« Seamuus attends moi ! » La nuit n'est pas encore tombée sur Dublin, mais Galaad et son fidèle compagnon de beuverie - nous avons nommé Seamus Finnigan - sont déjà de sortie. A la recherche d'un pub où se réchauffer bien sûr. Car en Décembre, le fond de l'air est frais. Galaad ne peut toutefois s'empêcher de traîner - ça fait des années qu'il n'a pas mis les pieds dans la capitale irlandaise. Ils y étaient bien allés en famille, mais il était petit à l'époque ... Et il avait tout oublié de l'ambiance intemporelle de la ville, de l'odeur de friture et de ketchup qui traînait dans toutes les rues. Pas de doute, il adorait ça.

« Seam', je sais que t'es pressé de descendre une pinte - ou douze d'ailleurs - mais je profite aussi du paysage » fait-il mine de râler quand il rattrape l'intéressé, juste à l'entrée de Temple Bar. En vérité, il se sent plus que reconnaissant à l'égard de l'irlandais. Son invitation chez sa grand-mère lui évite de passer Noël tout seul, à garder les murs de la coloc' - car malgré tout son amour pour Antinea, pas question qu'il aille passer les fêtes en famille. Ce n'est pas parce qu'il n'a pas croisé Selena depuis une éternité qu'il a envie de se la coltiner pendant une semaine. Pas plus que les années précédentes. L'invitation de Seamus tombait donc à pic, surtout précédée d'une paire de jours à Dublin pour sortir faire le tour des pubs.

« T'as l'air de savoir où tu vas. On teste lesquels ce soir ? » s'informe Galaad en passant son bras autour des épaules de son compagnon. A les voir tous les deux, on pourrait se demander s'il s'agit d'un couple ou juste de frères. La confusion est compréhensible, car la réponse elle-même est double. Mais aucun des deux ne s'encombrerait l'esprit à mettre des étiquettes sur leur relation - ils sont bien trop occupés à boire et à sortir pour ça. D'ailleurs, le brun ne tarde pas à suivre son guide dans un des nombreux pubs de la ville. L'ambiance chaude et bruyante lui saute au visage et, tout de suite, un sourire éclaire son visage. Il se sent à la maison - bien plus qu'à Belfast en tout cas.

Un tabac roulé calé entre les lèvres, Seamus se retourne pour lancer un regard désespéré à son colocataire qui ne semble pas partager son envie très pressante d'une bonne pinte de Guinness. Pourtant, il ne dit rien, se contentant de lâcher un simple soupir.

La réaction de Galaad est tout à fait naturelle à ses yeux, celui-ci lui a dit qu'il est rarement venu dans la capitale de leur beau pays – contrairement à lui qui a passé des nuits entières dans ces pubs en compagnie de ses cousins. Il a donc sauté sur l'occasion quand le guitariste a annoncé qu'il ne rentrait pas chez lui pour les fêtes pour lui proposer de passer du temps avec lui en Irlande – une tournée des bars de Dublin avant d'aller réveillonner chez sa grand-mère qui avait été ravie par la nouvelle. La matriarche de la famille Finnigan avait toujours adoré les amis de son petit-fils, et plus particulièrement quand ceux-ci sont irlandais, et elle avait désormais hâte de rencontrer celui que Seamus avait présenté comme un martyr venu d'une Irlande toujours soumise au royalisme anglais. Lui se contente d'être heureux à la perspective de se saouler avec son ami le soir de Noël. Il a été après tout celui que l'arrivée imprévue de Galaad à la colocation a le plus réjoui, et ça bien qu'il ait dû partager son lit. Il y a gagné ce qu'on fait de mieux en matière de frères de beuverie, un irlandais flemmard qui tente sa chance en jouant dans un groupe de rock.

