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La rue principale de la cité était comme toujours pleine de monde, pourtant on ne si sentait pas du tout oppressé, une réussite pour une ville entouré d’un mur de sept mètres de large. Le regard de la petite se promenait vers les hauteurs, sur les fenêtres des appartements se demandant quel genre de personne pouvait bien vivre ici et étrangement, elle imaginait parfaitement son père sur l’un des balcon avec sa tasse de café préférée. Andy ne s’était jamais donnée la peine de lire un des romans de son père, plus par principe qu’autre chose. « Il écrit ce qu’il veut, je pense juste qu’il est complètement barge, déjà pour avoir épousé ma mère… Je tomberais jamais amoureuse. Beurk ! » Comme tout enfant du monde, la blonde n’avait aucune envie de ressembler à ses parents et tout ce qui va avec.

« Tu n'as pas d'ami ? Moi non plus. » Objectivement, elle ne l'aurait jamais dit à un enfant de son âge, mais avec Charlie c'était différent, c'était un adulte et elle se doutait qu'il ne la jugerait pas sur ça -surtout qu'il était dans le même cas. « A ton âge, tu n'as pas une amoureuse ou un amoureux ? Une fille ou un gars qui te plaît ? » De ses yeux d'enfant, l'amour semblait appartenir au monde des adultes et même si elle disait parfaitement le contraire, elle s'y intéressait de plus en plus. Chose parfaitement normale pour une fille qui découvrait les joies de l'adolescence. « Simple ? Oui on peut dire ça, mais si j'avais des amis je partagerais avec eux. »

Une fois la gaufre en main, les deux touristes s'éloignèrent de la boutique. « Je trouve ça marrant moi, de pas parler comme tout le monde. » Andy prit une bonne bouchée de la gaufre avant de s'arrêter devant une boutique de souvenir. « Charlie, faut que je passe prendre des cartes et des cadeaux pour ma famille, je prends maintenant ou on repassera par là ? » Si Madame McGildroy ne recevait pas une carte de sa très chère fille, elle pouvait être sûre d'être punie pour la fin de l'été entier -même en Inde. 

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Les questions de la petite écossaise le gênent plus qu'il ne l'aurait pensé – peut-être parce qu'elles sont réalistes, qu'elle lui rappelle à quel point il est ridicule, lui adulte de presque trente ans à passer la plupart de ses soirées seul en compagnie de son chien. Cette manière qu'elle a de lui faire remarquer les choses a un côté triste. Lui aussi sait ce que c'est de ne pas avoir d'amis, il ne dira jamais que c'est moins dur pour quelqu'un parce qu'elle est plus jeune, plus enjouée naturellement ou plus active. La douleur reste identique pour chacun, il en est sûr, et même s'il ne lui dira pas de peur d'affoler, il espère que la situation finira par changer pour elle, qu'Andy se fera des amis et qu'elle ne passera pas toute sa vie comme lui à faire des rencontres éphémères pour rentrer contempler la solitude et tous ses défauts.

— Tu finiras par t'en faire Andy. Tu es une petite fille adorable, lui dit-il en souriant pour la rassurer. Il ne ment pas en affirmant cela, la Poufsouffle est gentille, et même si elle semble être difficile à supporter au quotidien, il ne doute pas qu'elle réussisse à trouver des gens comme elle pour lui tenir compagnie. Je-. Non, je n'ai personne. Alors qu'il devrait s'extasier devant l'étonnante ouverture d'esprit de cette enfant de treize ans, Charlie est choqué. Choqué de voir qu'encore une fois, on lui démontre sa navrante vie sentimentale, choqué de penser à cet instant précis qu'il devrait penser à ramener un souvenir à Automne pour la remercier de sa présence durant le mois précédent. C'est vrai que c'est marrant, enfin je suppose. Tu as des bases d'écossais ou pas du tout ? Il décide de penser à autre chose – c'est bien plus facile comme ça – et ils descendent les rues de Saint-Malo. On repassera tout à l'heure, on va aller boire un verre d'abord. Je connais un endroit super sympa, je suis sûr que tu vas aimer. Et c'est comme ça que Charlie et Andy se retrouvent devant Le café du coin d'en bas de la rue du bout de la ville d'en face du port.

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