Last night I did things

my mother told me not to with the people I shouldn't see

« Promis Timofei, c'est la dernière fois qu'on dort dehors. » Inga serre le chat contre elle pour se donner du courage – il miaule un peu en réponse, l'air un peu contrarié d'être baladé de squat en squat depuis quelques semaines. Certes, elle a un salaire, mais pas encore suffisant pour payer un loyer, et les chambres d’hôtel la ruinent rapidement. « Tu auras peut-être même des repas de qualité. » Ce matou n'est décidément pas un chat des rues, non ; il préfère de loin se prélasser sur un fauteuil, un matelas, une étagère, que de traîner dans des rues pas forcément des plus fréquentables. Mais ce pauvre Timofei aime trop sa maîtresse pour la quitter. La russe dépose un baiser sur le haut de la tête de l'animal, prends son courage à deux mains et pénètre dans l'immeuble.

Il est sûrement une heure totalement déraisonnable pour rendre visite à quelqu'un – le fil des heures échappe à Inga, elle n'y prête plus attention. Les talons de ses chaussures se calent sur le rythme assourdissant de ses écouteurs, ils résonnent contre le sol lorsqu'elle montre les marches – elle jette à peine un coup d’œil aux numéros, cela fait des jours qu'Inga tourne autour sans jamais rien oser. Le courage ne fait ni partie de ses qualités, ni de son vocabulaire, et pourtant la voilà devant la porte.

Il suffit de tendre le bras, appuyer sur la sonnette – un geste tout simple, Inga a même le doigt à quelques centimètres. Elle se mordille les lèvres, inspire et presse le bouton sous le regard attentif du félin.
Mentalement, elle compte. Elle recule, s'appuie contre le mur en face, la boule au ventre. Inga peut toujours faire demi-tour. L'escalier l'appelle. Elle n'est clairement pas prête pour affronter sa famille, non – même une toute partie, quelqu'un qui ne l'aurait pas vu depuis longtemps.

La blonde tourne les talons, hésite encore. Elle finit par s’asseoir sur le haut des marches,  tournant le dos à la porte. Inga dépose son sac et laisse Timofei se balader. Dans le pire des cas, elle pourra passer la nuit là, sur le palier. Sa tête se balance lentement au rythme de la musique – si Inga ferme les yeux, le monde semble disparaître.
Elle soupire et se retourne – juste au même moment où la porte, et Inga se relève lentement pour faire face à Nikolai.

« Je passe un peu tard, pardon. » Inga attrape son sac et se rapproche de la porte. « Ah.. – Inga, ta cousine, filleule. » précise-t-elle, incapable de savoir si Nikolai se souvient d'elle. De toute manière, elle avait sûrement beaucoup changé depuis la dernière fois qu'il l'avait vu - et il ne l'a peut-être même pas reconnue.

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My girl, my girl, where will you go

I'm going where the cold wind blows

Il ne comprend pas Nikolaï, quand la sonnette de son appartement sonne à deux heures passées. Lui ne dort pas – comme à son habitude, il boit une dernière tasse de thé dans lequel il rajoute une bonne dose de vodka pour faire passer la journée, pour dormir convenablement. Le bruit l'étonne, il n'est finalement pas si habitué que ça à l'entendre. Dimitri ne se gêne pas et transplane directement dans son salon, il ne prendrait pas la peine de sonner. Pas une fois en tout cas, de façon si claire et si nette. Il écraserait le bouton une bonne dizaine de fois pour être sûr de l'avoir dérangé avant de changer d'étage, de rejoindre Vladimir pour une soirée beaucoup plus intéressante. Le dernier de la fratrie ne prend même pas la peine de passer le voir à une heure pareille. Tout le monde à mieux à faire – dormir, s'amuser, peu importe. Rien ne justifie ce bruit inhabituel. Le russe attrape son revolver dans la poche de son trench-coat accroché à côté de la porte avant de l'ouvrir lentement.