— Qu'est-ce que tu peux être lent, finit par lâcher Seamus une fois que Galaad l'a rejoint. Je sais que c'est beau, mais rappelles-toi que j'ai rien bu depuis au moins une heure. Une durée presque criminelle d'après l'irlandais qui rêvait depuis plusieurs jours de cette soirée dans la capitale. Son habituel sourire revient presque immédiatement alors que l'ancien Serpentard commence à s'intéresser au planning de leur soirée. Tous, quelle question. On est à la maison Galaad, la bière est meilleure ici qu'en face. Seamus décide de se taire avant de partir dans une multitude d'explications sur pourquoi l'Irlande est le plus beau pays que la terre ait porté. On va commencer par celui-ci, dit-il en rentrant dans un pub pour aller commander deux pintes et se poser à une table. La chaleur de la pièce, l'odeur de tabac et le bruit qui y règne le rendent définitivement de bonne humeur. Ah, j'ai l'impression d'être au paradis, lâche-t-il en rigolant.

Galaad acquiesce avec un enthousiasme non feint à la remarque de Seamus. « Ça c'est clair ! C'pas demain la veille que les rosbifs arriveront à brasser une stout correcte. Ou à faire un bon whisky, d'ailleurs. » Sa ferveur fait plaisir à voir. Contrairement à son compagnon de beuverie préféré, il ne passe pas son temps à agiter son patriotisme et son amour pour l'Irlande sous le nez des gens ... mais ça ne veut pas dire qu'il manquera d'arguments si on le lance sur le sujet. Il suit Seamus dans le pub déjà bien encombré - bien sûr, les irlandais sont les premiers à profiter des vacances pour sortir dans le bar le plus proche. Tout comme son colocataire, il se fraye un passage jusqu'au comptoir et demande une pinte de Guinness avec l'aisance que confère l'habitude.

C'est donc avec un peu plus de prudence qu'il fend la foule de dublinois déjà plus ou moins imbibés, jusqu'à trouver une petite table de libre - presque un miracle, à cette heure d'affluence. « Tes cousins comptent nous rejoindre ? » se renseigne-t-il une fois que Seamus et lui sont installés. Même si ces derniers les hébergent, Galaad ne sait pas trop quel est leur avis sur la relation un rien ambiguë qu'il entretient avec son colocataire. Car malgré tout le bien qu'il pense de l'Irlande, l'ex-Serpentard est conscient que la tolérance n'y est pas présente partout. Il doute cependant que quiconque dans la famille Finnigan puisse être étroit d'esprit - il suffit de voir la facilité avec laquelle la matriarche a accepté qu'il vienne squatter pendant les fêtes de fin d'année.

Il savoure sa première gorgée de Guinness - un des dix petits plaisirs de la vie quotidienne avant de réagir à l'affirmation de Seamus, grand sourire à l'appui. « C'est le paradis mon gars. La meilleure ambiance de la terre. » Le monde pourrait s'écrouler que Galaad ne quitterait pas son tabouret - mais ce n'est pas très rare, le concernant. Non loin sur leur droite, il aperçoit deux musiciens s'installer, et se prend à rêver d'être à leur place. Mais les Green Brothers n'en sont pas encore tout à fait là. Comme Balth ne cesse de leur répéter, il faut qu'ils travaillent - encore et encore - s'ils veulent espérer percer un jour.

Plus que dans leur chambre de l'appartement à Pré-au-Lard, les deux Irlandais sont ici chez eux – et ça, Seamus en a la conviction à chaque fois qu'il remet un pied sur le territoire irlandais. Parfois, les gens s'interrogent sur son amour pour son pays natal, bien trop démesuré pour un garçon qui a hélas vécu presque un tiers de sa vie chez l'ennemi écossais. Les arguments ne manquent pas, et il se doute que son ami en a tout autant que lui, peut-être même plus justifié, et pour ça, il le remercie intérieurement – comme pour avoir rétabli un certain équilibre dans le ratio irlandais – anglais de  la colocation.

