Une boîte gay – quand est-ce exactement avait-il pu penser que ce n'était peut-être pas une si mauvaise idée ? Accepter (plus ou moins) sa bisexualité était une chose, se retrouver au milieu d'une boite gay en était une autre. Comment est-ce qu'il en était arrivé là ? La seule possibilité qu'il voyait était la suivante : bien qu'il soit relativement patient, Joan avait fini par se lasser d'entendre Raph lui proposer de sortir et avait fini par céder. Raphaëlle s'était mis cette drôle d'idée en tête d'être son co-pilote et peu importe ce qu'il pouvait dire, rien ne semblait pouvoir la faire changer d'avis. Il avait donc fallu se résigner.

« Je vais pas rester trop tard non plus, je bosse demain. » fit Joan, sans aucune conviction. Bien sûr, Raph n'allait pas le laisser s'échapper aussi facilement. Pas après avoir insisté si longtemps. « Mais tu m'avais pas dis que tu invitais quelqu'un, Raph. » Il ne vivait pas encore assez dans une grotte pour ignorer qu'il s'agissait de Nemo Desario – mais de ce qu'il savait, celui-ci n'était ni gay ni même bi. Mais après tout, il n'était pas obligé d'étaler sa vie sexuelle aux yeux de tous et chacun pouvait avoir des révélations plus ou moins tardive, Joan en était la preuve.

Raph ne tient clairement plus en place. Ça fait des mois qu'elle insiste auprès de Joan pour qu'il accepte de l'accompagner en soirée – le but final étant surtout de lui trouver un copain, elle adore le rôle de copilote – et elle est bien incapable de dire pourquoi l'ancien Serdaigle a fini par accepter à ce moment-là. L'important c'est qu'ils se retrouvent tous les trois dans cette boîte où elle adore passer ses soirées – parce qu'évidemment, elle a forcé son voisin à l'accompagner vu qu'il n'a rien de mieux à faire de sa vie. Elle lance un regard amusé au styliste qui ne fait bizarrement pas tâche dans l'ambiance – depuis le temps qu'elle le dit, qu'il serait dans son élément dans ce genre d'endroits.

— Oh c'est vrai ? J'ai peut-être oublié. Raph lance un regard amusé à Joan – elle espère que celui-ci n'a pas flashé sur Nemo Desario qu'elle sait entièrement hétéro pour le plus grand malheur de toutes les personnes qui se trouvent dans cette boîte. Je te présente Nemo, dit-elle sans lâcher le bras du mexicain qui ne doit pas être des plus joyeux de se retrouver dans ce plan foireux. Mais tu as dû voir sa tête de tombeur dans le journal. C'est mon voisin. Elle lance un grand sourire à son ami que la remarque doit sûrement amusé – il en a l'habitude avec elle et ça même s'ils ne se connaissent pas depuis si longtemps. Elle regarde son verre bien trop coloré – Raph peut boire tout et n'importe quoi à condition que ça soit beau, et celui-ci semble bien chargé en tequila, alcool qu'elle ne boit pas habituellement mais elle voulait simplement faire plaisir à l'ancien joueur de Quidditch à côté d'elle.

Il aurait dû se douter en voyant le sourire de la rousse sur son visage lorsqu'elle lui avait proposé de sortir. Il aurait dû sentir le mauvais plan venir, malheureusement, quand il capta le piège, il était déjà trop tard pour faire demi-tour. Se retrouver au milieu d'une boîte gay était un peu plus gênante qu'il l'aurait imaginé. Non pas qu'il soit homophobe ou fermé d'esprit, il pouvait déjà sentir le regard de certains sur lui et étrangement, il se doutait qu'il allait devoir faire attention à son postérieur. Cela dit, Némo n'était pas du genre à gâcher une soirée en boudant et retrouva facilement le sourire, même en tenant son cocktail fluo dans la main.  Après tout, c'était le moment de faire des rencontres et de passer un bon moment avec sa voisine préférée.

Le jeune homme qui accompagnait Raph, il ne le connaissait absolument pas, mais il supposa rapidement que c'était un sorcier étant donné que la rousse lui parla du fameux sorcière hebdo -une publicité dont il se serait bien passé. « Enchanté ! »  Un rapide sourire avant de boire un peu de sa boisson. Il se demanda rapidement si lui aussi avait été trompé par la plus âgée, où s'il était un habitué des lieux. Dans tous les cas, il n'y avait aucune raison de ne pas faire connaissance. « Désolé, mais Raph ne t'a pas présenté, tu es ? » Une question simple, qui lancerait peut-être une amitié.

Joan prit une gorgée du cocktail coloré pour faire passer toute cette expérience un peu plus facilement : Merlin sait qu'avec un peu d'alcool dans le sang, s'amuser est parfois bien plus facile. Et Joan en avait bien besoin, ça ne faisait aucun doute.