Il n'y trouve pas d'ennemi, aucune personne qui ne pourrait le nuire, aucun danger potentiel. Juste une fille aux cheveux beaucoup trop blancs et son chat – un chat russe, sibérien, la même race que Pacha. Il la regarde sans comprendre, ce visage lui dit lointainement quelque chose, un souvenir trop vague qui lui semble dater de l'époque où il ne vivait pas encore sur le sol anglais. Puis vient le prénom, l'explication. Il contemple sans être capable de prononcer le moindre mot cette personne perdue de vue depuis des années, cette fille qui a fugué sans jamais trouver le courage de revenir à la maison. Il sait, sa tante lui écrit tous les ans depuis le fameux événement, elle lui demande de faire attention, au cas où il la croiserait aux alentours d'une année. Il ne l'aurait jamais reconnu, réalise-t-il soudainement, si elle ne s'était pas présenté, il n'aurait jamais remis sa filleule. Inga Toma Bolgarov se tient devant lui et il ignore quoi faire.

— Entre, dit-il en se s'éloignant de l'entrée pour la laisser passer. Il ferma la porte derrière elle. Il lui aurait bien dit de descendre, d'aller chercher un refuge chez Vladimir mais pour sa tante il ne peut pas le faire. Leur famille est bizarre par ses différences d'âge et si c'est bien sa cousine qui se tient devant lui, c'est de la mère de celle-ci dont il a l'âge. Ils ont été proches, il lui doit au moins ça, s'occuper de sa fille – et qui sait, peut-être tenter de lui renvoyer. Tu es à Londres depuis combien de temps ? Tu as fait faim ? Soif ? Le chat ? En temps normal, il aurait peut-être fait un effort pour paraître plus accueillant Nikolaï, mais il est toujours deux heures du matin et il ne se sent pas capable d'un tel exploit. Il préfère penser logique – logique et pratique, il accumule les questions utiles. Le reste – les salutations ou autres moments d'effusion – viendront peut-être plus tard, ou pas. Il pose le pistolet sur la table basse avant de la dévisager. Tu as beaucoup changé, je t'aurais pas reconnu. Lui aussi, comme ses deux frères, il suppose. Il est incapable de se rappeler depuis combien de temps il n'a plus vu l'enfant. Et pourtant, il en fait régulièrement, des allers-retours en Russie. Tu as besoin de quelque part où dormir ? J'ai une chambre d'amis de libre. Il ne peut pas la mettre à la porte, ce serait mal placé. Il a passé sa vie à s'occuper de sa famille, elle s'agrandit juste un peu plus.

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Inga regarde autour d'elle, se tient droite devant la porte qui se ferme derrière elle. Elle observe un peu l'appartement avec le même genre de regard qu'un enfant découvrant le monde, curieux et fasciné, quoiqu'un peu déboussolé. Elle fait quelques pas, écoute Nikolai parler comme un bruit de fond. Elle ne pense même pas à répondre à ses questions et par réflexe – un réflexe étrange, qui la surprends elle-même – Inga passe ses bras autour de Nikolai, pose sa tête contre lui avec un léger sourire soulagé, rassurée qu'il ait ouvert la porte. Une étreinte rapide, légère, juste quelques secondes avant qu'Inga s'éloigne aussi rapidement.  

« J'espère que je ne t'ai pas...» Dit-elle finalement. Réveillé ? Nikolai n'a pas l'air d'une personne qu'on vient de tirer de son sommeil à coup de sonnettes, non. Elle fixe le sol. «… dérangé. » Elle finit finalement sa phrase à mi-voix, rentre un peu les épaules ; se faisant aussi petite que possible. « Euh... Je dois être là depuis quelques jours – semaines, plutôt. » Se reprends-t-elle rapidement. « Est-ce que tu aurais du thé, s'il te plait ? Et Timofei a sûrement faim, je pense. » Inga s'accroupit pour gratter la tête de Timofei, qui fixe Nikolai en plissant des yeux, méfiant.