— T'as raison. Ce sont des incapables, dit-il d'un ton un peu trop sérieux. Tout le monde connaît l'aversion que le plus jeune porte aux anglais – ce n'est un secret pour personne, il laisserait brûler leur gouvernement s'il le pouvait, ou du moins c'est ce qu'il affirme lorsqu'il a trop bu. Mes cousins ? Les mêmes chez qui ils dorment après un court appel les suppliant de l'héberger lui et un ami pour quelques jours. Évidemment, ils n'ont pas réellement eu le choix. Chez les Finnigan, le simple fait d'envisager de refuser un lit à une personne de la famille est considéré comme la pire de toutes les trahisons. Ils passeront sûrement plus tard dans la soirée, ouais. Tu verras, ils sont assez sympa. De toute façon, ils ont pas le choix, dit-il en rigolant. La nouvelle de son homosexualité annoncée l'année précédente n'a bien sûr pas réjoui toute la famille – il l'avait plus que prévu – mais le fait que sa grand-mère menace implicitement toute personne le rejetant a aidé les choses à garder une normalité presque inespérée. Et puis, c'est pas des Justin, si tu vois ce que je veux dire.

Il rigole un peu – son homophobe et raciste de colocataire est un sketch à lui tout seul au sein de l'appartement, souvent rejoint dans ce spectacle que Seamus apprécie particulièrement par les deux autres irlandais qui  prennent part au combat. Lui se contente naturellement de compter les points, même si cela ne l'empêche pas régulièrement de prendre parti. Des histoires comiques avec l'ancien Poufsouffle, ils en ont tous – dont une qu'il n'a jamais pris la peine de raconter à son compagnon de soirée.

— En fait Galaad, je t'ai jamais raconté ce qui s'est passé avec Justin, un peu avant que tu arrives, si ?, demande l'irlandais avec un petit sourire. Il sent que l'histoire va faire bien rire le plus âgé – de toute façon, toute raison est bonne pour se moquer de l'anglais fan des sabres lasers. Tu auras de quoi te moquer de lui éternellement là. Il doute que Galaad en ait besoin pour ça mais il a confiance en l'irlandais pour utiliser cette nouvelle arme de la meilleure façon qu'il soit.

Galaad hoche la tête en écoutant la réponse de son colocataire. Il est à  des années lumières de culpabiliser pour leur arrivée de dernière minutes chez les cousins de Seamus. Voguer de canapé en canapé pendant plusieurs mois a fait disparaître toutes ses réticences à ce sujet - si tant est qu'elles aient un jour existé. « Ils ont pas le choix ..? » réagit-il en fronçant les sourcils. Avant de réaliser que Seamus fait sans doute référence à sa grand-mère, qui ne doit pas être très encline à pardonner les écarts homophobes des Finnigans. « Hum... Je vois. Il me tarde de les rencontrer alors. » Surtout si, comme l'affirme Seamus, ils ne sont pas des Justin. L'expression elle-même l'amuse. Comme si leur abruti de colocataire était devenu une nouvelle unité pour mesurer l'imbécilité et l'intolérance. Ce qui se justifiait plutôt bien, d'ailleurs ...

Depuis que Galaad a rejoint la colocation - ou s'y est incrusté, pour être parfaitement exact - il a fait de rappeler quotidiennement à Justin son étroitesse d'esprit, sa nouvelle mission sur terre. Malgré ses moqueries, Seamus n'est toutefois pas aussi impliqué que lui dans cette tache, et se contente souvent de compter les points sans trop participer au débat. Heureusement, Sybella est toujours là pour enfoncer un peu plus l'ex-Poufsouffle, même si elle ne pousse pas le vice jusqu'à le soutenir directement. Car quoi que fasse Galaad, la blonde ne semble pas vouloir lui pardonner sa vieille incartade avec Gaya. Une situation qu'il a bien cherché cela dit - sauf qu'il ne s'en rend pas vraiment compte ...