Heureusement, Raph était là ; se retrouver seul ou en tête à tête aurait été bien plus gênant et difficile à supporter, mais la rousse était là pour ne pas laisser de silence trop gênant s'installer.

« J'avais vu, oui, mais tu m'avais pas non plus dit que c'était ton voisin. » Il lui adressa un petit sourire – travailler sur le chemin de Traverse  permettait d'être un peu au courant des ragots etc du monde sorcier, mais pas d'informations comme celle-là.  « De même. Joan, je travaille sur le chemin de Traverse. » Bien loin de la gloire qu'on pouvait avoir d'être un ancien joueur de Quidditch, certes, mais Joan se satisfaisait clairement de ton petit statut qu'il parvenait à obtenir récemment. Il ne se plaignait pas. « Elle a insisté combien de temps pour que tu viennes ici – à moins que tu sois venu de ton plein gré ? » Lança-t-il, amusé. Difficile d'imaginer Nemo Desario foncer tête la première à l'évocation d'une boite gay. Ça ne collait pas trop au « personnage ».

Raph bouge un peu la tête au rythme de la musique – elle adore ce genre d'endroit, comme tous ceux où on peut faire la fête. Elle n'est pas sûre que ce soit déjà l'alcool qui la rend particulièrement joyeuse et elle espère qu'elle saura se modérer ce soir. Nemo est gentil, mais elle ne veut quand même pas lui donner une mauvaise image d'elle en dansant sur la table à leur première sortie de nuit. Elle se contente alors de sourire à tous ceux qui l'entourent – et plus particulièrement à la fille mignonne à l'autre bout de la pièce. Quel dommage qu'elle soit en couple et qu'elle ne puisse plus aller aborder toutes ses magnifiques personnes.

— Je te l'ai pas dit, ah bon ?, dit-elle sans grande conviction. Bien sûr qu'elle a omis ce détail, elle n'est pas totalement stupide. Elle sait très bien que quelqu'un comme Nemo attire les gens, et elle n'a aucune envie de voir débarquer une horde de fan dans son couloir alors qu'elle tente de se concentrer sur sa construction en lego. J'ai dû oublier. Elle lui fait un grand sourire. Il y a que toi que j'ai besoin de forcer ici Saddler. Et arrête de draguer Nemo, j'ai bien peur qu'il soit à 100% hétéro. Et si c'est elle qui le dit, ça doit vraiment être le cas.

Le troisième fanfaron de la soirée était apparemment vendeur sur le chemin de Traverse. Depuis son arrivée à Londres, il n’avais pas vraiment pris le temps de faire les boutiques ce qu’il devra bientôt faire avec l’approche des fêtes de Noël -d’ailleurs, il traînera sûrement la rousse avec lui. La réplique de l’autre l’amusa, il supposait que Raphaëlle était pareille avec tout le monde. « Disons qu’elle a juste omis de décrire les lieux. » Une tendance de plus en plus habituelle chez elle, mais heureusement Némo était quelqu’un de simple et pas prise de tête et il se contentera d’une soirée dans une boîte gay s’il le fallait. « Oui, mais je suppose que je ne le suis pas assez pour toi, pour me traîner ici. » Une boutade avant de boire quelques gorgées de son verre.

Naturellement, il balaya la salle des yeux, constatant certains regards masculins posés sur lui un peu partout. Des regards qu’il jugea préférable d’ignorer, histoire de ne pas se retrouver dans une situation trop gênante. Surtout qu’il avait encore la chance d’avoir les autres membres du trio de la soirée à ses côtés, un peu comme des gardes du corps. « Du coup, pourquoi tu nous as traîné ici ? » La question semblait anodine, mais le brun se demandait bien qu’elles étaient les motivations de la brune pour venir dans un endroit pareil.

Les couleurs criardes et le sucre du cocktail ne parvenaient pas à faire disparaître la désagréable sensation d’un liquide décidant de prendre le chemin des poumons au lieu de celui habituel qu’avait Joan, suite à la remarque de Raphaëlle : l’idée qu’il ait, éventuellement, pu draguer Nemo le fit s’empourprer furieusement et presque immédiatement. Heureusement que les lumières du bar laissait planer le doute sur la réelle couleur de ces joues à cet instant : peut-être s’agissait simplement des spots lumineux qui donnait une teinte rouge à ses joues. Il roula des yeux, presque outré et scandalisé que Raph pense qu’il était prêt à draguer n’importe quel individu de sexe masculin qui se présentait devant lui. Il n’était pas désespéré.