Inga se redresse, se balance nerveusement sur ses pieds, détaille Nikolai attentivement. Si elle n'avait pas lu l'adresse sur les enveloppes du bureau de sa mère il y a quelque temps, jamais elle ne l'aurait reconnu non plus. Elle hausse les épaules, remets une mèche de cheveux derrière son oreille.

« Ça fait longtemps. » marmonne-t-elle, énonçant une évidence. Elle ne pourrait même pas mettre une date précise de la dernière fois où elle l'avait vu. « Ça ne te dérange pas j'espère ? Je ne veux pas m'imposer. » Elle ne se voit pas expliquer qu'elle dort dans la rue depuis quelques semaines, puisqu'elle claque la majorité de son salaire dans de la drogue et de la nourriture pour chat plutôt que d'en mettre de côté pour – éventuellement – louer un appartement . « Juste le temps que je trouve un appartement...? » Encore fallait-il qu'elle cherche, bien sûr.

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Elle lui semble perdue, cette cousine qui débarque sur le pas de sa porte. Elle a tous les signes d'une personne qui erre sans trouver la moindre lumière à suivre. Nikolaï est bien incapable de lui en apporter une – parce que c'est exactement le point sur lequel il échoue, ses frères en sont l'exemple le plus flagrant d'après lui. Mais il peut amener un semblant de stabilité – un toit au-dessus de la tête, un repas quotidien et une pâtée de qualité pour le pauvre animal qui semble fatigué de sa situation. C'est ce qu'il fait de mieux, créer une illusion, un sentiment de mieux. Il se le répète quand il contemple son échec – un Dimitri tout sauf stable, un Vladimir qui accumule sûrement les conneries sans que personne ne le sache, un Basile détruit ou une Kendra qui a fini à l'hôpital. Il doute parfois de son efficacité, et maintenant qu'Inga est face à lui, il ignore s'il pourra la protéger elle aussi.

Le contact physique est trop inhabituel, presque personne ne fait jamais de câlins à Nikolaï – sauf Kendra. Les gens préfèrent une main serrée, beaucoup plus conventionnel. Ça fait ton sur ton avec ses airs de russe un peu trop strict, le chef du bureau des aurors ne peut pas aimer les étreintes. La vérité est autre, il n'a pas d'avis dessus. Il n'a rien contre, il n'est pas du genre à en quémander. Mais cette fille qui débarque de nulle part, il ne la jugera pas pour ça. Elle est de sa famille, porte son nom. En sonnant à la porte de son appartement, elle lui donne simplement une charge supplémentaire et il se prépare à tout sacrifier pour comme, comme pour les autres.

— Tu ne me déranges pas, dit Nikolaï avec ce ton dur qui le caractérise tant quand il occupe son rôle de maître de famille. Même si leur mama est la Bolgarov la plus âgée et importante sur le territoire anglais, c'est à lui de s'occuper de ce genre d'affaires. Je vais te faire un thé. Il lui fait signe de le suivre dans la cuisine où il remplit la bouilloire qui pose sur la gazinière – Nikolaï n'aime pas spécialement toutes ces choses électriques, elles l'ennuient. Du coup, c'est bien que tu sois venue ici. Ta mère était inquiète, elle m'envoie une lettre par an pour me demander de prendre soin de toi., explique le plus âgé en posant une seconde gamelle de nourriture pour chat à côté de Pacha.

Il voit l'animal examiner la nourriture un peu méfiant alors qu'il sort de quoi faire une tasse de thé pour sa filleule. Il ne sait pas quoi vraiment comment se comporter, elle doit avoir l'âge de Kendra ce qui l'éloigne encore plus à ses yeux du rang de cousine.