« Mmh non, ça ne me dit rien » répond-il à Seamus, un sourire venant déjà étirer ses lèvres. Il ne manquait jamais de bonnes raisons de se moquer de Justin, mais n'était pas contre un petit peu de renouvellement. Surtout si ce dernier exploit était aussi exceptionnel que son compagnon de soirée le laissait imaginer ... Il avait beau savoir que Justin était capable du pire, il lui arrivait encore, parfois, de se faire surprendre. En revanche, il ne s'était jamais lassé. « Vas-y, je t'écoute » fit-il en prenant une nouvelle gorgée de bière, sa voix commençant déjà à trahir un éclat de rire.

Seamus ne peut s'empêcher d'avoir un sourire satisfait alors qu'il boit tranquillement sa bière. Ses vacances – ou plutôt, cette période de fêtes de fin d'année vu qu'il n'a pas travaillé depuis plus de six mois – s'annoncent particulièrement bonnes. Il se roule tranquillement un nouveau tabac alors qu'il écoute Galaad réaliser le confort de sa situation familial. Bien sûr, l'ancien gryffondor choisit de taire tous les petits incidents qu'il y a eu, en grande partie parce qu'il préfère voir essentiellement le bon côté des choses. Il ne voit de toute façon pas l'intérêt de les rabâcher sans cesse – beaucoup ont des problèmes plus graves, et le serpentard face à lui en fait sûrement partie. Il laisse son dos tombé contre le dossier de son siège alors qu'il allume enfin son tabac avec un petit soupir de contentement. Il voit à la tête de Galaad que celui-ci s'attend au pire du pire – chose tout à fait naturelle lorsqu'il s'agit de Justin. L'irlandais prend une grande inspiration, histoire de ne pas exploser de rire avant d'avoir commencé son récit et ça bien que le simple souvenir de ce moment suffise à le rendre hilare.

— Alors comment dire, dit-il avec un sourire moqueur. C'était un peu avant que tu arrives à la coloc, pendant les vacances et tout. L'irlandais se rappelle très bien de la scène qui a eu lieu en fin d'après-midi, alors que personne d'autre n'étaient à l'appartement – une chance pour l'anglais vu que ça lui a permis d'éviter des preuves photos de ce moment spécialement gênant. On était en train de se boire une bouteille et tu sais à quel point il tient pas l'alcool. Seamus observe attentivement le visage de Galaad pour ne pas rater une miette de sa réaction. Et là, ce con me sort qu'il se fiche que je préfère les mecs tant que je tombe pas amoureux de lui. Seamus rigole un peu – l'idée de tomber amoureux lui est particulièrement étrange, et l'entendre de la bouche de Justin a été un des moments les plus drôles de sa vie. Enfin bref, je lui sors que de toute façon il est pas du tout mon genre. Et ça, Galaad est bien placé pour le savoir vu que Justin et lui ne jouent pas du tout dans la même catégorie. Tu aurais vu sa tête. Je te promets, il comprenait pas mais genre pas du tout, un peu comme un gosse à qui on explique que le père Noël existe pas. Plus il raconte ce qui s'est passé, plus il se dit que Justin a quand même du talent pour rendre la situation encore plus drôle l'instant d'après. Il avale une gorgée de sa bière en rigolant. Hilarant non ? Et devine quoi ? La suite est pire !, s'exclame-t-il. Il regarde son ami en terminant sa cigarette, persuadé que celui-ci adore cette petite histoire qui fait passer leur colocataire pour un boulet fini.