« N’importe quoi, Raph, je ne suis pas en train de draguer qui que ce soit. » Fit-il, fixant la rousse comme pour lui faire comprendre que ce n’était absolument pas son genre.  Néanmoins, il eut du mal à réprimer un sourire et à lui en vouloir réellement. « Ne prends pas tes désirs pour des réalités, ce n’est pas parce que tu rêves de me caser que cela va forcément arriver. » Ajouta-t-il avec un haussement de sourcil et prit une gorgée. Le styliste se tourna vers Némo – la moindre des choses étant de lui expliquer pourquoi ils étaient là. « Raphaëlle ici présente s’est mis dans l’idée de jouer les entremetteuses pour moi. » Un résumé clair, précis, concis, même si l’idée lui déplaisait encore.  

— Je te crois pas une seule seconde Joan, dit-elle avec un petit sourire moqueur en observant la réaction du styliste. La psychologue est moins stupide qu'on aurait tendance à le croire. Il y a une stratégie derrière le fait de présenter des garçons random à son ami – elle tente par tous les moyens de voir quel est le style du garçon. Après tout, si elle veut réussir à lui dégoter l'homme de sa vie, elle doit savoir quelles sont ses préférences et elle craint qu'une conversation avec l'ancien Serdaigle sur ce sujet ne ferait pas vraiment avancer les choses. Et j'y arriverai, tu peux me faire confiance. C'est l'une de ses plus grandes qualités – ce qui pour ses amis peut parfois se révéler être un défaut – mais la jeune fille n'abandonne jamais quand elle a une idée précise en tête.

Ne quittant pas la place à côté de Nemo, elle jette un coup d'œil aux filles dansant sur la piste. Elle connaît certaines d'entre elles – et s'en passerait bien. Elle se retient de lâcher un sourire – cette soirée serait plus cool si elle pouvait elle-même draguer quelqu'un mais elle n'a pas encore assez bu pour oublier qu'elle a une petite amie – quel dommage. Son regard se pose ensuite sur le barman – un garçon assez gentil avec qui elle a souvent eu l'occasion de parler.

— Les gars – oui, toi aussi Desario – vous le trouvez comment le serveur du bar ? Contrairement à certaines filles présentent dans ces lieux qui refuseront toujours d'émettre un avis sur un garçon, par principe, elle n'est en rien gênée. De ce fait, elle peut clairement affirmer que Nemo est le garçon le plus beau de tout le bar, et c'est pourquoi certaines personnes semblent prendre un certain plaisir à graviter autour de leur table. Il est plutôt mignon, non ? Oh, j'ai une super idée, dit-elle en tendant son verre vide à Joan. Tu vas aller lui faire la conversation, et me chercher à boire par la même occasion. Génial non ? Et un conseil, reviens pas sans avoir réussi, ou je te promets que tu le regretteras Saddler. Elle rigole un peu – elle serait bien incapable de lui faire du mal, après tout elle ne veut que son bien.

La raison de leur présence ici était de plus en plus claire et n’étonna pas un instant le mexicain qui rigola légèrement en étendant le plus vieux. « Tu as de la chance moi elle me traine à des réunions de boîtes de conserves. » Il faisait allusion à la conférence sur le magicien d’Oz où il avait accompagné la rousse et où il avait eu la chance de se faire collé par un mec déguisé en bonhomme de fer -une journée vraiment splendide. Il faisait de l’humour, tandis qu’il passa son bras autour de la jeune femme, histoire de faire reculer les jeunes hommes en chasse qui commençait dangereusement à s’approcher -se fichant bien de savoir si elle souhaitait draguer ou pas ce soir. Soudainement, elle proposa un sondage sur le barman et Némo ne tarda pas à tourner la tête en sa direction. « Bah écoute, pas mal. Il a l’air un peu sportif et tout, je suppose que ça le rend attirant. » Une conclusion qu’il venait tirer de lui même en voyant ce jeune blond lui faire un clin d’oeil au loin -il colla un peu plus raph à lui.

La rousse lança une sorte de défis à styliste, ce qui amusa grandement Némo qui était bien content de ne pas être à sa place. Jamais accepter la rousse en entremetteuse, un conseil qu’il se donna à lui même. « Elle rigole, si tu n’y vas pas elle t’invitera juste une bonne dizaine de fois et t’inscriras sur tous les sites de rencontres. » Un rapide sourire, histoire de lui faire comprendre qu’il était foutu et qu’il fallait mieux prendre son courage à deux mains et tout de suite.

Joan roula des yeux – Raphaëlle était incorrigible. « C'est beau de rêver. » lâcha-t-il avec un petit sourire amusé, mais résigné : Raph n'était pas prête d'abandonner, alors autant se prêter un peu au jeu et rendre les choses un peu moins désagréable. Peut-être qu'il finirai par avoir une excellente surprise. « Une réunion boîte de conserve... J'imagine que je m'en sors pas trop mal, en effet. » rigola-t-il.