— Tu peux rester autant que tu veux, tu ne me gênes pas. Il préfère limite l'avoir à la maison, il est sûr de pouvoir garder un œil sur elle au moins. Elle n'a pas l'air épaisse, il est persuadé qu'elle lui ment, qu'elle est là depuis bien plus longtemps. Ça fait des années que Inga fugue, qu'elle fuit. Personne ne sait si elle s'est posée, et il craint que cette vie la rappelle à nouveau. Je peux t'aider à trouver un travail si tu veux, à moins que tu aies déjà des contacts. Il lui tend la tasse de thé brûlante – une bénédiction – avant d'ouvrir le tiroir de son placard pour en sortit un petit pistolet. Prend ça aussi, pour te défendre. Tu sais t'en servir? L'arme à feu finit dans la main d'Inga avec une boîte de balles. Il lui indique où en trouver d'autres, naturellement. Il faut que sa cousine puisse se défendre, qu'elle ne soit pas uniquement une faible femme. Et si tu as un problème, tu m'appelles dans la minute. Pas quelqu'un d'autre, moi d'abord. La conversation lui paraît normale. Chez les Bolgarov, on offre des pistolets à des enfants, à une fille qui ne semble pas assez stable pour son bien et on lui propose de l'aide pour cacher des corps. La simplicité de la Russie manque à Nikolaï parfois.

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L’odeur rassurante du thé russe qui lui rappelle la maison enveloppe la pièce et Inga se sent un peu mieux, un peu moins perdue, un peu plus en sécurité. Elle se laisse tomber sur le canapé, observe les gestes de Nikolaï et se dit, pour une fois, que ce n’était peut-être pas une si mauvaise idée après tout. Son cœur se serre un peu en repensant à sa mère – la pauvre qui doit encore se demander où sa fille peut bien avoir atterri, si celle-ci, même, est encore en vie. Inga fait taire la culpabilité.

« Je sais. » mentionne-t-elle en repensant à la dernière lettre de sa mère adressée à Nikolaï. « J’étais passé à la maison, il y a quelque temps. Elle va bien ? » demande-t-elle distraitement. Inga ne peux pas dire quand exactement c’était – il y a quelques années, quelques mois, quelques jours… Déjà trois ans, qu’Inga ne pourrait même pas raconter tant les jours s’effacent rapidement, lorsqu’elle fermait les yeux.

Elle attrape la tasse brûlante entre ses doigts, humant l’arôme si familier. Elle esquisse un petit sourire alors qu’elle y trempe ses lèvres. « Merci beaucoup » souffle-t-elle, pour le thé et pour l’autorisation de rester – Inga est bien plus reconnaissante qu’elle en a l’air, sans doute. Pendant quelques temps, elle songerait presque à rester ici plutôt que de fuir indéfiniment… Une pensée qu’elle repousse rapidement, un peu effrayante. Elle secoue la tête négativement, écarquillant les yeux – persuadée de déjà abuser de la gentillesse de son parrain.

« Non, non, c’est bon, ne t’en fais pas. J’ai trouvé un boulot, au Deus. » Un petit miracle pour Inga – un boulot aux horaires de nuit, entourée de musique bien trop forte, de gens qui ne se souciaient pas plus d’elle que ne se souciait d’eux… Elle n’aurait pas pu trouver mieux. Inga sourcille à peine, ses yeux se posent sur l’arme déjà dans sa main. « Je crois, oui. » Il lui semble se rappeler qu’elle en avait un, égaré au gré de ses allées et venues. Elle hausse les épaules. Ce n’est même pas étonnant que Nikolaï lui en donne une. « Compris. » Elle hoche la tête, range l’arme dans son sac, posé contre ses jambes. La russe ne cherche pas à questionner – quel genre de problème, pourquoi lui pas la police ou quelqu’un d’autre… Ce genre de fonctionnement est presque naturel chez les Bolgarov, même si Inga a depuis longtemps été hors de ce « monde ». Elle l’accepte rapidement. « Tu vas lui dire que je suis ici ? A ma mère ? » demande Inga d’une petite voix – elle n’est pas si naïve ; elle se doute bien que Nikolaï à un devoir tacite envers sa mère, mais espère secrètement qu’il la comprendra. « Je préférerai que non. »