L'histoire commençait fort. Mélanger un Justin homophobe au possible, un Seamus encore plus gay, le tout avec une bouteille d'alcool dans le coin ... La suite ne pouvait qu'être hilarante. Surtout que Galaad était bien placé pour savoir que leur abruti de colocataire ne tenait absolument pas l'alcool : il avait eu de multiples occasions de s'en rendre compte, lorsque son amitié avec Hannah lui permettait de s'incruster dans des fêtes organisées par les Poufsouffles. Il eut un sourire un rien nostalgique lorsque ces souvenirs - teintés de Justin affalé dans un coin en train de l'insulter à distance - lui revinrent en mémoire. Mais il n'allait tout de même pas regretter Poudlard. Sa nouvelle situation était plus avantageuse : par exemple, il n'avait même pas à faire semblant d'avoir loupé le réveil.

Envisager Seamus tomber amoureux de Justin le fit exploser d'un rire si bruyant que quelques piliers de bar attablés plus loin se retournèrent avec une moue mi-amusée mi-surprise. Galaad ne les remarqua pas, trop occupé à savourer son hilarité. Seamus amoureux de Justin. Mais bien sûr. Il n'était même sûr qu'il puisse exister un monde parallèle où ce scénario serait envisageable. « Ce type est incroyable. Il est toujours encore plus con qu'on le croie. » Quand ils en venaient à parler de Justin, Galaad ne manquait jamais de faire honneur à son statut de Serpentard en devenant une véritable langue de vipère. Seamus embraya en lui détaillant sa réponse - honnête mais sans aucun doute plus aimable que celle qu'aurait eu Galaad à sa place. Ce dernier n'avait néanmoins pas de mal à imaginer la tête qu'avait dû avoir Justin en entendant les mots "pas mon genre".

Il était su de tous que Finch-Fletchley était totalement imbu de lui-même. Le type de personne qui s'imagine faire partie des rêves de tout le monde ... C'était précisément un de ses aspects qui l'avaient rendu aussi insupportable aux yeux de Galaad. Mais bon, il n'était pas du style à ouvrir lui-même mes hostilités, et à ses yeux, la relation tumultueuse qu'ils avaient aujourd'hui était indubitablement du fait de Justin. Après tout, ce n'était jamais sa faute ... Toujours hilare, il essaya d'imaginer ce qui avait pu suivre. Connaissant l'ex-Poufsouffle, il pouvait s'agir du pire. Et au vu de l'étincelle malicieuse qui faisait briller le regard de Seamus, c'était sans doute mieux encore. Tout en réfléchissant, l'irlandais bu une nouvelle gorgée de bière.  « Oh, je sais ! » s'exclama-t-il soudain.  « Il s'est mis à poil pour te faire changer d'avis ! » Il l'avait dis tellement fort qu'il entendit quelques occupants du pub rire derrière lui.

Malgré ce que laisse sous-entendre la scène se déroulant dans le petit pub irlandais, Seamus apprécie beaucoup Justin. Pour lui, l'ancien Poufsouffle est vrai ami – voire un frère, à un niveau certes inférieur à celui de Dean, mais un frère quand même. Mais cela ne l'empêche pas de le trouver stupide dans certains moments, comme celui qu'il raconte à l'instant. Justin pourrait avoir toutes les qualités du monde, son homophobie quasi permanente est véritablement lourde au sein d'une colocation où vivent un gay et un bisexuel dormant dans le même lit. Dommage pour Justin, les choses sont loin de tourner en sa faveur, vu que son seul hypothétique soutien refuse de prendre son parti – qui aurait cru que Sybella le détesterait au point de ne pas l'aider contre Galaad. Et Seamus dans tout ça se contente de rester neutre par moments, refusant de se mettre qui que ce soit à dos. Justin risquerait de lui faire une crise pendant des semaines – ou des mois – et se disputer avec Galaad, même s'il pense que c'est impossible, ne lui faciliterait pas la vie. Mais Seamus reste lui-même, et il ne peut s'empêcher de le relever quand l'anglais est con.