Il se retourna pour laisser son regard détailler le serveur au bar, peut-être un peu trop longtemps pour que (super) Raphaëlle ne remarque rien. Le styliste reporta son attention sur ses deux compagnons de soirée, en haussant les épaule, l'air de rien. « Pas si mal, oui, j'avoue. » avoua-t-il en y jetant un nouveau coup d’œil, discrètement. « Pardon ? Raph ! Tu exagères ! » Il prit un air outré mais attrapa néanmoins le verre avec un sourire. « Mais bon... Demander un verre et faire une conversation, si ça peut m'éviter de recevoir des millions de lettres de prétendants parce que tu m'as inscrit sur je ne sais quel site... C'est un défi que je peux relever. Ce n'est pas si terrible que ça. » annonça-t-il – peut-être à la surprise de Raphaëlle, qui ne s'attendait sûrement pas à ce qu'il aille sérieusement abordé le serveur.

« Je reviens, alors. » fit-il avec un sourire, prenant la direction du bar et s'appuyant sur le comptoir, lançant la conversation avec le charmant barman. Il adressa un petit signe aux deux autres alors qu'il semblait déjà être en plein milieu d'un échange passionnant avec le serveur. Cela se passait, étonnement, bien mieux que ce qu'il aurait pu penser.

— Vous en avez pas marre de me faire passer pour une folle ?, demande la psychologue en souriant. Aucunement vexée par les insinuations de ses amis – elle en a l'habitude après tout – elle sourit en regardant le styliste partir en direction du bar. Elle se tourne alors vers Nemo, avec un regard presque suppliant. Nemo, on va danser ? S'il te plaît, s'il te plaît, s'il te plaît. La rousse a conscience d'être un peu insistante et n'attend pas vraiment la réponse du mexicain pour lui prendre la main et l'attirer vers la piste de danse où des hommes rêvent sûrement de se coller à l'ancien joueur de Quidditch.

Les chansons passent et la Galloise explose plusieurs fois de rire en voyant les têtes déprimés des garçons lorsqu'ils finissent pas comprendre qu'ils n'ont aucune chance avec le mexicain. Elle finit par lancer un coup d’œil en direction du bar. Aucune trace de Joan, ni du serveur qui semble avoir terminé son service. Un énorme sourire s'affiche sur le visage de Raph alors qu'elle saute sur place comme une gamine.

— J'en connais un qui a réussi à pécho. Elle est bien trop heureuse pour son propre bien – alors qu'elle va rentrer seule dans son lit ce soir – mais elle se fait difficilement l'idée que son ami puisse avoir rencontré quelqu'un. Enfin, au bout de plusieurs mois d'acharnement, Joan a enfin réussi a couché avec quelqu'un grâce à elle. Mon dieu, Nemo, je suis géniale, totalement géniale. Elle rigole, Raph est plutôt du genre modeste habituellement mais aujourd'hui est l'exception. Et devine quoi ? Tu seras le prochain !

Après avoir vaguement débattu sur qui était le moins bien logé des deux hommes, le plus âgé se décida enfin à tenter sa chance avec le barman, laissant les deux voisins ensemble. Et comme pour porter bonheur à l’autre, il termina rapidement son verre. Sans tarder, la jeune femme demandait une danse et le brun ne pouvant rien lui refuser accepta de bon coeur, espérant au passage ne pas se faire sauter dessus sûr la piste de danse. Rapidement, il se prit au jeu et ne comptait plus les chansons, profitant pleinement de sa soirée, bien qu’il guettait de temps en temps les hommes qui s’approchaient trop proche de lui. Au bout d’un moment, Raphaëlle remarqua la disparition du leur acolyte de la soirée, ainsi que celle du barman et jugea que sa mission était réussite. « Et bah, il en a de la chance. » Un ton presque ironique avant de rigoler.

L’enthousiasme de la rousse le faisait vraiment rire, parce que cela montrait à quel point elle était bienveillante avec le reste du monde. Enfin ça, c’était une qualité qu’il appréciait, surtout quand ça ne le concernait pas lui et sa vie sentimentale, ce qu’elle prévoyait apparemment d’aborder. « Hors de question ! » Némo ne comptait pas un instant que se voisine joue les entremetteuse avec toutes les filles qu’ils pourraient croiser un peu partout et se contenta pour la distaire de lui attraper la main pour la tirer vers le bar. « Du sport oui, mais il ne faut pas oublier de se désalterer. » Un sourire avant de commander deux verres, soupirant devant le clin d’oeil du gars qui se trouvait juste à côté de lui. Une chose était sûre, s’il voulait vraiment être en couple, il pouvait toujours changer de bord.