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Nikolaï lance un regard presque étonné à sa filleule – il ne s'attendait pas à ce genre de question, et bizarrement il se retrouve dans l'incapacité de formuler la réponse qu'il aimerait. Il n'a aucune envie de brusquer Inga, il sait qu'à la moindre erreur, il court le risque de la voir passer la porte, disparaître à nouveau pour les quelques années. Elle ne reviendra peut-être pas vivante la prochaine fois, se dit-il soulagé de la voir en un seul morceau. Elle est si différente de l'enfant qui courait avec Vladimir – si différente de l'image qu'il avait gardé d'elle par le biais d'une photo de famille accrochée sur un mur blanc sans vie. Les yeux du russe s'assombrissent un peur quand elle mentionne être passé à la maison. Il ignore depuis combien de temps sa tante n'a pas eu de nouvelles de sa fille mais cela se compte au moins en année – cinq, peut-être plus ? Inga lui paraît encore plus instable que quelques minutes auparavant, et il ignore quoi dire.

— Je vois, dit-il incertain de la marche à suivre. Il n'a jamais été très doué pour les relations humaines, et ce n'est pas ses frères qui iront dire le contraire. Elle va bien, tu lui manques beaucoup par contre. Il ignore si c'est une bonne idée, si cela ne va pas la faire partir. Il a peur qu'elle y voie une tentative ratée pour la faire culpabiliser au sujet de son départ – Nikolaï n'aurait pas osé, pas avec sa filleule. Il n'est pas assez proche d'elle pour juger, ce genre de comportement est bon pour ses frères et leurs idées stupides.

Il attrape sa tasse de thé – cette boisson fait partie de ses préférées, l'une des seules qui a la capacité de le détendre. Elle lui rappelle une époque maintenant révolue, celle de son enfance dans une Russie peu accueillante, une époque qu'il ne regrette aujourd'hui plus. Et pourtant, ce thé le plonge dans une nostalgie presque chaleureuse, elle le réchauffe le l'intérieur et au lieu de lui faire regretter la fin d'une époque de façon brutale, elle le pousse à aimer celle qui vient, associant la lourdeur anglaise à sa patrie natale. Quand il voit Inga esquissé un sourire, il réalise qu'ils ne sont peut-être pas si différent. Qu'après des années passées – des kilomètres parcourus – ils ne sont que des russes exilés loin de chez eux, deux individus qui face à une boisson toute seule retrouve le réconfort perdu.

— Au Deus ? Tu as dû voir Dimitri et Vladimir alors. Il réalise alors que les chances qu'elle avait de les reconnaître était minces, surtout après des années. Lui-même aurait été incapable de la remettre et il se doute que ses frères – dans l'état dans lequel ils sont dans ce genre de soirée – seraient bien incapable de réaliser qu'ils sont face à leur cousine et pas à une simple inconnue. Parfait alors, se contente de dire Nikolaï. Les affaires de Bolgarov ne lui semblent maintenant n'être qu'une paperasse facile à résoudre et il se doute qu'elle lui donnera sûrement moins de travail que Dimitri. Je suis obligé Inga, j'ai une responsabilité envers ta mère. Il se doute que cette réponse n'est pas celle qu'elle attendait – elle aurait préféré qu'elle la couvre, mais le russe est bien incapable de supporter l'idée que sa tante souffre encore la disparition de sa fille alors qu'il a le moyen de la rassurer. Mais je lui dirais que tu es bien ici, et qu'elle n'a pas besoin de venir te voir. Tu n'as pas à avoir peur de la voir débarqué.

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« Oh. » dit seulement Inga, d'une voix faible alors que sa gorge se serre à cause de la culpabilité. Sa pauvre mère qui doit se torturer, savoir où est-ce qu'elle a échoué pour que sa fille unique fugue à l'autre bout du monde, sans donner de nouvelles. Sa pauvre mère qui doit s’inquiéter – mais un semblant de soulagement : elle va bien. Inga baisse les yeux, fini par hocher la tête. « C'est plutôt bien. » commente-t-elle.