— Exactement ! Il a retiré son tee-shirt, dit-il encore hilare. Il n'est même pas étonné que Galaad ait deviné cette partie tellement elle est représentative de Justin bourré. Le garçon n'est pas méchant, mais parfois si prévisible. Il suffit d'envisager la pire connerie et il y a au moins trois chances sur quatre pour qu'il la fasse. Tu comprends. Il voulait absolument me montrer ses muscles. L'irlandais suppose que pour une personne préférant ce type de garçon, Justin ne doit vraiment pas être moche mais même quelques mois après cet événement, il ne change pas d'avis. Mais c'est pas tout. Il sourit à l'autre irlandais qui semble adorer cette histoire au point de faire participer les piliers de bar. Il attrape son verre pour boire une grande gorgée de bière – il faut bien la terminer pour aller s'en prendre une autre. Après, tu me connais. Je suis gentil, toujours prêt à aider mes potes donc je lui ai expliqué pourquoi il était pas mon genre. Seamus n'est pas sûr que ça aide vraiment quelqu'un d'entendre une chose pareille mais il s'en fiche. Il faut bien que Justin descende de son petit nuage de temps en temps. Et comme j'ai fait l'erreur de dire qu'il embrasse mal- Il galère à finir sa phrase tellement il rigole. La scène repasse en boucle dans sa tête – un Justin torse nu sur le canapé qui l'embrasse pour lui prouver qu'il est doué là-dedans. Ce boulet m'a embrassé. Je te jure Galaad ! Il l'a fait pour de vrai. J'en pouvais plus. Et lui, il était en mode oh non, qu'est-ce que j'ai fait ? Le moment le plus drôle de ma vie, je te promets. Seamus sourit en guettant la réaction de son ami, qui doit aussi trouver ça encore plus drôle que lui.

Galaad échappa un sourire de victoire quand Seamus confirma ses dires. Il n'avait pas beaucoup de mérite, cela dit : après une dizaine d'années à se chamailler avec Finch-Fletchley - depuis son entrée à Poudlard en fait - il avait appris à connaître chacun de ses petits travers. L'amour que l'anglais se portait arrivait sans conteste en tête de liste. « Te montrer ses muscles ? » répéta l'irlandais avec une grimace un rien exagérée. Bon, il pouvait difficilement blaguer sur ce point : Justin était forcément en meilleure condition physique que lui, ne serait-ce qu'en passant moins de temps à squatter le canapé. Et puis Galaad aurait beau ne jamais l'avouer, il ne disait pas non à un garçon avec un peu d'abdos ... Tant que le mec concerné n'était pas Finch-Fletchley bien sûr. Son homophobie latente suffisait amplement à rendre l'anglais repoussant.

Galaad était tellement occupé à attendre la suite de l'histoire qu'il ne touchait même plus à sa bière. Ce ne fut qu'en voyant Seamus terminer la sienne qu'il se rappela que sa choppe traînait sur la table, à demi entamée. Il l'attrapa pour lui régler son sort, mais son compagnon avait repris son récit, et la pauvre Guinness dut rester suspendue entre la table et son visage. Il acquiesça quand Seamus expliqua vouloir aider ses potes. Ça, c'était clairement une de ses plus grandes qualités. Même si l'irlandais aurait aimé que son compatriote prenne parfois parti pour lui, il devait reconnaître que sa neutralité et son bon vivant étaient rassurants. Au moins, il ne craignait pas de le voir se retourner contre lui - pas comme Sybella qui, même si elle le rejoignait contre Justin, attendait toujours de pouvoir planter un couteau dans son dos.