Elle serre la tasse entre ses doigts avant de prendre une gorgée. Ses deux autres cousins – elle a beau avoir écris de nombreuses lettres à Vladimir, elle se sait incapable de le reconnaître. Quand à Dimitri … Alors oui, sûrement, elle a du les croiser sans même les reconnaître – une situation un peu étrange, quand on y pense. Elle hausse les épaules en reposant la tasse devant elle. De toute manière, le Deus n'était pas le meilleur endroit pour des retrouvailles de famille émouvantes, loin de là. Elle se contente d'un silence qui réponds à la question de Nikolaï.

Timofei s'installe sur ses jambes, et elle serre un peu l'animal contre elle. Elle observe son parrain, fronce un peu les sourcils en entendant des mots qu'elle aurait préféré ne pas entendre : l'envie de se lever, reprendre ses affaires et partir la prends – il suffirait qu'elle se lève, qu'elle dise « désolée, j'ai fais une erreur en venant ici » avant de disparaître à nouveau sans que personne ne sache où. Elle l'avait déjà fait, le refaire ne serait pas très difficile. Pourtant, la russe reste assise, le chat sur ses jambes qui s'habitue déjà au confort d'avoir un toit sur sa tête. Elle baisse le menton.

« Je comprends, bien sûr. C'est normal après tout. Je ne veux juste pas qu'elle... » Elle se stoppe, sans trop savoir où elle voulait en venir, les mots meurent sur ses lèvres avant d'être prononcés. Inga secoue la tête. « Merci, quand même. Je suis désolée de vous embêter – toi et ma mère – avec... Ça. » Elle avale la fin de sa tasse de thé, la repose. Inga se tords les mains un peu nerveusement, avant de reprendre. « Si je peux faire quoi que ce soit pour te remercier... Je veux pas abuser de ton hospitalité comme ça. Je peux payer des choses si tu veux. Ou quelque chose comme ça.  » Insiste-t-elle un peu. Elle se refuse d'être uniquement un poids, une enfant dont on doit s'occuper, particulièrement dépendante – même si, elle est là, incapable de se débrouiller toute seule.

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Il a l'impression d'avoir choisi les bons mots – choses rares, habituellement quoi qu'il dise est mal pris par ses frères qui se servent de chacun de ses mots pour tenter de le déstabiliser. Sa filleule semble plus calme, plus douce. À croire que toutes ces années passées loin de l'emprise de la famille Bolgarov peut être bénéfique – quoi que quand on voit l'être perdu sans le moindre repère qu'elle semble être, Nikolaï finit par se poser des questions. Il termine son thé encore chaud d'une traite, son regard posé sur l'horloge qui lui indique l'heure avancée. Le lendemain promet d'être difficile même avec son habitude à ne dormir que quelques heures. Incapable de dire si c'est l'alcool ou la vodka qui le réchauffe, il se lève pour poser la tasse la table qui traîne. Inga dans son appartement, c'est une nouvelle personne à protéger, une nouvelle personne qui rentre dans le cercle très fermé de sa famille. Il ignore ce que mama pensera d'un tel acte de bonté, mais il ne peut pas renier la promesse faite à sa tante.

— C'est rien Inga. Je suppose qu'on a tous besoin d'aide à un moment précis, dit-il d'un ton rassurant. Son but est de ne pas l'effrayer – il ignore vraiment la marche à suivre. Nikolaï est loin d'avoir la fibre paternelle – il est le grand-frère raté, on lui rappelle bien assez souvent. Tu es vraiment ici chez toi, tu n'as pas besoin de payer quoi que ce soit. Ce serait de la folie, tout le monde sorcier sait que les Bolgarov n'ont nullement besoin d'argent – sans parler du salaire, tous les extras en lien avec la mafia russe suffiraient pour nourrir des familles entières pendant des années. Par contre, je vais me coucher. Il y a des draps propres sur le lit, et n'hésite pas à prendre une douche si tu veux. Et je te laisserais des clefs sur la table demain matin. Il lui sourit avant de partir en direction de sa chambre pour envoyer un message à sa tante. La visite est inattendue mais il ne doute pas que la nouvelle fasse plaisir à celle qui a tenu à ce qu'il soit le parrain de sa fille.

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