Le sourire de Galaad s'agrandissait au fur et à mesure que Seamus avançait dans ses souvenirs de la soirée. Il sentait venir une chute phénoménale. Et il ne fut pas déçu. « Il t'a embrassé ? Sérieusement ? » L'irlandais éclata de rire, faisant à nouveau se tourner quelques têtes. « Ce mec ne doute vraiment de rien. » Il secoua la tête d'un air incrédule. Un Justin sobre était déjà capable de coups d'éclats parfaitement ridicules et inattendus, mais un Justin saoul ... c'était sans comparaison possible. « Eh mais ça veut dire que je l'ai indirectement embrassé, du coup » réalisa-t-il à haute voix, avec une moue dégoutée. Il réfléchit quelques instants, avant d'ajouter. « Tu me diras, c'était déjà le cas avec Gaya. Enfin ... s'il a réussi à l'embrasser, et j'en serai pas si sûr. »

Galaad est définitivement bon public. Même Sybella n'a pas autant rigolé quand il lui a raconté cette histoire qui pourtant vaut le détour. Il ignore ce qui est passé dans la tête dans l'anglais à ce moment-là mais ce n'était sûrement pas une réussite. Il s'est foutu une honte monumentale mais ce n'est pas vraiment Seamus qui le jugera. Malgré tout ce qui a bien pu se passer, il adore Justin bien que celui-ci lui en veuille toujours d'avoir donné un lit à Galaad. Bien sûr, l'irlandais devrait être blessé par les remarques homophobes de son colocataire – celles-ci se font de plus en plus nombreuses depuis que l'ancien Serpentard les a rejoint à l'appartement, mais il n'a pas l'envie de se prendre la tête pour si peu. Tant que Justin ne vient pas lui poser de questions sur la nature de sa relation avec le plus âgé – ce qui est d'ailleurs plus la spécialité de Dean, le poufsouffle ne donnant pas l'impression d'avoir envie de connaître ce qui se passent entre eux avec précision. Dans tous les cas, Seamus n'aura jamais la moindre réponse, pas plus maintenant qu'il y a deux mois. Ce n'est pas parce qu'il vient passer les fêtes dans sa famille qu'ils sont ensembles, en couple. À vrai dire, le plus jeune se doute qu'ils n'auront jamais ce genre de statut, ce qui est loin de lui poser de problèmes. Il est persuadé qu'une conversation du genre rendrait bien plus compliqué leur relation, et ça sans la moindre raison. Galaad et lui sont très bien comme ça, à boire des bières dans des bars, fumer, coucher ensemble quand ils ne sont pas trop morts pour ça, et rire beaucoup.

— Non, de rien, dit-il en se roulant un tabac en rigolant. Il n'aurait jamais pensé que Justin irait jusqu'à l'embrasser pour tenter de prouver quelque chose de non réellement défini. Mais l'alcool fait des ravages chez les jeunes qui n'ont pas l'habitude d'en boire ou qui tiennent aussi peu que leur colocataire. Il écoute en allumant tranquillement sa cigarette les idées qui germent dans les idées de Galaad et qui le font d'ailleurs beaucoup rire. L'ancien Serpentard a toujours des idées à revendre quand il s'agit d'embêter Justin – ou mieux de le dégoûter. Il imagine déjà la réaction de l'anglais si on lui dit une chose pareille – tu as embrassé Galaad indirectement – il risque la crise cardiaque et ils auraient plutôt intérêt à l'amener en urgence à Sainte-Mangouste. Mais dans sa grande gentillesse, Seamus préfère couper court au délire de son partenaire de beuverie, en lui rappelant une réalité bien moins drôle. Non mais arrête, parce que ça va devenir malsain. Il le regarde avec un sourire amusé, présentant clairement la connerie qu'il s'apprête à sortir. Je te rappelle que tu t'es indirectement tapé ta sœur du coup, ça se passe comment ? Il rigole un peu. Il y a bien qu'avec Galaad qu'il peut rire d'une chose pareille, son ami étant loin d'être réellement prise de tête et ayant plutôt l'habitude de piquer les copains de sa cadette. Et pas qu'une fois en plus. Vu tous les mecs que tu t'es tapé, tu dois vraiment vouloir être proche d'elle là. Seamus n'est pas sûr qu'Antinea aimerait se raisonnement, surtout qu'il sait que la jeune fille déteste que son frère fasse ça – bien qu'il pense qu'il est plus intelligent d'en rigoler.